Monastère Saint Silouane

Dire Merci

30/12/2018 Lc XVII 11-19
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Ce récit du miracle des lépreux que nous venons d'entendre est non seulement le témoignage de la miséricorde du Christ vis-à-vis de ceux qui souffraient mais c'est aussi un enseignement pour chacun d'entre nous. En effet, si nous faisons une transposition, nous sommes tous, d'une manière ou d'une autre, plus ou moins profondément, atteints par la lèpre, la lèpre de notre âme qui est notre faute, notre péché, notre chute. Et nous savons bien que le seul recours que nous puissions avoir pour retrouver la santé de cette âme souillée, c'est de crier vers Dieu, de se présenter à Lui dans l'état où nous sommes, dans l'état de lépreux et de lui demander la guérison, ce qui est le propre du sacrement de la confession des fautes. Ce qui est intéressant aussi de voir c'est que le Seigneur Jésus guérit les dix qui se sont présentés à Lui pour être guéris ; ils l'on été mais un seul sur les dix – c'est-à-dire pas beaucoup – est venu lui dire merci et rendre gloire à Dieu. Alors cela doit nous remettre un peu en question. Est-ce, lorsque nous allons nous confesser auprès du prêtre qui est intermédiaire entre Dieu et nous et que nous recevons l'absolution c'est à dire la guérison de notre âme, est-ce que nous pensons à remercier le Seigneur par une prière plus ou moins spontanée ? A plus fortes raisons lorsque nous sommes devant le Seigneur avec une supplication particulière autre que le péché, une guérison du corps ou quelque chose d'autre, et que nous Lui demandons sa grâce et que, l'ayant obtenue nous restions dans l'attitude des 9 lépreux qui certes ont été guéris mais ne sont pas venus dire au Christ leur reconnaissance. Est-ce que lorsque nous obtenons les grâces que nous souhaitons, avons-nous l'instinct de remercier Dieu? A chacun d'entre nous évidemment de répondre mais il faut bien reconnaître que nous avons beaucoup plus tendance à demander qu'à remercier et pourtant à chacune de nos Liturgies que l'on appelle une Eucharistie, nous avons l'occasion de rendre grâce au Seigneur car le mot lui-même « Eucharistie » signifie « rendre grâce », dire merci, evcharisto-poli en grec : merci beaucoup. Est-ce que pendant cette Liturgie qui se déroule aujourd'hui et les autres fois, est-ce que nous pensons à remercier le Seigneur ? Certes nous Lui demandons des choses : dans nos ecténies nous Lui demandons la paix, la paix du monde entier et tout ce qui concerne nos vies et nous Lui rendons grâce aussi au travers des grandes prières qui sont lues à haute voix. En venant communier au Corps et au Sang du Christ, c'est une manière de rendre grâce, de nous approcher à nouveau de Lui purifié que nous sommes, guéris de nos maux et nous approchant de Lui – bien qu'indignes – nous Le remercions profondément. C'est ce que nous faisons tout particulièrement dans les prières dites « après la communion » mais il faut bien reconnaître que souvent, pendant ces prières, l'on est distrait par autre chose ou l'on sort directement de l'église avant, sans avoir dit merci. Et pourtant ces prières sont d'une grande richesse. Et puis, indépendamment de l'Eucharistie que nous célébrons aujourd'hui, nous pouvons à tout moment dire merci à Dieu dans notre chambre, dans notre cellule, là où nous sommes, peu importe l'endroit ; savoir dire merci à Dieu, être reconnaissants ; c'est peut-être cet enseignement-là qui nous est donné aujourd'hui au travers de ce récit du miracle des lépreux.
Nous fêtons en même temps aujourd'hui les Saints Ancêtres du Seigneur, tous ceux qui l'ont précédés : les Prophètes, les Rois et les autres qui eux, quand on relit les textes ont su rendre grâce à Dieu. Certes ils demandaient des choses pour eux, pour le peuple mais ils rendaient grâce à Dieu. Un des grands personnages de l'Ancien Testament, Melchisédec, est celui qui représente justement par excellence l'action de grâce, il rend grâce à Dieu et il y en a encore bien d'autres ; tous ces Ancêtres du Seigneur ont su à la fois demander le secours de Dieu dans sa miséricorde  (la miséricorde de Dieu a été accordée – nous le chantons dans le psaume 118 entre autres ) et aussi dire merci au Seigneur. Relisez les psaumes et vous verrez qu'il y a des psaumes magnifiques d'action de grâce ; nous pouvons les utiliser pour dire merci au Seigneur pour les petites ou les grandes grâces reçues ; tout ce que le Seigneur nous offre n'est jamais petit de toute façon. Nous devons prier certes, c'est notre responsabilité de chrétiens pour nous-mêmes et pour le monde entier. Mais lorsque Dieu nous a entendus, lorsque Dieu nous a exaucés est-ce qu'il y a des actes d'action de grâce ? Il y en a eu dans l'histoire : le Sacré Coeur de Paris, la grande église, a été construite en action de grâce suite à une guerre où Paris a été épargné, après la supplication de tous ceux qui demandaient au Seigneur d'être épargnés, c'est un bel exemple parmi d'autres ; nous pouvons prendre beaucoup d'autres exemples, des exemples qui nous montrent que c'est possible de dire merci à Dieu. Nous avons l'occasion lorsque nous disons les prières avant et après le repas, particulièrement après le repas, de rendre grâce à Dieu. Est-ce que nous conservons cette tradition en famille, personnellement, voire secrètement ? Il est important d'apprendre à dire merci. Lorsque j'étais un petit enfant si je ne disais pas merci à mes parents ou à mes amis, je recevais une petite tape qui me rappelait que j'oubliais quelque chose : je n'avais pas dit merci. Dieu ne nous donne pas de tape, ce n'est pas son rôle mais il n'empêche que nous devons nous souvenir que nous avons à rendre grâce. Comment pourrons-nous rendre grâce au moment où nous nous présenterons devant le Seigneur si sur cette terre nous ne nous sommes pas entraînés à cette acte de grâce ? Lorsqu'Il nous dira – s'Il nous le dit - « Venez près de Moi » est-ce que nous saurons, comme cet étranger, nous prosterner devant Lui et Lui dire merci ou bien aurons-nous perdu l'habitude ? C'est la leçon de cet Evangile d'aujourd'hui.. Que Dieu nous aide à rendre grâce ; d'ailleurs le Christ nous apprend à rendre grâce : « Je te rends grâce Père …. » dans la grande prière sacerdotale notamment. Oui, demandons au Christ qu'il nous apprenne à Lui dire merci et s'Il nous apprend à dire merci et bien disons-Lui encore merci.

. Amen


Rencontre avec le Christ

16/12/2018 Lc XIV, 16-24
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Cette parabole que nous venons d'entendre peut être interprétée de façons différentes mais, en définitive, toutes les manières dont nous pouvons l'interpréter reviennent au même : est-ce que dans notre vie Dieu est le premier ? Est-ce que Celui qui nous a invité à partager sa vie, sa vie divine par amour, est-ce que Celui-là je le considère comme le premier ? Alors on peut interpréter l'histoire du banquet comme le banquet eucharistique que nous allons vivre. On peut interpréter ce banquet comme le Royaume des Cieux qui est offert à tous. On peut interpréter encore ce banquet comme la rencontre avec le Seigneur dans la prière. Tous ces « banquets » sont des occasions qui nous sont offertes pour une rencontre, une rencontre joyeuse, paisible, aimante avec Celui qui est tout amour pour les hommes. Or dans la parabole nous entendons que les uns après les autres viennent s'excuser : ils ont été invités ; Dieu leur a dit : « Venez, venez vers Moi » mais ils ont tous une raison et une bonne raison et ils ne viennent pas. Alors Jésus dit qu'il faut que le Père envoie chercher par ses serviteurs tous les autres, tous ceux qui n'ont pas forcément été invités directement, parce qu'ils n'ont peut-être jamais entendu parler de Celui qui les invitait ; tous ceux-là sont invités. Alors cela pose une grave question pour chacun d'entre nous parce que nous, nous avons reçu l'invitation ; à partir du jour où nous avons été baptisés, nous avons été invités à partager la divinité de Dieu, l’amour de Dieu et que faisons-nous de cette invitation ? Oui, nous avons des excuses : nous avons beaucoup travaillé pendant le jour, nous sommes fatigués ; nous avons quelques œuvres importantes à mener  mais cela nous arrive tous les jours à moi comme à vous  : alors que c'est l'heure de la prière, que c'est le moment de la rencontre avec Dieu sous une forme ou sous une autre, nous trouvons un moyen pour échapper à cette rencontre, à cette invitation , nous avons quelque chose d'autre à faire ; normalement, lorsque la journée est terminée, que les œuvres nécessaires ont été accomplies, c'est le moment de rendre grâce à Dieu, de se retrouver avec Lui paisiblement, d'échanger avec Lui sur ce que nous avons vécu en bien comme en mal, en sachant que nous serons toujours accueillis, écoutés, bénis. Mais nous trouvons des raisons pour échapper à cette rencontre.
Cette parabole – comme toutes les paraboles – est une mise en garde, forte, contre un danger, le danger de l'égoïsme : moi d'abord et Dieu ensuite. Lorsque le Royaume des Cieux s'ouvrira pour chacun d'entre nous à la fin des temps, aurons-nous, là encore, des excuses : j'ai encore quelque chose à faire ? Pourtant le Seigneur nous prévient lorsqu'Il nous parle de la fin des temps : « Lorsque vous saurez que c'est la fin des temps, laissez tout et venez ». Seulement si nous ne nous sommes pas entraînés tout au long de notre vie à laisser ce qui est peut-être bon mais secondaire par rapport à ce qui est fondamental, serons-nous capables à la fin des temps de dire : « Oui » à l'invitation ou bien de trouver encore une excuse ? Cette parabole veut nous interpeller, veut nous interroger, doit nous remettre sur les rails peut-être, en tout cas elle doit vivifier dans notre cœur le désir de Dieu, Dieu comme étant le premier servi, Celui à qui l'on pense dès que l'on s'éveille le matin, Celui à qui l'on pense lorsqu'on s'endort le soir, Celui à qui l'on pense dès que c'est le moment de la rencontre avec Lui ; les manières qu'ils nous offrent sont très variables, multiples ; à nous de les voir, de les comprendre, de les accueillir et surtout d'en vivre. Nous savons pourtant quel est le bonheur que nous ressentons comme quelque chose d’extraordinaire quand nous sommes avec Dieu, quand nous avons reçu Dieu, quand nous avons accepté, plus exactement, qu'Il nous reçoive ; nous savons que c'est un bonheur extraordinaire bien plus grand que le bonheur égoïste ; pourtant notre faiblesse et aussi la tentation du démon font que, trop souvent, noua laissons passer l'occasion de la rencontre ; la rencontre peut être simple : c'est un sourire à offrir à un frère, à une sœur, c'est regarder l'autre et non pas détourner le regard, c'est poser un acte d'amour, c'est donner quelque chose de plus que nous donnons d'habitude, c'est s'offrir à Dieu pour un service ou pour un autre et puis c'est prendre du temps, ce fameux temps qui nous échappe ; et bien il faut que nous captions ce temps et que nous gardions ce temps comme un moment privilégié, un moment d'excellence, un moment que nous ne pouvons pas refuser. Si nous étions invités par quelque grande personnalité de la terre : le président de la république, le pape de Rome, le Patriarche de ceci ou de cela, est-ce que nous dirions : « On verra plus tard, je n'ai pas le temps. Je dois m'occuper de mes bœufs, de ma femme, de ma nourriture, de mes prés ; on verra après ?». Je suis sûr que non ; nous irions, nous ferions tout pour aller à cette rencontre. Alors pourquoi, lorsque c'est Dieu qui nous invite, nous trouvons des raisons pour refuser cette invitation ; parce que nous sommes trop riches de nous-mêmes, trop imbus de nous-mêmes, trop surs de nous-mêmes ; parce que nous considérons qu'en définitive, probablement inconsciemment, nous n'avons pas besoin de Dieu, que nous sommes très bien avec nous-mêmes et nous nous trompons . Parce que, dans la parabole, ce sont ceux qui, apparemment, ont besoin de quelque chose qui sont aveugles, boiteux, malades, lépreux, qui sont pauvres, ce sont ceux-là qui viennent vers le Seigneur ; dès qu'ils sont invités, ce sont eux qui viennent. Alors est-ce que nous serions meilleurs qu'eux ? Est-ce que nous ne serions pas nous aussi aveugles, sourds, invalides, lépreux, pauvres ? C'est une question que le Christ nous pose aujourd'hui. Il nous met en garde : « Faites attention ; si je vous appelle c'est pour vous offrir mon amour, vous faire partager ma divinité ; essayez de l'accepter, faites un effort, organisez-vous et venez à Moi vous tous qui avec besoin de Moi ». Amen

Saint Nicolas

6/12/2018 Lc XX, 9-18
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous célébrons aujourd'hui la fête de St Nicolas, un des saints qui, dans le monde entier, est certainement celui qui est le plus célébré. C'est un peu mystérieux car on connaît très peu de choses de sa vie. On sait qu'il a assisté à un concile qui luttait contre l'arianisme. On sait par des histoires plus ou moins authentiques ou légendaires une chose importante et qui certainement est elle- même véridique, que c'était un homme très bon, très doux et très attentionné à tous. Il est le patron de beaucoup d'organismes, de sociétés, en particulier il est le patron des voyageurs, des marins, de ceux qui sont dans la tempête et on raconte qu'il a sauvé justement un bateau qui était en perdition, que c'est lui qui est intervenu pour que les hommes soient sauvés. Je pense que c'est une bonne occasion pour nous de le fêter aujourd'hui, dans un moment où notre Eglise passe par des tribulations – il y en a eu bien d'autres dans l'histoire de l'Eglise et bien plus graves ; il arrive de temps à autre que, à cause de la faiblesse des hommes, il y ait des tribulations dans l'Eglise. Ces tribulations ne doivent pas nous inquiéter au-delà d'une certaine mesure car nous ne sommes pas seuls : nous sommes avec le Christ jusqu'à la fin des temps et même après la fin des temps. Et s'il nous a dit qu'il serait avec nous jusqu'à la fin des temps pour nous aider, pour nous défendre, pour nous remettre dans la vraie voie alors au moment où nous sommes les uns, les autres, pour différentes raisons, dans certaines souffrances, et bien je pense qu'il est bon de demander à St Nicolas, si bon, si doux qu'il intervienne auprès du Seigneur, qu'il intercède pour son Eglise qui est comme un bateau qui actuellement tangue beaucoup dans tous les sens mais ; un bateau qui tiendra bon jusqu'au bout car ce bateau il existe depuis longtemps et il existera encore pendant longtemps même s'il doit subir encore et encore des tribulations. Que St Nicolas soit notre intercesseur, qu'il apaise les tempêtes intérieures et extérieures et qu'il nous donne surtout la foi, la foi dans le Christ qui est notre rocher. « Que peut-il nous arriver de grave ? Qui nous arrachera à l'amour du Christ », nous dit St Paul. Les hommes ? Certainement pas. Personne ne peut nous arracher à l'amour du Christ si nous désirons accueillir cet amour et si nous le supplions. Alors n'ayons pas peur. Que nos tribulations soient vraiment l'occasion d'offrir à Dieu notre confiance, notre foi, notre espérance, notre amour en Lui. Que St Nicolas nous y aide par sa prière et son intercession.
. Amen


Le prochain

18/11/2018 Lc X, 25-37
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans cet Evangile il y a quelque chose qui peut-être vous a surpris. En effet, le docteur de la Loi qui interroge le Seigneur connait bien les commandements de Dieu : « Tu aimeras ton Dieu de toutes tes forces, de toute ton âme ou de tout ton esprit et tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Et il pose la question au Christ : « Et qui est mon prochain ? » Or, dans la parabole, c’est comme si la réponse était inversée parce qu'on aurait tendance à penser que celui qui est mon prochain est celui qui, dans la parabole, est au bord de la route, a été maltraité, a été blessé, il est presque mourant. C’est celui-là le prochain, celui que je dois soulager. Et, en fait, c’est tout l’inverse dans la parabole. Le prochain c’est un Samaritain qui s’est arrêté contrairement aux deux autres et qui a soulagé celui qui souffrait. Il y a, oui, comme une espèce d’inversion mais qu'est-ce que le Seigneur veut nous faire comprendre au travers de cela ? Il n’y a pas d’ambiguïté en fait car nous devons être le prochain de celui qui souffre et celui qui souffre doit reconnaître l’autre comme son prochain : il y a donc une espèce d’échange de relations avec la même qualification d’un côté comme de l’autre. Nous devons tous être le prochain de l’autre d’une manière ou d’une autre. Et en fait cela nous rappelle l’autre parabole que le Seigneur nous offre pour méditer sur la fin des temps. Vous savez, il y aura d’un côté les boucs et de l’autre côté les brebis, etc. Et puis on l’interroge et il dit : « Celui qui aura soulagé les pauvres, c’est Moi qu’il aura soulagé. Celui qui aura visité les prisonniers, c’est Moi qu’il aura visité. Celui qui a vêtu celui qui était nu, c’est Moi qu’il aura visité ». Autrement dit pour que nous soyons « prochain » dans un cas comme dans l’autre il faut que nous nous en référions au Christ ; dans tous les cas de figures, nous devons essayer de comprendre que nous avons quelque chose à donner à l’autre de la part du Christ, soit en reconnaissant l’amour de l’autre qui panse mes plaies, soit en pansant les plaies de celui qui en a besoin. Dans les deux cas, si nous le faisons dans l’esprit du Christ en pensant que celui qui est en face de moi devient signe du Christ, quel que soit celui qui est en face de moi, celui qui souffre, comme celui qui soulage ; cela engage donc notre responsabilité de « distributeur » d’amour ; nous devons être reconnaissants à celui ou celle qui apaise nos plaies quelles qu’elles soient : morales, physiques, spirituelles, psychiques et nous devons l’aimer comme notre propre prochain qui est venu de la part du Christ pour nous soulager. Et puis nous devons aussi soulager celui ou celle qui est atteint par quelques plaies en sachant que c’est le Christ que l’on soulage. Cela veut dire que nous avons une belle vocation en tant que chrétien, une responsabilité que le Seigneur nous offre, la responsabilité de l’amour et c’est difficile ; c’est cela le problème c’est que c’est difficile d’aimer. Le Seigneur nous le dit : aimer ses amis c’est facile mais il va jusqu’à nous dire : aimez vos ennemis et cela c’est le plus difficile de tout, sans la grâce c’est même impossible et pourtant le Seigneur nous y invite. Si nous sommes invités à l’amour nous devons essayer de chercher comment nous pouvons répondre à cette invitation et puisque nous sommes entrés dans cette belle période de carême qui précède la fête de Noël de l’incarnation, c’est peut-être le temps de nous interroger, de nous examiner devant Dieu et avec Dieu, pas tout seul, pas de manière psychologique mais d’une manière vraiment spirituelle, avec l’éclairage de l’Esprit-Saint, pour nous demander où nous en sommes par rapport à l’amour car Celui que nous fêterons dans une quarantaine de jours c’est Celui qui aime et qui aime tellement qu’Il s’abaisse, qu’Il s’abandonne totalement à la volonté du Père et, mû par l’Esprit, Il vient au milieu de nous devenir ce qu’il y a de plus fragile sur terre, un petit enfant, né dans des conditions – il faut bien l’avouer – peu reluisantes. Voilà comment Dieu se manifeste dans son amour, comment en quelque sorte il devient – et le mot est inadéquat – notre prochain. Il est notre Prochain par excellence avec un P majuscule : Il est Celui qui est le plus proche de nous alors nous pouvons Le rencontrer dans un grand nombre d’occasions : dans notre famille, dans notre communauté, dans notre paroisse, dans la rue, en faisant nos courses, en prenant les transports publics, peu importe mais ce qui est important c’est d’ouvrir les yeux, ouvrir les yeux dans un acte d’amour, ouvrir les yeux en se disant : qu'est-ce que j’ai à faire ? Est-ce que je dois crier pour que l’on vienne à mon secours si je suis dans la souffrance, dans le malheur ; dans la douleur pour que quelqu'un vienne et que je sois son prochain et puis qu’il devienne à son tour mon prochain puisqu’il m’aura soulagé ? Ou bien suis-je dans la situation inverse : je soulagerai celui qui est à côté de moi pour le moment et qui a besoin de mon secours d’une manière ou d’une autre ?  Il y a trente-six manières d’aimer et cela doit nous consoler parce que chacun prendra la manière qui lui correspond pour le mieux, sur le moment. Nous le savons tous, il est difficile de vivre ensemble parce que nous sommes tous différents et nous avançons tous à des rythmes  différents ; nous rencontrons des difficultés, des souffrances, des impossibilités même à certains moments mais c’est justement sur ces terrains-là, le terrain du vivre-ensemble, que nous avons à réfléchir mais surtout à agir en priant, bien sûr, en demandant le secours de Dieu pour aimer, pour aimer celui ou celle qui est venu nous soulager, pour soulager celui ou celle qui a besoin d’être soulagés ; par la prière, peut-être, c’est un moyen qui est toujours à notre disposition, la prière ; c’est un acte d’amour mais c’est aussi un cri : « Seigneur viens à mon secours, hâte-toi de me secourir » dit le psalmiste et le Seigneur vient en devenant notre prochain, le plus proche ; c’est Lui le plus proche ; c’est Lui qui est là pour nous aider à aimer ou à demander de l’amour. Alors oui, notre vocation de chrétien est belle, l’Eglise devient belle à cause de cela, si nous vivons cela ; nous sommes responsables de notre vie en Eglise, chacun, personnellement ; ce ne sont pas les autres qui sont responsables, c’est moi. C’est en moi que commence une guerre, une dispute, un conflit, un jugement, une erreur. Alors si je corrige en moi cette attitude Dieu va me donner la possibilité de changer et d’avoir une attitude d’amour envers mon frère, envers ma sœur et non pas une attitude de domination, de jugement, de rejet, toutes ces choses que nous connaissons bien malheureusement. Alors oui, notre vocation de chrétien est belle et si nous y correspondons – et nous pouvons, puisque la grâce existe – si nous y correspondons alors l’Eglise devient belle et la beauté c’est le reflet de Dieu.
. Amen


Amour bon Pasteur

11/11/2018 Lc VIII, 41-56 Jn X, 9-16
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans le second Evangile que nous venons d’entendre, le Seigneur nous livre sa Parole et nous précise qu’il est le Bon Pasteur, le pasteur qui guide son troupeau, qui est attentif à toutes ses brebis pour les mener au bercail. Il nous enseigne autrement dit sur ce qui est fondamental en Lui, l’amour, car le Bon Pasteur est celui qui aime ses brebis. C’est ce qu’Il nous dit. Il les aime quelle qu’elle soit et dans un autre passage de l’Evangile il nous raconte la parabole où le Bon Pasteur va chercher la brebis qui s’est égarée ; c’est la miséricorde du Christ qui est en cause, c'est-à-dire cet amour qui se pose sur la brebis qui est blessée, égarée, souffrante, malheureuse et Il la porte sur ses épaules.
Dans le premier Evangile il ne s’agit plus d’enseignement, il s’agit de quelque chose d’encore plus concret, c'est-à-dire l’application de l’enseignement : le Seigneur devient miséricordieux vis-à-vis de la fille de Jaïre, le chef de la synagogue, et de l’hémorroïsse, cette femme qui était atteinte d’un flux de sang. Il guérit l’une, Il ressuscite l’autre. Il applique, là aussi l’amour et la miséricorde.
Il se trouve qu’aujourd'hui nous fêtons Saint Martin, évêque de Tours, qui fut appelé et qui est appelé encore aujourd'hui Saint Martin le Miséricordieux ; à juste titre car Saint Martin est sans aucun doute l’un des grands modèles du pasteur. Dans la vie de Saint Martin on raconte que, dès l’instant où il a connu le Christ, il n’a cherché qu’à le prier : première étape, prier. Deuxième étape : faire en sorte que sa vie soit en conformité avec ce que le Christ avait dit : aimer. On nous rapporte l’épisode où il n’était encore que soldat où il donne la moitié de son manteau à un pauvre : il fait miséricorde au pauvre. Plus tard, il guérira beaucoup de personnes, il ressuscitera des morts mais tout cela il le fera par amour et cet amour il l’aura acquis dans la prière. Saint Martin se retirait dans les grottes de Marmoutier près de Tours avec ses compagnons et avant même d’avoir été élu évêque de Tours, il s’était retiré, seul, dans une grotte à Ligugé pour y vivre une vie de retrait, de prière et d’amour pour le monde. Des compagnons se sont joints à lui, ainsi est né le monastère de Ligugé. De là, il fut appelé à devenir évêque de Tours mais il n’a pas changé, il est resté le même, celui qui était mû par l’amour de Dieu, par la miséricorde du Christ qu’il avait reçus lui-même car on ne peut pas donner ce que l’on n’a pas reçu. Alors tout cela : la Parole du Christ, les guérisons du Christ et ce qu’a fait Martin le Miséricordieux, tout cela doit nous inciter nous-mêmes à vivre selon l’enseignement de Dieu, selon l’enseignement du Christ, à l’image du Seigneur Jésus et de Saint Martin : être véritablement des témoins de l’amour de Dieu. Dieu nous aime, je vous l’ai souvent dit ici ; Dieu nous aime tel que nous sommes avec notre nature déchue, avec notre pauvreté, nos chutes, avec notre faiblesse mais aussi avec nos richesses ; Il nous aime tout entier, ne nous rejette pas et si nous allons vers Lui Il nous accueille sans condition. Il applique ce qu’Il est, amour, et ce qu’Il donne s’appelle la miséricorde pour chacun d’entre nous. Alors si nous recevons la miséricorde du Seigneur, il faut nous souvenir que nous devons nous aussi vivre dans l’amour et être miséricordieux jusqu’au bout, jusqu’à l’impossible. C’est ce qui manque bien sûr, à nous tous d’abord et au monde entier. Saint-Silouane nous dit : Imaginons si tous les hommes de la terre acceptaient humblement d’aimer, dans quel monde viverions-nous ! Nous devons comprendre que tout commence, tout commence par chacun d’entre nous : les guerres, les disputes, les conflits, tout commence dans notre cœur. Ce ne sont pas les autres qui sont responsables, c’est moi. Je n’aime pas mon frère, ma sœur, je la juge, je le juge, je le rejette, je n’applique pas l’amour, je n’aide pas ceux qui ont besoin d’être aidés ; c’est là que cela commence. C’est trop facile de critiquer les uns, les autres dans leurs mauvaises actions. Bien sûr nous devons discerner ce qui est mauvais : le mal est le mal, le bien est le bien mais trop vite nous accusons ceux qui, par malheur, n’ont pas fait le bien et nous oublions ce que nous faisons, nous, dans notre cœur à certains moments. Certes nous ne sommes pas tout le temps des méchants, des mauvais, des gens qui jugent, des gens qui rejettent, bien sûr mais, à certains moments, nous le sommes aussi ; il faut le reconnaître dans l’humilité. Alors si nous commencions par nous : entendre la Parole du Christ, d’abord, qui est venu pour nous, pour nous guider, pour nous mener au bercail, nous aimant tels que nous sommes. Si ensuite nous comprenions comment le Christ a agi à partir de cette Parole et comment les saints, particulièrement Martin le Miséricordieux, ont agi ; si nous comprenions cela, c'est-à-dire que nous prenions cela avec nous (le mot comprendre c’est prendre avec), si nous mettions cette attitude-là dans notre cœur et en vivions, avec la grâce du Seigneur, indispensable, alors oui le monde aurait une autre couleur, l’Eglise serait belle. Elle est toujours belle parce que sa tête c’est le Christ qui est parfaitement beau puisqu’il est amour mais la partie humaine est un peu moins belle à certains moments mais la partie humaine, c’est moi, c’est vous, ce sont tous les chrétiens. Alors nous avons donc une responsabilité de chrétiens, la responsabilité d’entendre la Parole de Dieu, la responsabilité de nous souvenir de ce qu’a fait le Christ dans son Incarnation, tout au long des années où Il a vécu sur cette terre, la responsabilité de nous souvenir de ce qu’ont fait les Saints, Saint Martin et les autres. C’est une responsabilité qui doit nous engager à aimer. Si nous savions aimer, si nous comprenions combien l’amour est indispensable, tout serait résolu. C’est ce qui nous attend dans l’Eternité où il n’y aura plus ni contraintes, ni faiblesses, ni chutes. Il n’y aura que de l’amour mais avant l’Eternité, il nous faut apprendre à aimer. Amen

Ecouter la Parole de Dieu

21/10/2018 Lc VIII, 5-15
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
La parabole que le Seigneur nous propose est livrée avec une explication qu’il donne à ses apôtres, ce n’est donc pas utile de recommenter cette parabole dans son sens profond que nous avons compris. Il y a derrière tout cela évidemment une grande leçon de la part du Christ, une insistance même, afin que nous comprenions, comme l’ont compris les apôtres, que la Parole de Dieu est importante. La Parole de Dieu se manifeste dès l’Ancien Testament et prend toute son ampleur lorsque cette Parole, le Logos, le Fils de Dieu apparaît sur la terre et prononce tous les mots que nous connaissons. L’important du message évangélique d’aujourd'hui, peut-être, c’est que nous comprenions que nous devons écouter, écouter la Parole. Dans l’Ancien Testament il est dit « Ecoute Israël ». Le Seigneur Jésus dira à plusieurs reprises : « Ecoutez-moi vous tous ». Dans la règle de Saint Benoît il est dit : « Ecoute, ô mon fils ». Ecouter c’est ce que fait le petit enfant dès qu’il est né. Il ne pourra s’exprimer, il ne pourra dire une parole que lorsqu'il aura écouté, entendu ; il répétera d’abord puis il comprendra, puis il s’exprimera librement avec les mots qu’il aura assimilé dans son propre cœur et dans son propre intellect. Alors, pour la Parole de Dieu il en est ainsi. Nous l’entendons peut-être mais l’écoutons-nous ? C'est-à-dire cette parole a-t-elle une résonnance dans notre cœur, dans notre âme, dans notre être, dans notre vie ? Est-ce une parole pieuse, sympathique, quelque fois un peu difficile à entendre ou bien est-ce une Parole qui entre, qui pénètre dans notre cœur, qui est en quelque sorte digérée, assimilée à notre vie ? Est-ce que la Parole de Dieu entre parce que je l’ai écoutée ? Lorsque le Seigneur apparaît sur la terre toutes ses Paroles, toutes ses paroles divines nous sont offertes, elles nous sont offertes pour que nous grandissions, que nous grandissions selon l’Esprit-Saint dans l’amour de Dieu. C’est pour cette raison que, dans l’Eglise, la Parole de Dieu est toujours respectée rituellement, mais rituellement cela veut dire réellement ; le rite en lui-même n’est que le reflet de la réalité profonde : on ne retire pas de l’autel l’Evangile, sauf quand on le lit mais on le remet tout de suite sur l’autel, il ne quittera pas l’autel ; un autel sans Evangile est un autel auquel il manque quelque chose d’essentiel, la Parole. On vénéré l’évangéliaire, c'est-à-dire on vénère la Parole de Dieu et quand nous ouvrons dans notre chambre, dans notre cellule le livre des Evangiles ou la Bible, nous l’embrassons avant de commencer à lire, à entendre, à écouter et quand nous avons terminé, nous vénérons et nous embrassons notre livre saint. Le livre est saint parce que la Parole est sainte ; c’est toute la sainteté de Dieu qui arrive en nous, c’est toute la sainteté de Dieu qui vient nous imbiber comme une éponge qui a besoin d’eau. Alors, tout la question, et c’est bien là le sens de la parabole, qu'est-ce que nous faisons de cette Parole ? Amen

Icône

14/10/2018 Jn XVII, 1-13
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Le texte que nous venons d’entendre est comme un testament que le Seigneur Jésus nous laisse avant de quitter cette terre. Il rend compte à son Père du fruit de sa mission, à savoir que nous connaissions le Père comme nous avons connu le Fils. Cet Evangile est lu à l’occasion de l’anniversaire du 7
ème concile œcuménique qui fut un concile important parce qu'il faisait suite à une lutte fratricide entre ceux qui voulaient défendre la vénération des icônes et ceux qui s’y opposaient. Il ne s’agissait pas de défendre simplement des éléments qui auraient pu être des éléments de décor dans une église ou dans un temple, il s’agissait de beaucoup plus que cela car en défendant l’icône, les moines, les Pères qui ont pour certains sacrifier leur vie, ont voulu défendre beaucoup plus qu’une espèce de forme d’idolâtrie qui n’avait pas de sens ; ils ont voulu défendre l’incarnation du Christ car si nous pouvons représenter le Christ sur nos icônes c’est tout simplement parce qu'Il a été vu, Il a été entendu, Il a été touché et à partir du moment où Il a été vu on a pu le représenter ; autrement dit les Pères voulaient défendre la vénération de l’icône  parce qu’ils voulaient absolument maintenir la foi dans l’incarnation du Christ, ce Christ qui s’est fait chair pour nous, qui a donné sa vie pour nous, qui est venu sur terre en prenant notre corps de chair et en assumant le quotidien ; en se manifestant comme tel Il manifestait tout l’amour de Dieu car nous savons très bien que le Christ a été, pour nous, mis sur la croix, crucifié et est mort pour nous montrer combien nous étions aimés de Dieu malgré notre situation, malgré notre état de péché, de faiblesse, de chute et que Dieu nous aimait bien au-delà de tout cela puisqu’Il nous montrait qu’Il était capable de mourir pour nous. Certes on ne sépare pas la mort du Christ de sa Résurrection du troisième jour, gage pour nous de cet amour total car, en ressuscitant, le Christ nous offrait à chacun d’entre nous la possibilité de la résurrection personnelle. La vénération de l’icône du Christ est quelque chose qui touche l’humanité entière car lorsque le Christ est retourné vers le Père, Il y est retourné avec toute l’humanité, nous tous ; la compénétration de sa nature humaine et de sa nature divine entraînait notre propre nature humaine vers le Père, vers le salut et c’est cela qui est important. Lorsque nous vénérons la face du Christ nous vénérons Celui qui nous a sauvés. Nous devrions être marqués par cet extraordinaire don de Dieu comme l’on est marqué au fer rouge ; notre cœur devrait être marqué d’une manière définitive par la belle image du Sauveur de telle sorte que nous puissions nous en souvenir à chaque instant de notre vie. Car si les icônes existent c’est pour le souvenir, le souvenir de Celui qui nous a sauvés, le souvenir de Celui qui nous aime tant malgré nos erreurs, le souvenir de Celui qui est miséricorde et quil a un cœur qui se penche sur la misère de l’homme, le souvenir de Celui qui accueille tous les hommes de la terre car Il n’est pas venu uniquement pour sauver les chrétiens, Il est venu pour le salut de tous, Il l’a dit lui-même. La grande prière que nous venons d’entendre fait allusion à cela : que tous soient un, c'est-à-dire que tous les hommes de la terre soient unis entre eux par l’Esprit-Saint afin de connaître Dieu, de le connaître dans l’intimité de notre être profond, de le connaître dans notre quotidien, de le reconnaître dans notre frère ou dans notre sœur fussent-ils non-chrétiens. Tout homme, toute femme ont été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu. Alors nous autres les chrétiens nous avons une énorme responsabilité. Nous n’avons pas à tirer gloire d’une manière orgueilleuse du fait d’être chrétiens mais nous avons à être responsables de ce que nous avons reçu, nous avons reçu la possibilité d’être aimés quoi que nous fassions. C’est un grand mystère mais un mystère tellement réjouissant, tellement consolant, tellement fortifiant, tellement dynamisant, savoir que l’on est aimé. Ce qui manque terriblement et ce qui manquera toujours terriblement aux hommes de la terre c’est de savoir qu’ils sont aimés. Nous avons tous besoin d’être aimés d’une manière ou d’une autre mais sans aucun doute d’être aimés par Dieu et d’expérimenter cet amour, de l’expérimenter dans le banal de notre quotidien au travers d’un sourire, au travers d’une joie simplement humaine, au travers de la contemplation de la nature qui est belle et qui reflète la beauté de Dieu, au travers de tout ce qui est beau, même l’homme qui pleure pour des raisons justes est beau et nous devons l’aimer et lui dire qu’il est aimé de Dieu, c’est notre responsabilité. Alors oui, l’icône a tout son sens si on la comprend ainsi : ce n’est ni un objet de décor, ni on objet d’adulation mais c’est un lieu de foi et c’est un lieu d’amour.
. Amen


Foi, épreuves confiance

30/9/2018 Lc V, 1-11
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Ce récit de la pêche miraculeuse qui nous est bien connu comporte évidemment pour chacun de nous quelques enseignements bons à retenir. Tout d’abord le Seigneur commence à monter dans la barque de Pierre pour enseigner ceux qui l’entouraient. Il ne nous est pas dit ce qu’il a prononcé à ce moment-là mais on se doute bien que c’était un enseignement encourageant pour faire grandir la foi de ceux qui L’entouraient et qui L’écoutaient. Puis il demande à Pierre de pousser la barque au loin pour aller chercher du poisson. Pierre lui répond qu’ils ont passé la nuit à tenter de pêcher quelques poissons et que rien n’est venu. Il a donc une certaine manière de se justifier, de dire : à quoi bon, mais « Puisque tu le dis, je vais le faire ». Il y a à la fois chez Pierre un doute et une confiance, un acte de foi, et cet acte de foi va être payant puisque le filet va être rempli de poissons et les pêcheurs, Pierre mais aussi Jacques et Jean seront surpris de ce miracle. Cela entraînera la prosternation de Pierre devant le Christ et peut-être aussi celles de Jacques et Jean mais cela aura pour conséquence qu’à partir de ce moment-là Pierre, Jacques et Jean vont suivre le Christ. Ils ont été saisis par cet évènement miraculeux, par la puissance de cet homme ; ils ont envie de Le suivre parce qu'ils Lui font confiance. Il y a d’abord la séduction par rapport au miracle puis la confiance et en quelque sorte l’abandon à la volonté de Dieu. En effet pour que nous puissions suivre le Christ il faut d’abord être séduit par Lui, avoir goûté sa grâce. En général lorsque Dieu veut nous attirer à Lui, c’est de cette manière qu’Il agit. Les Pères nous disent qu’il y a plusieurs étapes dans la vie spirituelle : la première étape, c’est celle de la séduction ; on est d’abord séduit par Dieu, il y a un état de grâce ; c’est un peu comparable au fiancé qui est séduit par sa fiancée et qui ensuite décideront d’avancer vers le mariage. ; c’est la même réalité qui est présente aussi pour les moines et les moniales qui sont appelés à mener une vie particulière ; il y a d’abord une séduction qui peut se concrétiser de diverses manières : on peut être séduit par la beauté d’un lieu, la beauté des chants, l’enseignement qui est donné dans ce monastère, la qualité du Père spirituel, la qualité des moines, des moniales, etc. Quelque fois même Dieu nous séduit de manière tout à fait inattendue : je connais un Père spirituel très élevé qui, dans sa jeunesse ne croyait pas à la vie monastique ; il disait : ce sont des gens inutiles qui perdent leur temps et qui nous font perdre le nôtre et il se disait cela souvent jusqu’au jour où il s’est dit, tiens (parce qu'il n’était jamais allé dans un monastère), allons voir ces inutiles, par curiosité. Il s’est rendu dans un monastère proche de chez lui et il n’en est jamais reparti. C’est comme cela que Dieu l’avait séduit ; donc il y a toutes sortes de formes de séduction de la part de Dieu, toutes sortes de pêches miraculeuses qui nous attirent mais après il faut suivre, suivre le Christ et cela c’est un peu plus difficile. Les Pères nous disent que la deuxième étape de la vie spirituelle c’est justement la perte de la grâce, non pas la perte de Dieu mais la perte de la grâce, de cette présence sensible et qu’alors nous sommes dans l’épreuve ; nous sommes dans l’épreuve pour savoir qui nous sommes en définitive par rapport à cet appel de Dieu. Croyons-nous vraiment en Lui uniquement parce qu'Il nous a donné quelques bienfaits ou bien allons-nous plus loin ? Est-ce que nous nous abandonnons entre ses mains ? Ce fut le cas des apôtres ; souvenez-vous, ils ont été éprouvés, à Gethsémani d’abord : ils ont peur, ils se sauvent. Pierre va trahir le Christ et les autres ne font pas beaucoup mieux et puis, dans cette épreuve, ils vont progressivement grandir ; ils vont réfléchir probablement et puis prier surtout, supplier, demander que cette grâce revienne, demander que le Christ qui a promis de ressusciter ressuscite. Ils seront inquiets jusqu’au bout. Le Christ ressuscitera et ils auront encore des doutes ; il y aura quelque flottement dans la foi des apôtres. Et puis la grâce reviendra et là ils croiront parce qu'ils auront vu le Christ ; autrement dit, après leurs larmes, leurs épreuves, leurs prières, leurs supplications, le Christ s’est montré à eux de nouveau. Rappelez-vous, sur la plage, Il vient et leur demande de manger avec Lui pour bien leur prouver que c’est Lui qu’ils ont connu et ils repartiront heureux, continuant de prier, de célébrer les Offices. Pour nous cela veut dire – qui que nous soyons – que nous sommes appelés à vivre la même expérience. Dans nos vies, il y a la séduction de Dieu, oui, sinon nous ne serions pas là et puis ensuite il y a comme un affadissement, quelque chose comme une acédie, comme un manque d’envie de prier, d’être en communion avec Dieu : oui, on veut bien mais un peu plus tard, on a toujours des raisons pour repousser la prière, de venir à l’église : oui mais il fait froid, on verra demain ou la semaine prochaine ; nous avons toujours de bonnes raisons parce que ce n’est pas évident, tout simplement. Dieu n’est pas évident. S’Il était évident on le saurait depuis longtemps. Il n’est pas évident mais, justement, Il nous propose la foi pour compenser l’évidence qui n’existe pas. C’est dans la foi que nous pouvons avancer ; c’est dans la foi que les apôtres ont avancé, bien sûr aidés de la grâce. Or cette foi nous l’avons reçue au baptême mais ce n’est pas quelque chose que l’on reçoit une fois pour toutes, un trésor sur lequel on s’assoit et on attend. Non, il faut ouvrir le coffre du trésor et puiser dedans sans cesse ; puiser dedans cela veut dire prier, supplier, demander à Dieu son secours et puis arrive le moment où Dieu revient vers nous ; Il ne nous a jamais quittés mais Il revient vers nous d’une manière sensible pour nous aider, oh peut-être de manière très fugace ou subtile et cela nous redonne courage et Il repart ; peut-être aurons-nous de nouveau des épreuves, des périodes de désert comme les Pères nous disent puis Dieu reviendra. C’est d’ailleurs tout ce qui s’est passé dans l’Ancien Testament avec le peuple de Dieu. Dieu se manifestait, le peuple de Dieu croyait en Lui, le priait, L’adorait puis il tombait dans le péché, se retrouvait dans l’épreuve, était attaqué par les ennemis et Dieu les laissait ; puis, d’un seul coup, Dieu revenait pour leur faire comprendre qu’ils s’étaient égarés, qu’ils n’avaient pas tenu dans l’épreuve et Il leur redonnait confiance, c’est ce qu’on appelle la miséricorde de Dieu.
Alors voyez-vous nous devons, pour notre vie, pour nos vies, nous devons essayer de comprendre cette manière dont Dieu agit pour ne pas désespérer, pour ne pas être découragé, pour se dire : oui, bon, c’est un peu plus difficile pour le moment mais Dieu va revenir puisqu’Il est déjà venu et que j’ai cru en Lui, donc je vais tenir dans le temps, je vais le supplier, pleurer, prier, communier à son Corps et à son Sang même si je suis un peu fade dans mon cœur ; et alors c’est Lui qui nous redonnera force, courage, dynamisme pour poursuivre la route. Et puis, n’oublions pas une chose : nous pouvons, nous devons prier le Seigneur pour qu’Il vienne à notre aide mais nous avons aussi à notre disposition les Saints et particulièrement la Mère de Dieu. Nous célébrons aujourd'hui la Sainte Protection suite à un miracle qu’elle a accompli, alors il nous faut la prier, elle aussi. Elle sait ce que c’est que l’épreuve, elle a connu comme nous l’épreuve mais elle a toujours cru. Au miracle de Cana on voit bien ce qui se passe : la Mère de Dieu croit que Jésus son fils peut faire un miracle et elle va le trouver pour Lui demander qu’il agisse parce qu'il n’y a plus de vin à la noce. Et là, contrairement à ce qu’on aurait pu attendre, Il va se retirer en disant : non ce n’est pas le moment, occupe-toi de tes affaires. Mais, probablement à la différence de nous qui aurions certainement dit : oh, écoute, tu exagères quand même, fais quelque chose, je suis ta mère ; on aurait discuté, on aurait essayé d’obtenir le miracle ; non, elle ne dit rien, elle s’en va puisqu’il lui a dit, retire-toi ; elle s’en va mais elle va dire, parce qu'elle croit, elle va dire aux serviteurs : faites tout ce qu’Il vous dira et le miracle s’accomplit. Elle est un modèle pour nous justement de cette foi, de cet abandon et nous pouvons la supplier puisqu’elle nous protège, nous pouvons lui demander secours puisqu’elle est là tout le temps à notre disposition comme les autres saints d’ailleurs ; il ne faut pas nous en priver parce que nous avons besoin de secours dans la vie et les saints et particulièrement la Mère de Dieu ont été mis à notre disposition par Dieu comme intercesseurs, comme intermédiaires que nous allons utiliser humblement en leur demandant de parler de nous à Dieu parce que nous, nous sentons pécheurs et n’osons pas nous approcher de Dieu. Oui, ayons confiance en Dieu, ayons confiance dans la Mère de Dieu et dans les saints pour que notre foi ne vacille pas trop, qu’elle redémarre chaque fois que cela est nécessaire et qu’ainsi nous poursuivions notre chemin face aux épreuves, face aux difficultés, face aux doutes et que nous arrivions ainsi aux portes de l’Eternité.
. Amen


Foi et humilité

23/9/2018 Mt XV, 21-28

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans ce récit où le Seigneur Jésus guérit l’enfant de cette cananéenne plusieurs leçons nous sont proposées, plusieurs méditations qui peuvent nous aider pour notre vie chrétienne. La première chose qui nous apparait c’est que le Seigneur ne répond pas immédiatement à cette femme et même on peut presque dire qu’Il la repousse en lui disant que ce n’est pas pour elle qu’Il est venu. Cela peut paraître surprenant car le Seigneur Jésus est venu pour le salut du monde mais en fait le Seigneur est en train d’éprouver la cananéenne ; ce n’est pas qu’Il l’aime moins que les autres, ce n’est pas qu’il a moins de compassion face à sa souffrance par rapport à sa fille qui est malade mais c’est parce qu'Il veut l’éprouver pour qu’elle manifeste son désir profond dans la foi, qu’elle soit en quelque sorte tenace dans son désir. Et effectivement c’est ce qui va se passer. Le Seigneur Jésus, sous une forme orientale, lui explique que l’on ne donne pas le pain à n’importe qui mais elle répond que les petits chiens ramassent les miettes qui tombent de la table. Autrement dit en lui répondant elle ne lui demande pas d’avoir le bénéfice du pain tel qu’il est réservé apparemment à certains mais simplement les miettes. Elle marque donc à la fois son humilité : elle ne demande pas grand-chose et en même temps sa foi car elle résiste à l’épreuve. C’est une belle leçon pour chacun d’entre nous qui sommes souvent confrontés à des souffrances bien sûr, des souffrances plus ou moins graves mais qui nous entrainent à demander le secours du Christ et nous avons raison. C’est Lui qui nous l’a proposé. Il a dit à plusieurs reprises : « Venez à Moi vous tous qui peinez, je vous soulagerez ; frappez à ma porte, je vous ouvrirai ». Et Il a montré dans tout l’Evangile combien Il était compatissant, combien Il guérissait tous ceux qui souffraient d’une manière ou d’une autre. Alors pour nous c’est la même chose ; nous sommes amenés à souffrir physiquement, psychiquement moralement, spirituellement de toutes sortes de maux et nous avons raison de nous tourner vers le Christ pour lui dire : « Fais quelque chose ». Mais il faut que nous le fassions à la manière de la cananéenne, c'est-à-dire d’abord avec humilité, en acceptant de ne pas recevoir la plénitude de ce que nous pourrions attendre : pas le pain complet mais simplement quelques miettes. Et puis il nous faut avoir la foi et savoir dépasser le temps d’épreuve que peut-être le Seigneur nous propose pour tester notre foi car il sait bien que nous avons tendance à demander très facilement. Dès que nous sommes en difficulté nous demandons mais demandons-nous avec la foi ou demandons-nous un peu automatiquement parce qu'on a l’habitude de demander secours à Dieu ? Ce que le Seigneur veut c’est la foi, une foi profonde qui vient de notre cœur, notre cœur qui croit que le Seigneur peut tout, même ce qui parait impossible. Alors oui si nous avons cette foi vive dans le cœur, si nous savons dépasser le temps d’épreuve que le Seigneur propose – cela est souvent un mystère d’ailleurs – si nous savons tenir, tenir l’épreuve, même si elle est longue, même si elle nous parait lourde ; si nous savons tenir, alors le résultat sera bon : le Seigneur nous offrira ce que nous avons demandé, Il nous guérira d’une manière ou d’une autre, nous apportera sa compassion et son amour. Il faut que tout cela nous le vivions dans l’humilité, dans la simplicité comme cette femme qui n’est pas de tradition juive mais elle pose humblement et avec foi et elle passe l’épreuve. Les apôtres ont dû certainement été surpris parce qu'ils étaient un peu agacés par les cris de cette femme qui demandait à être soulagée. C’était une belle leçon pour les apôtres parce que eux qui voulaient à la fois préserver le Seigneur voulaient aussi probablement préserver leurs oreilles, leur intérêt, ils ne s’occupaient pas vraiment de la souffrance de cette femme. Mais le Christ Lui s’en est occupé. Il a ouvert son cœur ; même s’il a éprouvé la cananéenne il lui a offert la guérison de son enfant et ainsi elle est repartie toute heureuse, joyeuse et sans aucun doute sa foi a grandi car la foi, nous le savons bien, n’est pas un élément que l’on reçoit par la grâce de Dieu une fois pour toute au moment du baptême ; la foi c’est quelque chose qui se renouvelle sans cesse, qui grandit sans cesse ; tous les jours nous devons faire acte de foi ; tous les jours nous devons accepter que le Seigneur ne réponde pas exactement comme nous le souhaitons, au moment même où nous le souhaitons mais il répond toujours de la meilleure manière, c’est cela qui est important car il a fait grandir cette femme dans la foi, elle a dépassé l’épreuve et Il l’a soulagée dans sa compassion.
Que le Seigneur nous donne de comprendre tout cela non pas intellectuellement mais avec notre cœur, dans notre expérience de tous les jours, que nous sachions L’appeler au secours mais que nous sachions aussi le faire avec humilité, avec grande foi permettant ainsi de dépasser l’épreuve qui nous attend peut-être, pour recevoir l’amour de Dieu.
Amen


Talents

16/9/2018 Mt XXV, 14-30

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans cette parabole que le Seigneur nous propose il veut nous enseigner sur les différents dons que nous avons reçus de sa part ; ces dons nous les avons reçus au moment où nous avons été baptisés, où nous sommes entrés dans l’Eglise, ce sont les dons du Saint Esprit. Ces dons sont multiples, variés et chacun de nous en a reçu une part. A l’un est donnée la compassion, à une autre la joie de vivre, à un autre la charité, à une autre d’aider son prochain chaque fois que l’occasion se présente, à un autre la prière, etc. L’important c’est l’enseignement de cette parabole, c'est-à-dire que nous avons tous reçu quelque chose, un don de Dieu (On parle de talents, dans la parabole, parce que le talent était une pièce de monnaie de l’époque et ce mot talent est devenu synonyme de don dans le langage courant). Alors il est bon, sans orgueil, de connaître les talents, les dons que nous avons reçus du Seigneur pour pouvoir les faire grandir en nous, les offrir à ceux qui nous entourent car c’est bien la leçon de cette parabole : il ne s’agit pas de cacher son talent, pour une raison ou pour une autre, soit par oubli, soit par fausse modestie. Il s’agit d’offrir le talent et de le faire grandir si l’occasion se présente. Il est donc légitime que chacun d’entre nous, de manière régulière, pas tous les jours bien sûr mais de temps en temps, se demande ce que Dieu lui a donné. Parce qu'on réclame beaucoup à Dieu : on réclame beaucoup de choses, tout le temps, mais on oublie qu’il nous a déjà donné quelque chose et avant de Lui réclamer d’autres choses, regardons déjà ce qu’Il nous a donné pour en vivre et pour que les autres en vivent aussi. Un jour quelqu'un m’a dit : « ô oui, oui, les autres ont du talent, moi je n’en ai pas ». Et bien voyez-vous il était dans l’erreur car Dieu donne du talent à tout le monde. Alors peut-être on peut se dire : « Mais moi je n’ai pas de talent : je ne sais pas peindre, je ne sais pas bien aimer, je ne sais pas prier, je ne sais pas jeûner, je n’ai pas de joie de vivre, etc. etc. ». Peut-être, mais Dieu nous a donné au moins un talent. Rappelez-vous dans la parabole : le dernier reçoit un talent et ce talent c’est l’amour. Dieu nous donne son amour, Il nous donne de participer à son amour et c’est peut-être le talent le plus important. Nous n’aurions que celui-là que nous aurions le plus conséquent dans notre vie : aimer, chercher à aimer parce que cet amour nous l’avons reçu puisque Dieu est amour et que Dieu s’est offert à nous, Il s’est donné à nous et il continue de se donner à nous, soit dans les sacrements, soit dans l’Eucharistie principalement mais aussi dans les autres sacrements et puis au travers de nos frères, de nos sœurs, Il nous donne ce talent qui s’appelle l’amour. Alors que faisons-nous de ce talent et que faisons-nous des autres talents ? C’est la question que nous devons nous poser régulièrement. Aimer n’est pas toujours facile, aimer est même quelque fois difficile mais nous avons toujours la possibilité d’aimer puisque le Seigneur nous a dit : « Aimez jusqu’à vos ennemis ». S’Il le dit c’est que c’est possible avec sa grâce et l’amour c’est la grâce de Dieu. Cela veut dire qu’aucun d’entre nous n’est sans talent et que nous avons la responsabilité de faire grandir ce talent en nous. A nous de trouver comment, de saisir les occasions et de développer notre ou nos talents. Je me souviens de quelqu'un qui était un grand cuisinier et qui disait toujours : « Lorsqu'on fait la cuisine et que l’on prépare les plats , c’est un acte d’amour ». Et je pense qu’il n’avait pas tort. Il y a trente-six manières de faire la cuisine : on fait la cuisine parce qu'il faut manger, on fait en vitesse un petit truc et puis voilà. Il y a aussi l’amour que l’on va porter dans ses actes de préparation pour honorer celui, celle ou ceux qui viennent manger avec nous, même dans une cuisine banale ; la plus grande recette sera celle justement où il y aura de l’amour ne fut-ce que pour un oeuf sur le plat. S’il y a de l’amour alors oui le talent prend toute sa valeur. Cela veut dire que les talents ne sont pas forcément des grandes choses. Il y a des personnes qui ont reçu des grands talents : les artistes, les musiciens, ceux qui ont le don de pouvoir chanter juste alors que d’autres chantent faux, les architectes, ceux qui ont de grandes responsabilités et qui ont reçu un don pour les mener : s’ils ont des grandes responsabilités par souci d’orgueil, ce n’est pas un don mais s’ils ont reçu le don de gérer une communauté, un peuple, un diocèse, une paroisse alors il faut faire grandir ce don tout au long de la vie. Puis il y a le don d’être père ou mère de famille, être époux ou épouse, enfant ; tout cela ce sont des dons que l’on reçoit. On peut être un bon enfant, une bonne épouse, un bon époux, un bon responsable de paroisse et que ceux qui entourent ces gens disent : « Ah oui comme ils sont bons, comme ils sont généreux, comme ils sont compatissants, comme ils sont souriants, comme ils viennent à notre aide quand on en a besoin ». Un don se mesure au résultat du fruit qu’il porte : si un artiste produit une œuvre et que personne ne la regarde, on peut penser que le don est médiocre mais ce don d’amour que nous avons reçu qu’en faisons-nous ? Est-ce qu’au moment où il est si difficile d’aimer nous oublions que nous avons cette responsabilité du don reçu de l’amour ? Est-ce qu’au moment où il est si difficile d’aimer nous demandons au Seigneur de faire grandir cet amour en nous par sa grâce, par son Esprit-Saint, que vraiment nous puissions aimer ce qui nous paraît impossible aux yeux du monde ? Nous avons des récits de toutes les époques de personnes qui ont été maltraitées, torturées et qui ont réussi à aimer leurs bourreaux, le Christ bien sûr mais aussi d’autres. Je lisais tout récemment l’histoire d’un moine syriaque – c’est une histoire récente, de quelques mois – qui a été arrêté par des gens qui lui voulaient du mal parce qu'il était chrétien, qui l’ont arrêté, qui l’ont injurié, qui l’ont battu, maltraité, mal nourri et dans le récit qu’il nous rapporte, avec grande humilité d’ailleurs, il est heureux, on le sent dans ce récit qu’il ait pu avoir un dialogue avec l’un de ses bourreaux, un dialogue heureux, surprenant. Je pense, je suis même certain, que ce bourreau qui a réussi à sourire et à répondre avec un certain amour à son prisonnier, a eu le bénéfice du talent de cet homme-là. Alors bien sûr c’est un cas exceptionnel mais cela veut dire derrière que tout est possible, que tout talent reçu peut avoir une résonnance, des bénéfices pour les autres. Le talent n’est pas donné pour nous, il est donné pour les autres et c’est cela qui doit entraîner une réflexion en nous, en notre cœur, à l’intérieur de nous-mêmes. Qu'est-ce que je fais de mes talents ? Il ne faut pas avoir peur de les voir mais il ne faut pas en tirer orgueil bien sûr mais humblement ; demander au Seigneur comment je peux les faire grandir, ces talents, comment je peux les offrir. C’est valable pour une communauté monastique, c’est valable pour une famille, c’est valable pour un diocèse, pour une paroisse, c’est valable pour l’humanité entière. Alors demandons au Seigneur d’être clairvoyants sur les talents qu’Il nous a donnés et surtout demandons-Lui de les faire fructifier, de les faire grandir. Si tous les hommes de la terre qui ont tous reçu un talent, si tous les hommes de la terre faisaient grandir leurs talents, je pense que nous ne serions pas là où nous en sommes. La vie serait tout à fait autre. Il y a de très nombreuses années j’ai vécu au Maroc dans le désert. J’ai été accueilli dans une famille très pauvre comme tous ces gens qui vivent dans ces lieux et j’ai vraiment été étonné, frappé, surpris, enthousiasmé par la qualité d’amour de ces gens chez qui je logeais exprimait : c’était une jeune famille : un homme, une femme et des petits enfants. Ils n’avaient rien vous savez : un toit, des murs ; on mangeait par terre sur des tapis mais cela c’est la tradition locale et quand on mangeait, le peu de chose qu’il y avait de meilleur c’était pour moi. Le maître de maison me le donnait. Le premier soir quand il a été question que je me repose pour la nuit on m’a donné le lieu le plus beau : le salon du maître selon la tradition, là où il y avait quelques banquettes tout autour avec des coussins ; ils avaient tout nettoyé, c’était impeccable et on m’a dit : c’est pour toi ; eux ils ont dormi dans un coin entassés. C’était une famille pauvre : on buvait de l’eau fraiche dans une boite de conserve, on mangeait avec la main ; face l’amour qui m’a été porté à ce moment-là, je me suis dit qu’ils avaient reçu le plus grand talent qui puisse exister sur terre : l’amour de l’autre. J’ai été accueilli, j’ai été bien accueilli, j’ai été aimé ; ils savaient que j’étais chrétien. Le soir ils me disaient : retire-toi pour dire tes prières, ils savaient que je priais en chrétien et eux priaient comme musulman et ils priaient vraiment. Vous savez ce sont des moments que l’on ne peut pas oublier. On se dit que vraiment Dieu donne des talents à tout le monde, pas qu’aux chrétiens mais à tout le monde et Il se reflète dans ces talents parce que ces gens qui m’ont accueilli ont été pour moi la présence de Dieu, la présence du Christ. Je pourrais ajouter d’autres exemples et vous pourriez en ajouter aussi. Donc l’important de toute cette histoire c’est vraiment de se dire : « Oui, j’ai reçu un ou des talents et il faut que je le sache, il faut que je les utilise, il faut que je les fasse grandir, il faut que je les offre, il faut que je les donne et que je les donne, pas de ma part, de la part de Dieu »

Amen


La Croix

14/9/2018 Jn XIX, 6-11, 13-20, 25-28, 30-35

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
En fêtant aujourd'hui l’Exaltation de la Croix du Christ nous nous souvenons, particulièrement au travers de l’Evangile que nous venons d’entendre, de cet évènement qui a marqué toute la vie du monde : la mort du Christ. C’est une fête à laquelle nous sommes tous très attachés parce que c’est la fête de notre salut ; c’est une fête qui est en résonnance avec la fête de Pâques mais cette exaltation c’est comme une action de grâce et en même temps une supplication que nous faisons au Seigneur qui s’est laissé cloué sur la croix et qui, par cet acte, a permis à l’humanité entière d’être sauvée puisque trois jours après Il ressuscitait pour nous montrer que la mort était vaincue. Oui, c’est un évènement important que nous commémorons ; c’est l’évènement qui doit marquer notre vie, je dirais, à tous les instants. ; la croix du Christ ce n’est pas simplement la croix que nous portons autour de notre cou, sur notre poitrine ou que nous avons accrochée dans notre maison, dans notre cellule, c’est beaucoup plus que cela. C’est le signe que Dieu nous aime au-delà de ce qui est pensable. En effet, notre intellect ne peut pas saisir cet acte d’humilité que Dieu a posé, c’est incompréhensible. Dieu qui d’abord se fait homme, premier acte d’humilité, et qui plus est se laisse mettre à mort sur une croix pour nous, pour chacun d’entre nous. Alors nous devons être reconnaissants à Dieu, être reconnaissants au Seigneur Jésus d’avoir accepté de subir tout ce qu’il a subi jusqu’à la mort. Nous devons garder ce souvenir dans notre cœur comme la Mère de Dieu le gardait mais pas comme un souvenir simplement historique, avec quelque chose de plus, quelque chose qui nous marque comme un fer rouge sur la peau. Nos frères, les Coptes, se font tatouer une croix sur le poignet en signe du souvenir de la crucifixion du Christ ; ils ne veulent pas que soit effacé de leur corps ce signe. Alors nous, nous avons souvent l’occasion de nous souvenir de la croix du Christ mais en sommes-nous conscients ? Est-ce que lorsque nous avons une épreuve à vivre, quelle qu’elle soit, une petite épreuve du quotidien ou bien une épreuve plus lourde qui nous accable, est-ce qu’à ce moment-là nous nous replions sur nous-mêmes ou bien allons-nous vers le Christ et sa crucifixion ? Est-ce qu’il nous vient à l’esprit de nous associer au salut du monde par l’acceptation de cette épreuve ? Et puis nous vient-il à l’esprit de demander au Christ qui lui est passé par l’épreuve de lui demander sa grâce pour que, nous aussi, nous puissions dépasser l’épreuve ? Être chrétien c’est appartenir totalement au Christ, bien sûr au Christ ressuscité qui est à la droite du Père mais aussi au Christ qui est passé par toutes les vicissitudes de la vie sur cette terre depuis sa naissance jusqu’à sa mise au tombeau. Alors il faut nous questionner, nous interroger : suis-je capable de suivre le Christ jusqu’au bout ? La réponse n’est pas facile à donner parce que nous sommes des êtres humains avec nos faiblesses et nos limites et il y a des moments où nous avons tendance à écarter la croix parce que c’est trop lourd. Mais au lieu de l’écarter nous devrions aller vers le Christ et lui demander secours. Lui-même a demandé secours au Père dans sa longue prière d’agonie à Gethsémani et Il a remis son esprit entre les mains du Père s’abandonnant totalement à la volonté divine qui avait pour but notre salut, le salut du monde entier. Alors nous qui sommes chrétiens, qui avons cette responsabilité de notre christianisme aux yeux des hommes, il nous faut essayer, essayer d’accepter la croix quand elle s’avance vers nous ; nous souvenir que ce n’est pas uniquement la croix qui s’avance mais aussi le Roi de gloire qui vient pour nous offrir tout son amour. Sans Lui rien n’est possible, nous ne pouvons pas passer l’épreuve de la croix mais avec Lui qui est tout amour, qui s’est donné pour nous, avec Lui tout devient possible, avec Lui c’est l’espérance qui fleurit.
Amen


Epreuve

9/9/2018 Jn III, 13-17 Lc VIII, 16-21

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Aujourd'hui nous sommes entre plusieurs fêtes : nous avons fêté hier la Sainte Nativité de la Mère de Dieu ; aujourd'hui nous fêtons les Ancêtres du Christ, Joachim et Anne et déjà se profile la fête de la croix et l’Evangile en fait mention. Entre ces trois fêtes, il y a des liens, bien évidemment, des liens spirituels. Le lien premier c’est la croix car, en effet, la Mère de Dieu dont nous célébrons la fête de la Nativité va accueillir dans tout son être ce que son fils vivra à la fin de sa vie terrestre, la crucifixion. Elle souffrira à ce moment-là profondément, elle sera dans l’épreuve. Joachim et Anne ont été aussi dans l’épreuve et ont souffert car déjà âgés ils ne parvenaient pas à avoir d’enfants : quoi de plus douloureux pour un couple, pour une femme, pour un homme de ne pas donner naissance à un enfant. Cette forme de croix ils l’acceptaient, ils l’offraient à Dieu et le miracle s’est produit : ils ont pu donner naissance à la Mère de Dieu. Le Christ Lui-même vient sur terre – comme il est précisé à la fin de l’Evangile – non pas pour condamner le monde mais pour le sauver et c’est là la clé de toutes ces fêtes en définitive. Marie, Mère de Jésus, Mère de Dieu, Joachim et Anne, sont en quelque sorte de notre famille : ce sont des hommes et des femmes de la terre. Ils vont avoir le bénéfice, tout en passant par la croix, de ce que le Seigneur Jésus vivra sur la croix, ce bénéfice que nous recevons nous aussi. Mais il faut bien comprendre que nous ne pouvons accéder au bénéfice de la croix, c'est-à-dire la Résurrection, le salut, sans passer par les épreuves qu’ont connues Joachim, Anne, Marie et le Christ. L’épreuve, nous disent les Pères, est une chose nécessaire ; ce n’est pas Dieu qui provoque l’épreuve ; l’épreuve elle vient de nos faiblesses, de nos difficultés, du démon aussi qui nous attaque mais Dieu se sert de l’épreuve et nous appelle à accueillir l’épreuve pour la dépasser, pas en s’y enfonçant du fait de la souffrance qui est inévitable mais en dépassant l’épreuve, en allant au-delà pour que nous puissions bénéficier de la joie du salut. Et c’est pour cette raison que, sur cette terre, les uns les autres, vous, moi, nous avons des moments d’épreuve, des moments toujours difficiles car nous sommes faits pour la plénitude de l’amour, pour la plénitude de la paix ; c’est notre vocation fondamentale mais il arrive que nous passions par des moments durs, lourds qui, quelque fois, nous broient le cœur mais le Seigneur nous invite à dépasser ce moment … pas seul, pas seule, en criant vers Lui. N’oublions pas que le Christ à Gethsémani à crier vers le Père ; sur la croix, Il a crié vers le Père. C’est l’exemple sublime qui nous est offert. Lorsque nous sommes dans l’épreuve, il nous faut crier vers Dieu. Nous chantons : « Seigneur, je crie vers Toi, exauce-moi, exauce-moi Seigneur ». Alors si nous nous tournons vers Dieu, vers le Christ qui a connu l’épreuve en particulier puis vers les Saints, la Sainte Mère de Dieu, Joachim et Anne et tous les autres Saints qui ont vécu, eux aussi des épreuves ; si nous nous tournons vers tous ceux-là nous ne serons pas seuls, nous ne serons pas une île abandonnée, nous ne serons pas sans secours dans la tourmente. Rappelez-vous les apôtres, sur leur barque, lors de la tempête. Ils sont dans l’épreuve, ils ont peur, à juste titre - nous aurions eu peur de la même manière - et le Christ est là avec eux qui se repose, apparemment il dort mais en fait Il veut qu’ils comprennent quelque chose : c’est Lui qui va arrêter la tempête, pas eux, et d’ailleurs ils ont crié vers le Christ : « Sauve-nous. Qu'est-ce que tu fais ? Tu dors ? ». Nous pouvons dire cela à Dieu mais respectueusement. Dieu ne dort pas Il veille sur nous en permanence mais nous pouvons crier vers Lui : «  Je souffre, je suis dans l’épreuve, je suis dans le fond du gouffre. Tends-moi la main, Tire-moi comme tu as tiré Adam et Eve du tombeau ». Voilà une des leçons que nous pouvons tirer de ces fêtes : nous devons forcément passer par des épreuves mais que si nous voulons les assumer seuls nous allons à l’échec, nous allons vers l’angoisse, le désespoir alors que si nous nous tournons vers le Seigneur, humblement en disant : « Je ne peux rien. Je ne sais plus où j’en suis mais viens à mon secours. Ne m’abandonne pas ». Alors le Seigneur, oui, tendra sa main miséricordieuse. Il posera sa main fraîche sur les plaies causées par nos fautes et nos épreuves. Il nous mettra debout, debout dans sa Lumière, prémices de ce qui nous attend dans l’Eternité.
Amen


La Mère de Dieu

8/9/2018 Mt X, 37-XI, 1 Lc X, 38-42, XI, 27-28
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous fêtons aujourd'hui la Nativité de la Très Sainte Mère de Dieu, la Très Sainte Mère de Dieu que nos Pères sont comparées quelque fois au buisson ardent que Moïse vit dans le désert qui brulait et ne se consumait pas. Ils virent là une image, bien sûr, de la Mère de Dieu qui, tout en donnant naissance au Seigneur Jésus est restée vierge, intacte. Ils voient aussi qu’au milieu de ce buisson ardent Moïse entend : « Je suis Celui qui suis » ; c'est-à-dire qu’au milieu de ce buisson ardent le Christ se révèle. Si nous poursuivons la comparaison nous pouvons nous demander ce qu'est un buisson, même ardent ? Un amas de broussailles, pas grand-chose apparemment. Le Christ Jésus a voulu naître de la Mère de Dieu parce qu'elle était humble, humble comme un buisson dans un désert mais un buisson ardent, c'est-à-dire un buisson qui s’enflamme devant nous par sa pureté, sa beauté, sa tension vers Dieu. Oui, un buisson ce n’est pas grand-chose dans la nature, mais le Christ se révèle à Moïse au sein du buisson. Le Christ se révèle à nous dans le sein de la Mère de Dieu ; c’est là qu’Il choisit de s’incarner dans celle qui est à peine citée dans l’Evangile, celle dont nous connaissons très peu de chose mais l’essentiel : elle gardait, dans le silence, toutes les choses de Dieu dans son cœur. Alors nous avons là, pour chacun et chacune d’entre nous un modèle, un modèle extraordinaire, un modèle probablement irréalisable mais quand même qui nous invite à imiter le modèle de l’humilité et du silence. Vous comme moi savons qu’il est difficile d’être humble, notre nature corrompue a tendance à faire l’inverse mais la Mère de Dieu nous invite à tout retourner, à considérer que, comme elle, sur cette terre, nous sommes comme un buisson pas aussi ardent qu’elle mais que nous pouvons tenter d’être humbles et silencieux comme elle, d’accueillir la volonté de Dieu comme elle, d’accueillir ce que le Christ lui dit comme elle.
Cette fête de la Nativité de la Mère de Dieu peut nous sembler apparemment presqu’inconsistante : nous n’avons pas de texte qui révèle véritablement, de manière catégorique cet évènement ; cet évènement a plutôt été relaté dans les Evangiles apocryphes mais peu importe, nous savons, nous savons que la Mère de Dieu, dès sa naissance, cherche à être humble et c’est pour cela que nous avons si peu de textes qui racontent l’évènement. Alors, pour nous tous, qu’elle soit, oui, un modèle, qu’elle nous attire, qu’elle nous aimante vers le Christ comme elle-même l’a fait ; que nous nous offrions au Christ comme elle l’a fait ; que nous permettions au Christ de naître en nous, de vivre en nous par l’Esprit-Saint. Quels magnifiques repères nous avons pour notre vie quotidienne souvent tourmentée, bousculée ! Magnifique repère d’humilité, de silence là où le Christ a voulu naître pour nous sauver. Amen

Jean le B. Obéissance et humilité

29/8/2018 Décollation de Saint Jean-Baptiste Mc VI, 14-30


Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous fêtons aujourd'hui Saint Jean le Baptiste, une des plus grande figure que nous puissions connaitre qui est à la charnière de l’Ancien Testament et du nouveau. La Tradition veut que Saint Jean le Baptiste soit un modèle pour tous les moines – c’est aussi un modèle pour tous les chrétiens – un modèle pour tous les moines parce que ce qui le caractérise c’est à la fois son retrait du monde puisqu’il vivait dans le désert, mangeant peu, s’habillant sobrement et vivant dans la prière. Il est aussi modèle parce qu'au travers du rôle qu’il avait à jouer comme annonciateur de la venue du Christ-Jésus son cousin, il le fait avec une très grande humilité. Il dit : « Je ne suis pas digne de délier ses sandales ».
Il annonce le Christ ; le Christ veut être baptisé par lui et Jean refuse, toujours par humilité car il sait que le Christ est plus grand que lui, qu’il est le Fils de Dieu mais il obéit à l’injonction du Christ. C’est là aussi où il est une image forte du monachisme : l’humilité d’une part et obéissance d’autre part : il ne discute pas, il ne demande rien, il n’exige rien ; il vit là où il est, dans les circonstances qui lui sont proposées par la vie et il sera ensuite emprisonné puis tué comme on vient de l’entendre. Autrement dit, c’est quelqu'un qui donne sa vie jusqu’au bout. Or lorsqu'on rentre dans le monachisme ce n’est pas pour s’épanouir, c’est pour donner sa vie dans l’humilité la plus grande possible et dans l’obéissance, dans la simplicité de vie en accueillant les évènements, les paroles, ceux qui nous entourent comme le faisait Jean le Baptiste. Oui, il est un repère pour chacun d’entre nous qui que nous soyons, il est un modèle et nous devons le prier ardemment pour qu’il nous aide à accomplir ce que Dieu attend de nous, non pas ce que nous nous voulons réaliser mais ce que Dieu attend de nous. Il savait ce que Dieu attendait de lui : il n’a jamais cherché à se réaliser, il a pris les moyens basiques, traditionnels même, de ceux qui se retiraient dans le désert pour y prier le Seigneur et vivre une vie d’ascèse, une vie qui accueillait toutes les vicissitudes du quotidien, les difficultés qui, sans aucun doute, furent nombreuses puis, le moment venu, il obéit à Dieu et il prêche un baptême de repentance pour que ceux qui attendaient le Seigneur soient préparés. Puis il s’efface, il disparaît. C’est pour cela que c’est la plus grande image du monachisme. Lorsque l’on rentre dans un monastère appelé par Dieu il nous faut essayer, comme Jean Baptiste de vivre dans l’humilité, dans l’obéissance, dans l’abandon à la volonté de Dieu au travers de tout ce qui nous entoure, les évènements, les personnes : accepter. C’est difficile d’accepter et puisque Jean a réussi, avec l’aide de la grâce de Dieu, cela veut dire que cela est possible à tous les hommes et toutes les femmes de la terre.
Que Jean le Baptiste intercède pour chacun et chacune d’entre nous pour que nous soyons en accord avec la volonté de Dieu pour nous.
Amen


Le Christ, pierre d'angle rejetée.

26/8/2018 Mt XXI, 33-42

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Cette parabole que le Seigneur adresse à ses apôtres résume tout ce qui s’est passé et tout ce qui va se passer dans la vie des hommes par rapport au mystère du salut. En effet, dès le début le Seigneur a voulu sauver les hommes et il a pensé qu’après la chute d’Adam et d’Eve Il enverrait son Fils pour sauver l’humanité. Et cette parabole est un résumé pour faire comprendre aux apôtres ce qui s’est passé, c'est-à-dire qu’avant Lui, avant sa naissance, avant le Christ, il y a eu beaucoup d’évènements qui sont relatés dans l’Ancien Testament et qui montrent que le Seigneur envoie aux hommes de la terre des personnes pour éveiller leur cœur à ce salut possible. Ce sont entre autres tous les prophètes et l’on sait que tous les prophètes, y compris le dernier, Saint Jean le baptiste, moururent de manière cruelle. Et puis le Seigneur Jésus est apparu, c’est le Fils de la parabole et là les vignerons le tuent. C’est aussi l’image de ce qui arrive au Christ qui sera crucifié sur la croix. Et le Seigneur après avoir fait comprendre à ses apôtres quelque chose d’important au travers de cette parabole donne une conclusion encore plus importante car Il nous dit : « La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle », c'est-à-dire la pierre indispensable à l’édifice : sans cette pierre tout s’écroule. Et cette pierre qui avait été rejetée, mise de côté, méprisée, c’est Lui, c’est Lui dont Il parle mais Il veut consoler les apôtres, leur donner une espérance car certes Il va être méprisé, rejeté, critiqué, mis de côté puis maltraité et en définitive crucifié. C’est Lui la pierre rejetée des bâtisseurs mais nous savons très bien qu’après la crucifixion, il y a la Résurrection et qu’alors la pierre rejetée devient pierre d’angle : le Christ devient Celui qui sauve l’humanité entière. C’est donc une parabole qui pourrait paraître triste mais qui en fait est pleine d’espérance, cette espérance qui se nourrit à la fois de l’amour de Dieu et de la foi en Dieu. Nous venons d’entendre tout à l’heure dans les chants, les « Béatitudes » qui se terminent par : « Heureux serez-vous si l’on vous méprise, si l’on vous persécute car le Royaume des Cieux est à vous ». Voilà, voilà la même chose, la même réalité que cette parabole : « Heureux êtes-vous si l’on vous méprise, si l’on vous critique, si l’on vous rejette et si l’on vous persécute car le Royaume des Cieux est à vous ». Aujourd'hui il est difficile d’être chrétien dans le monde même mais il était difficile d’être chrétien aussi à certaines périodes qui nous ont précédés mais l’important ce n’est pas que ce soit difficile d’être chrétien, c’est de comprendre que même si l’on nous méprise, même si l’on nous rejette, si l’on nous met de côté, si l’on a un petit sourire narquois vis-à-vis de nous et, à plus forte raison, si l’on nous persécute or aujourd'hui les chrétiens sont persécutés, mis à mort, c’est une réalité que certes nous ne vivons pas tous les jours encore que l’un d’entre nous a été massacré il y a peu de temps du fait qu’il était chrétien et prêtre, à coups de hache. Mais tous ceux qui vivent en Syrie et dans toutes ces régions sont persécutés parce qu'ils sont chrétiens. Alors il faut bien comprendre que sans aucun doute il faut prier pour ceux qui sont persécutés – comme nous le faisons, il faut le faire absolument, il faut avoir de la compassion, ressentir en nous cette souffrance qu’ils vivent et puis l’offrir à Dieu. Alors nous qui n’avons pas, pour le moment, l’occasion d’être persécutés à ce point, nous devons faire attention à notre quotidien, à ne pas avoir des paroles envers nos propres frères, nos propres sœurs - voire ceux qui ne sont pas chrétiens - à ne pas avoir des paroles ou des pensées contre eux, des pensées de mépris, des pensées de rejet qui quelque fois même se terminent d’une manière très cachée en persécution ; il faut que nous soyons vigilants dans notre vie, à nos paroles, à nos regards, à nos pensées afin de ne pas entrer dans cette catégorie que décrit la parabole de ces ouvriers de la vigne qui maltraitent ceux qui viennent pour y travailler et qui tuent le Fils. Cela doit réveiller notre conscience, notre cœur pour éviter tout mépris, tout rejet, toute critique. C’est tellement facile de dire un mot et, en définitive, écraser l’autre mais au contraire il nous faut avoir des mots qui sont des mots qui relèvent de l’amour, de la charité, de l’attention ; des mots qui pardonnent aussi : ce sont des mots d’amour, le pardon. Et puis, si, par malheur on est dans la catégorie de ceux qui subissent l’oppression, qui subissent le martyre, d’une manière ou d’une autre, alors il faut essayer, avec la grâce de Dieu, de savoir, de comprendre que tout cela nous permet d’accéder au Royaume des Cieux. Beaucoup de saints, pas tous, mais beaucoup de saints ont été méprisés : la majorité des apôtres ont été persécutés – cela est décrit dans « Les Actes des apôtres » - et puis leurs successeurs et puis tous ceux qui cherchaient Dieu. Cela continue, vous savez, mais cela n’est pas grave, cela n’est pas grave puisque le Seigneur nous dit « Heureux êtes-vous si on vous persécute à cause de Moi » ; cela n’est pas grave du tout. Alors nous entrons sur le chemin du Royaume des Cieux si nous acceptons, si nous n’entrons pas dans la bagarre (comme on dit) mais si, humblement, nous nous effaçons. C’est là peut-être la leçon que le Christ veut donner à ses apôtres : « N’ayez pas peur. Je deviendrai la pierre d’angle mais peut-être aurez-vous aussi à subir la même chose » – c’est ce qui est dit dans les Béatitudes, qu’Il a prononcées elles aussi. Oui, n’ayons pas peur puisque le Christ est là. C’est Lui qui nous console. C’est Lui qui nous porte. C’est Lui qui nous met debout et c’est Lui qui nous dira à la fin des temps : « Entre dans le Royaume des Cieux »
Amen


Abandon

19/8/2018 Mt XIX, 16-26

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Cette histoire du jeune homme riche est pleine d’un enseignement fort pour chacun d’entre nous. En effet, au travers du questionnement de cet homme face au Christ, il y a un désir profond en lui d’être le meilleur possible et ceci était juste. C’est pour cette raison qu’il demande au Christ de l’enseigner et le Christ lui répond en lui indiquant qu’il suffit de suivre les commandements de Dieu. Le jeune homme, qui certainement était pieux et fidèle, lui répond qu’il a vraiment accompli tout cela depuis son enfance mais il questionne le Christ « Que me manque-t-il encore ? ». Et le Christ lui répond : « Va, vends tous tes biens, donne-les aux pauvres et suis-Moi ». Et là tout se complique, tout se complique parce que ce jeune homme, nous est-il dit, avait de grands biens. Et il s’en alla fort triste car il sentait en lui qu’il lui était difficile, voire impossible pour le moment, de faire ce que le Christ lui proposait et de le suivre. Cela peut être une histoire qui nous attriste, qui nous accable, qui nous fait peur aussi peut-être, mais il faut bien réfléchir à ce que le Christ veut dire. Certes il y a des termes précis : « Il sera difficile aux riches d’entrer dans le Royaume des Cieux » mais derrière le mot riche, nous, nous voyons – ce qui est dit d’ailleurs dans cette histoire et qui était la réalité de ce jeune homme – nous voyons des biens matériels : de l’or, de l’argent, des pierres précieuses, des terrains, des maisons, etc. Et c’est probablement ce qui était la réalité de ce jeune homme mais il y a quelque chose de plus important, de plus profond que le Seigneur tente de nous enseigner : c’est qu’il faut choisir entre avoir et être car le Seigneur, face à ce jeune homme, lui dit : « Si tu veux être parfait … ». Le Seigneur Lui est en face d’un jeune homme qui a, qui possède, qui ne cherche pas à être mais qui cherche à avoir, quitte même à avoir quelque chose de spirituel de plus grand que ce qu’il est ; il est dans un désir de possession de quelque chose pour être plus parfait et le Seigneur essaye de lui faire comprendre qu’il ne s’agit pas de posséder, même sa vie spirituelle, mais d’être spirituel. Et pour être « spirituel » il nous enseigne qu’il faut abandonner beaucoup de choses : non seulement nos richesses matérielles mais aussi tout ce qui relève de notre volonté propre. En principe nous autres moines et moniales, lorsque le Seigneur nous a appelés comme il a tenté d’appeler le jeune homme riche, lorsque nous avons été appelés, nous avons été dans une certaine générosité d’abandon : donner tout au Christ et nous essayons de continuer mais nous savons bien, par expérience, que ce n’est pas si simple car il peut toujours y avoir en nous un petit besoin de possession, quelque chose que l’on veut avoir au lieu de chercher à être avec Dieu, à être « spirituel ». Car Dieu n’a rien, Dieu est. Alors il faut nous interroger, nous les moines mais aussi tous les êtres de la terre et tous les chrétiens en particulier : n’avons-nous pas une manière de vivre qui ressemble un peu à celle de ce jeune homme ? « Oui, oui je veux bien aller à l’église, oui je veux bien prier, oui je veux me confesser, oui je vais communier mais cela non, non je ne veux pas y toucher ». Il y a toujours quelque chose comme cela vous savez chez nous : Ah non cela je ne veux pas, cà c’est à moi ». Même la grâce, il y a des moments où elle se retire et cela nous est douloureux parce que quelque part nous la possédions cette grâce. Nous en avions certes le bénéfice légitime, normal mais quelque part on cherchait à la posséder aussi et puis Dieu la retire pour nous apprendre, tout simplement, nous apprendre que sans Lui rien n’est possible. C’est la leçon du Christ à la fin, lorsque les apôtres Le questionnent : « A l’homme c’est impossible mais avec Dieu, pour Die, tout est possible ». Ce qui signifie que lorsque nous sommes dans la tristesse d’avoir perdu quelque chose, d’avoir été obligé de perdre quelque chose ou bien parce que le Seigneur a retiré quelque chose dont nous avions le bénéfice positif, il ne faut pas être triste mais il faut chercher à s’abandonner. Comme Dieu nous l’a fait comprendre aussi dans l’Ancien Testament au travers du Livre de Job, particulièrement au travers de cette phrase de Job : « Dieu a donné, Dieu a repris, que le Nom de Dieu soit béni ». Ah si nous pouvions arriver à dire cette phrase ; peut-être que nous y arrivons de temps en temps, tant mieux, mais il faut nous y entraîner au travers de la vie, au travers du quotidien. Je me souviens, étant très très jeune d’être allé chez des amis qui avaient de grands biens, qui étaient de bons amis et j’avais vu un objet que je trouvais très beau et je me suis permis de faire un compliment disant : « Ah ceci c’est vraiment beau ». Et à ce moment-là j’ai vu une personne de la famille prendre cet objet et me dire « Prends-le, il est pour toi ». Ce fut un évènement important dans ma vie parce que j’ai compris que ces gens qui étaient dans l’aisance n’étaient pas tellement attachés à ce qu’ils avaient. Ils pouvaient le donner comme cela, spontanément. J’ai connu bien d’autres expériences dans ce genre mais connaître l’expérience de l’extérieur ce n’est rien, c’est déjà pas mal mais ce n’est rien tant qu’on ne l’a pas vécue nous-mêmes. Mais c’est difficile, c’est difficile d’abandonner tout ce que l’on a. Lorsque j’étais jeune moine et jeune étudiant en théologie, j’étudiais donc je mettais en fiche tout ce que j’apprenais et puis un beau jour, je me suis aperçu que ces fiches représentaient pour moi quelque chose que je possédais, je possédais mon savoir dans cette petite boîte et là j’ai compris, plutôt Dieu m’a fait comprendre, que j’étais dans l’erreur, non pas dans l’erreur technique d’un étudiant mais plutôt « Ne touchez pas à ma boîte parce que c’est tout ce que je sais de Dieu », comme si Dieu était dans cette petite boîte. Alors peu à peu, je me suis détaché de ces fiches. Voyez-vous pour chacun d’entre nous il y a des petites expériences de ce genre et puis il y a aussi les exigences que nous avons toujours : nous voulons que … nous voulons que …. Oui, moi en tant qu’higoumène je voudrais qu’il y ait quinze moines, cinquante moniales et voilà. Et ce n’est pas cela, on est un petit troupeau et parfois je me fâche avec Dieu : « Je ne suis pas content, Tu ne nous envoie personne ». Et puis au fur et à mesure, j’essaye de me rapprocher de Dieu et je comprends que là n’est pas la question. La question est de s’abandonner à la volonté de Dieu. Il y a certainement des raisons pour lesquelles ceci ou cela nous arrive ou ne nous arrive pas. Peut-être que nous comprendrons le pourquoi beaucoup plus tard mais l’important sur le moment c’est de dire « Que Dieu soit béni et que sa volonté soit faite ». Je me souviens qu’au début de la fondation du monastère, nous étions peu nombreux et il y avait quelques postulants ou postulantes qui venaient, qui n’avaient pas vraiment la vocation monastique et que je laissais entrer en me disant que peut-être Dieu va les changer. Je rêvais un peu. Et puis en fait j’ai été obligé de leur dire au bout d’un moment : « Non, vous n’êtes pas fait pour la vie monastique » ou bien c’est eux-mêmes qui disaient : « Je ne suis pas fait pour la vie monastique. Je repars ». Mais c’était douloureux, c’était douloureux parce que nous étions peu nombreux et il fallait travailler, il fallait travailler dur et j’avais envie que le monastère grandisse et je me souviens de m’en être plaint à Père Sophrony de bienheureuse mémoire qui m’a répondu une chose qui me console à chaque fois que la question se pose. Il m’a répondu : « Et même si tu restes seul, restes ». Si c’est la volonté de Dieu que je reste seul, je reste seul et puis c’est tout. L’important ce n’est pas d’avoir 150 moines et moniales mais qu'est-ce que Dieu veut ? Nous ne savons pas exactement mais nous pouvons toujours dire : oui, oui à la situation. Et si nous ne pouvons pas comme le jeune homme et que nous partons triste parce que nous n’arrivons pas à obtenir ceci ou cela alors il faut nous tourner vers le Christ, vers Dieu, vers la Sainte Trinité, vers la Mère de Dieu, vers les Saints et puis demander : « Je ne comprends rien ; je ne sais pas ce qui se passe ; je n’arrive pas à me libérer de ceci, de cela ; je veux avoir ceci, je veux avoir cela ; je veux que ceci soit comme ceci, etc. Libère-moi de tout cela. Je n’y arrive pas ». C’est ainsi qu’alors Dieu sera heureux, Dieu sera accueillant, Dieu sera miséricordieux et nous, nous aurons la paix dans le cœur.
Amen


La vie en Christ, vie monastique

18/8/2018 Mt XX, 29-34

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Le récit de l’Evangile que nous venons d’entendre qui nous rapporte le miracle de ces deux aveugles qui retrouvent la vue est un récit qui peut paraître banal parmi tellement d’autres miracles que le Seigneur Jésus a accomplis. Mais il y a quelque chose qui est extrêmement important pour chacun d’entre nous qui avons été appelés à la vie monastique. En effet, ces deux aveugles crient vers le Seigneur pour qu’Il les entende et pour qu’Il les guérisse. On essaye de les faire taire mais ils crient plus fort parce qu'ils ont compris que le seul qui pouvait les guérir, c’était le Christ. Autrement dit, dans leur vie d’aveugle, ils avaient mis le Christ au centre de cette vie. Ils espéraient en Lui, ils croyaient en Lui et ils s’abandonnaient à Lui. Et c’est une leçon toute simple à retenir mais tellement importante. Lorsqu'on est appelé à la vie monastique, c’est le Seigneur qui nous appelle et comme le disait Saint Paul Il appelle souvent les plus faibles, les plus pauvres – c’est ce que nous constatons d’ailleurs lorsqu'Il a choisi ses apôtres. Mais là n’est pas le problème car même si nous sommes appelés étant pauvres, petits, incapables même à certains moments, si le Seigneur nous a appelés, nous nous avons à L’appeler aussi. Nous avons à Le mettre au centre de notre vie. Sans le Christ au centre de notre vie, la vie monastique n’a aucun sens et elle est impossible à vivre. Si on n’a pas le Christ dans notre vie, on va tout le temps gémir tous les jours. Rien n’ira, absolument rien. Nous serons insatisfaits de tout mais si le Christ est au milieu de nous, si nous le considérons comme le pilier central de notre vie, si nous Le considérons comme la personne à laquelle nous devons nous adresser en premier comme étant Celui qui nous soutient, qui nous donne la vie, qui nous donne l’espérance, qui nous donne la force, qui nous envoie son Esprit-Saint pour tenir ; s’il n’y a pas le Christ au milieu de notre vie il n’y a rien, absolument rien. La vie monastique n’est pas facile ; elle est une vie qui comporte forcément des épreuves, comme toute vie d’ailleurs ; elle est une vie qui comporte une certaine forme d’ascèse. Tout cela n’est réalisable qu’avec le Christ. Tout cela n’est pas réalisable si ce n’est pour le Christ et avec le Christ et c’est la leçon d’aujourd'hui. Le Seigneur est miséricordieux, il peut nous accorder tout ce qui est nécessaire à notre vie. Les aveugles avaient besoin de voir pour vivre normalement, Il les a guéris. Il les a guéris parce que eux-mêmes voulaient être guéris par Lui, dont ils avaient entendu parler et qui était devenu leur référence. Le cri qu’ils poussent : « Aie pitié de nous, Fils de David », c’est exactement ce que nous disons, à quelques mots près, dans la prière « dite » de Jésus mais si cette prière n’est pas adressée au Christ, si c’est simplement une répétition, je dirais, banale, non réfléchie et surtout qui ne vient pas du cœur, alors il veut mieux se taire, il vaut mieux même partir, aller ailleurs. Si nous ne pouvons pas crier vers le Christ parce que nous ne croyons pas en Lui, aucune vie, ni chrétienne, ni monastique n’est possible. Alors faisons grandir notre foi dans le Christ. Mettons le Christ au centre de notre vie. Parlons-Lui. Demandons-Lui tout ce qui est nécessaire et Il nous donnera avec justesse ce qui correspond à nos besoins. Ayons confiance en Lui, aimons le Christ. Si nous aimons véritablement le Christ alors l’horizon devient autre, les difficultés s’abaissent, les soucis diminuent, les angoisses disparaissent parce que le Christ est là, parce qu'Il est avec nous, que nous croyons en Lui, qu’Il devient notre seul repère, notre référence, la Personne avec laquelle nous vivons en premier et avant tout.
Amen


Silence

15/8/2018 Lc X, 38-42, XI, 27-28

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Ce qui caractérise peut-être le plus la Très Sainte Mère de Dieu dont nous fêtons la Dormition en ce jour, c’est un seul mot : le silence. En effet, d’une part nous ne connaissons pas beaucoup de choses sur la Mère de Dieu : nous connaissons l’épisode de l’Annonciation, l’épisode de Cana et puis l’épisode aux pieds de la croix. La Dormition elle-même nous est connue par des écrits apocryphes et tout le reste est silence. Et d’ailleurs au moment de l’Annonciation lorsque l’ange lui apparaît, la Mère de Dieu est dans le silence, non pas d’une manière ponctuelle et spécifique mais d’une manière habituelle. Très jeune elle a été mise au service du temple et forcément ce service elle l’a accompli dans le silence. Elle méditait toutes ces choses (celles qui étaient dans l’Ancien Testament) dans son cœur mais pour méditer ces choses il lui fallait avoir un cœur de silence, un cœur libre, un cœur disponible. Et c’est pour cette raison aussi qu’elle a pu dire à l’Archange : Oui. Ce oui qui est le début de notre salut ; ce oui qui est prononcé par une femme de notre race, pas quelqu'un qui était exceptionnel – même si la Mère de Dieu est exceptionnelle – mais elle était comme nous, capable de tomber dans le péché mais elle n’y est jamais tombée, à la fois, par la grâce de Dieu et parce qu'elle a su accueillir cette grâce dans une symbiose qui lui était propre. Oui le silence marque la vie de la Mère de Dieu. C’est aux pieds de la croix que nous la retrouvons dans le silence et cette fois dans la compassion, cette compassion qui nous est proposée de vivre à certains moments dans notre vie, c'est-à-dire compassion envers ceux qui souffrent, qui nous sont proches ou lointains ; cette compassion ne peut être vécue profondément et intensément que dans le silence mais un silence nourri de Dieu. Je me souviens qu’une fois, il y a très longtemps, un higoumène de monastère, face à la mort d’un de ses frères m’avait dit : une seule chose est à faire maintenant, entrer dans le silence. Oui la Mère de Dieu a su être compatissante par rapport à son Fils qui était cloué sur une croix. Et par son silence elle a participé à ce salut du monde. On la retrouve silencieuse au moment de la noce de Cana lorsqu'elle s’adresse à son Fils pour qu’il puisse faire quelque chose parce qu'il n’y a plus de vin : son Fils lui répond et elle se tait, elle ne lui répond pas, elle ne se justifie pas, elle n’explique rien ; elle va juste dire aux serviteurs : « Faites tout ce qu’Il vous dira », c'est-à-dire que son silence-là est un silence d’abandon total à la volonté de son Fils qui fera effectivement le miracle. Le silence, ce silence qui nous est si difficile, à nous tous : moines, moniales, laïcs ; dans le monde, pas dans le monde, le silence est difficile et notre civilisation, mais peut-être celle d’avant aussi, ne nous ont pas appris le silence. Et pourtant le silence est nécessaire. Si nous savions nous taire … combien le monde serait dans la paix parce que le silence, tel que la Mère de Dieu l’a vécu, comme je le disais tout à l’heure, est un silence qui veut se nourrir de Dieu, qui veut être habité par Dieu, par l’Esprit-Saint. C’est donc un silence qui est positif - je dirais même – dynamique, dynamisant ; c’est dans ce silence que beaucoup de choses vont pouvoir s’accomplir ; c’est dans ce silence que le mystère du salut s’accomplit : oui, elle répond simplement oui. Alors pour nous c’est une leçon, un témoignage pour notre vie : nous nourrir du silence, du silence qui lui-même est nourri par la présence du Saint-Esprit. Avant tout acte, avant toute décision, avant toute action, être dans le silence, quelque temps et se laisser visiter par Dieu, comme la Mère de Dieu l’a fait. Il y a une vieille tradition russe qui fait que lorsque quelqu'un part en voyage, pour un long voyage, avec des valises, avant de quitter la maison, il se pose sur un siège quelque temps en silence et ensuite s’en va. C’est une très belle tradition parce que vous comme moi quand on part en voyage on est toujours un peu angoissé, excité, énervé : on a peur d’oublier quelque chose, de rater le train, l’avion, etc. Mais si nous nous posions dans le silence quelques secondes avant de partie, cela attirerait une capacité d’abandon entre les mains de Dieu quoiqu’il arrive, il n’y aurait plus d’angoisse, d’inquiétudes de rater le train ou l’avion ou d’oublier quelque chose ; qu'est-ce que cela pourrait faire puisque Dieu est avec nous ?
Oui, alors retenons ce message de la part de la Mère de Dieu : être dans le silence, méditer dans le silence la parole de Dieu et puis garder le silence à chaque fois que nécessaire, notamment cela nous éviterait des critiques, des mauvaises paroles, des mauvaises réactions, des colères, des jugements, des rejets, du mépris et toutes ces choses qui nous encombrent le cœur et l’alourdissent. Le silence est tellement beau… Nous qui avons la chance de vivre dans la nature, en pleine forêt, nous pouvons goûter ce silence où l’on n’entend que quelques oiseaux qui chantent la louange de Dieu et rien d’autre, en principe, sinon notre babillage ou nos discours inutiles. Dans le monde c’est plus difficile : dans une grande ville, même dans un village, le silence est difficile, mais il est possible parce que le silence n’est pas quelque chose d’extérieur à nous, c’est quelque chose qui est à l’intérieur de nous, à l’intérieur du cœur, dans un désir profond d’être silencieux. Alors tout devient possible où que nous soyons ; même dans l’agitation la plus grande le silence est possible et s’il est habité par Dieu alors, comme la Mère de Dieu, nous sommes sur la voie du salut où nous serons sauvés.
Amen


Pardon

12/8/2018 Mt XVIII, 23-35

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Si le Seigneur parle ainsi en parabole à ceux qui l’entouraient c’est parce qu'Il veut leur enseigner quelque chose d’important et ce quelque chose d’important c’est ce que nous avons entendu en final : « Pardonnez ». Pardonner à ceux qui nous ont offensés d’une certaine manière par une dette, disons par une dette d’amour pour simplifier, et peut-être pour être encore plus dans la vérité. Car ce que le Seigneur veut nous enseigner c’est que le pardon est vital et important si l’on veut respecter son commandement : « Aimez-vous les uns les autres ». Nous le savons bien, il n’est pas facile d’aimer ; il n’est pas facile d’aimer ceux qui, pour une raison ou pour une autre, nous blessent, nous gênent, nous encombrent, nous accablent et pourtant le Seigneur nous demande de pardonner, d’aimer. C’est ce qu’il fait avec chacun d’entre nous ; c’est ce qui est expliqué très clairement dans la parabole car la dette du premier personnage, celui qui ne sait pas pardonner, est bien plus forte et bien plus conséquente que la dette du second personnage. Ce qui veut dire que, pour chacun d’entre nous, le Seigneur pardonne - si l’on veut bien se présenter à Lui – tout, absolument tout, y compris l’impensable. Notre dette envers Lui est quelque fois fort lourde mais Il pardonne. Alors puisque Dieu nous pardonne à nous qui, en principe nous connaissons, qui en principe savons ce que nous avons dans le cœur, ce qui nous manque ou ce qui est de trop. Le Seigneur nous demande à nous qui sommes aimés par Lui jusqu’au pardon de pardonner à notre frère ou à notre sœur. Oui, c’est difficile ; c’est difficile parce que notre nature déchue n’accepte pas facilement de voir justement cette déchéance car, bien souvent, la déchéance de l’autre révèle en nous notre propre déchéance et nous n’aimons pas cela alors nous rejetons ; nous rejetons la déchéance de l’autre pensant qu’ainsi nous rejetons notre propre déchéance ; et évidemment nous nous égarons complètement. Si nous ne parvenons pas à pardonner - et quelque fois cela peut arriver parce que la douleur est trop forte – il faut commencer par demander au Seigneur de nous aider, Lui qui sait pardonner ; il faut commencer par Lui demander de pardonner à notre place puisque sur le moment nous ne parvenons pas à pardonner, que Lui pardonne à notre place. Et puis il faut lui demander une seconde chose car la première ne suffit pas : il faut Lui demander la grâce de pouvoir nous-mêmes un jour pardonner. Si nous agissons ainsi nous sommes sur la bonne voie : nous sommes à la fois dans la reconnaissance de notre misère, notre incapacité à pardonner, c'est-à-dire à aimer et nous demandons le secours de Dieu, que Lui aime et pardonne à notre place. Et sachant que nous ne pouvons pas réaliser par nous-mêmes ce que le Seigneur nous commande alors nous Lui demandons sa grâce car sans Lui rien n’est possible. Il l’a dit Lui-même : « Ce qui est impossible à l’homme est possible à Dieu ». Alors il faut nous souvenir de tout cela et dans notre quotidien, quelque fois lourd, quelque fois écrasant, il faut aller vers le Seigneur, pas vers nous-mêmes (nous savons quel est le résultat) mais vers Dieu, vers Celui qui est miséricorde, vers Celui qui est tout amour, vers Celui qui, à chaque fois que nous nous présentons devant Lui, avec notre dette, nous remet notre dette comme nous le disons dans « le Notre Père ». Il ne faut pas avoir honte d’aller vers le Seigneur pour reconnaître que nous ne sommes pas capables d’aimer et de pardonner. Il faut aller vers Lui avec humilité, avec simplicité du cœur, comme un enfant et Lui agira comme Il l’a dit. Il nous aimera, Il nous pardonnera, Il pardonnera à notre place et Il nous aidera à pardonner. Mais pour cela Il faut que nous ayons une foi vive, que nous ayons cette capacité d’abandon entre ses mains, que nous ayons l’humilité d’aller vers Lui en disant : « Je ne sais pas » ou « Je ne peux pas. Pour le moment je ne peux pas. J’ai beau essayé je n’y parviens pas ».
Le premier personnage de la parabole s’est trompé en réagissant, en se mettant en colère et en faisant mettre en prison celui qui lui devait en définitive pas grand-chose. Il faut faire attention parce que la leçon est dure. Le Seigneur nous dit qu’à la fin des Temps, si nous n’avons pas su pardonner, il ne nous sera pas pardonné non plus, il sera trop tard mais si nous avons désiré pardonner, en suppliant le Seigneur, en le faisant intervenir, alors les choses seront autre. Comme je vous le dit souvent nous apprenons sur cette terre à aimer, donc à pardonner aussi, forcément. Il faut saisir la grâce au moment où le Seigneur la donne, au moment où on sent que l’on peut pardonner. Il faut faire un tout petit effort mais on peut. On peut commencer par prier pour celui ou celle à qui on n’arrive pas à accorder le pardon, prier pour ce frère ou cette sœur. Prier, c’est déjà le début du pardon. Et si l’on fit ainsi alors viendra à un moment ou à un autre la grâce de pardonner carrément, vraiment et du fond du cœur. Quelque fois on me dit : « Oui, mais psychologiquement c’est très difficile de demander pardon ou de pardonner parce que je ne vais pas être bien reçu ». Oui, peut-être mais sachons attendre un peu, mais pas attendre en ne faisant rien : attendre en priant, attendre en demandant de l’aide alors cette attente ne sera pas perdue. Peut-être qu’il aura fallu un peu de temps et même beaucoup de temps et puis un beau jour, par la grâce, le pardon viendra et quand le pardon viendra, la paix renaîtra dans notre cœur car, on le sait bien, tout ce qui n’est pas pardonné reste dans notre cœur et nous alourdit, nous affaiblit, nous empêche de vivre. Alors que pardonner redonne la joie de vivre et d’aimer. Que Dieu nous l’accorde.

Amen


Transfiguration déification communion d'amour.

6/8/2018 Fête de la Transfiguration Mt XVII, 1-9

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Cette fête de la Transfiguration est sans aucun doute après celle de la Résurrection du Christ l’une des plus importantes que nous connaissions et qui nous soit rapportée dans les Evangiles. En effet, le Christ, pour la première fois, se manifeste devant ses trois apôtres comme Dieu. Il se manifeste tout d’abord par cette éclatante lumière qui resplendit de son visage et de ses vêtements et rayonne sur la nature même, y compris sur les vêtements des apôtres. Autrement dit cette manifestation divine n’est pas simplement la vision qu’aurait pu avoir les trois apôtres mais ils en ont le bénéfice : ils sont touchés par cette manifestation divine au point qu’ils en sont bouleversés ; ils en ressentent une joie profonde et Pierre voudrait bien demeurer dans cet état-là ; et puis ils sont pris de crainte : ce n’est pas de la peur mais du respect qu’ils doivent à Celui qui se manifeste ainsi et dont le Père s’exprime en disant : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-Le ». Alors oui c’est un passage très important parce que nos Pères nous ont dit qu’à partir de là – et à partir aussi de la Résurrection bien sûr – nous étions appelés à être divinisés : c’est ce qu’ils appellent la Théosis. Le mot demande évidemment une certaine compréhension comme une certaine interprétation. Car, rappelez-vous, dans la « Genèse », au début de la Création, Adam a voulu se substituer à Dieu, tenté par le démon ; il a voulu être aussi grand, aussi fort et, à la limite, remplacer Dieu. Et c’était son erreur. Il ne s’agit pas de cela dans la déification de l’homme, il s’agit d’une participation à la divinité. D’ailleurs on fait allusion à une comparaison facile à comprendre dans le texte évangélique que nous avons entendu : le Christ rayonne à travers son visage, ses vêtements comme un soleil éclatant et les rayons de ce soleil viennent toucher toute la nature, les vêtements et les visages des apôtres. C’est ainsi que nous pouvons tenter de nous approcher de ce mystère qui est incompréhensible à l’intellect de l’homme, ce mystère de la déification ; c’est une question de participation à la divinité. Qu'est-ce que cela veut dire ? Dieu est amour, c’est son Essence même et lorsque nous serons appelés à la vision éternelle, nous serons appelés à partager cet amour en plénitude, sans empêchements, sans ce qui nous encombre sur cette terre pour aimer totalement, véritablement et sincèrement. Nous cherchons à aimer bien sûr, nous aimons aimer et être aimé mais il y a toujours quelque chose qui nous empêche d’aimer autant que nous le souhaitions. D’abord cet amour est limité dans le temps : il dure quelques instants, quelques minutes, quelques heures et puis il s’évanouit et puis quelque fois il est même blessé par le péché, par la faute, par la chute. Mais dans l’Eternité, dans l’Eternité nous aurons le bénéfice de cette déification, ce partage d’amour avec Dieu, sans conditions. La seule condition qui nous sera posée c’est : veux-tu ? Vous savez bien que le Christ lorsqu'Il a guéri l’un ou l’autre de ceux qu’Il rencontre leur demande très souvent : « Veux-tu guérir ? » Car nous sommes libres d’être guéris, nous sommes libres d’aimer et nous serons libres d’aimer ou non pour l’éternité. Les Saints que nous connaissons – et ils sont nombreux – sont ceux qui ont eu tout au long de leur vie ce désir de partage d’amour avec le Christ, avec le Père, avec l’Esprit-Saint et leur désir était tellement fort que, la grâce aidant, ils sont devenu presque, presque en partage avec l’amour de Dieu mais au bord, pas complètement car il faut qu’il soit passé de l’autre côté, parvenu au face-à-face avec Dieu pour recevoir cette lumière d’amour. C’est pour cette raison que nous avons exposé quelques reliquaires qui comportent des parcelles d’ossements de Saints que nous aimons vénérer. Pourquoi les vénérons-nous ? Pas par un acte magique, ce serait ridicule et sans intérêt ; nous vénérons ces reliques parce qu'elles sont des morceaux de corps transfigurés car les saints sont transfigurés : les saints sont dans la bonté et la beauté de Dieu alors lorsque nous embrassons les reliques nous sommes participants, avec nos limites, de cet amour qu’ils ont reçu en plénitude. De la même manière et de façon encore plus forte lorsque nous communions au Corps et au Sang du Christ nous sommes, pour quelques instants, quelques minutes, quelques heures transfigurés nous aussi. D’ailleurs vous vous rappelez que tout de suite après la Communion nous chantons : « Nous avons vu la vraie lumière ». Nous avons vu la vraie lumière et nous l’avons vue en recevant le Corps et le Sang du Christ qui s’humilie en pénétrant dans notre propre corps, notre propre chair. Voilà tout l’importance de cette fête parce qu'elle est une préfiguration de ce qui nous attend dans l’éternité. Ce n’est pas une petite fête ordinaire, c’est une fête importante qui nous touche tous. Comme je vous l’ai souvent dit ici : en tant que chrétiens nous sommes responsables de ce que nous recevons là : cette possibilité de déification, de participation à l’amour divin en plénitude ; nous en sommes responsables pour le faire partager à l’humanité, d’une manière ou d’une autre, à ceux qui nous sont proches, à ceux qui nous sont lointains comme à ceux qui nous sont inconnus et que nous connaîtrons un jour dans l’éternité, ceux qui sont vivants comme ceux qui sont décédés
Le Seigneur a demandé à ses apôtres de ne pas parler de sa transfiguration, c’est un peu surprenant parce qu’on n’aurait pu s’attendre à ce qu’il demande le contraire : dites-leur ce que vous avez vu, c’est important, il faut que tout le monde comprenne. Mais ce n’était pas possible tant que la Résurrection n’avait pas eu lieu, d’une part et que, d’autre part, l’Esprit-Saint n’était pas encore descendu sur les apôtres pour qu’ils comprennent en plénitude ce moment-là. Parce qu'ils ont appréhendé ce moment, ils ont saisi que quelque chose d’extraordinaire se passait, ils en ont été touchés, marqués dans leur propre être mais ils ont pu comprendre l’essentiel de cet évènement à partir du jour où d’une part le Christ est ressuscité et d’autre part où l’Esprit-Saint est descendu pour se manifester et leur faire comprendre ce qu’ils avaient à comprendre. Alors en cette belle fête demandons à l’Esprit-Saint qu’Il vienne nous aider à appréhender ce mystère de la Transfiguration, ce mystère de la déification, ce mystère de la Théosis ; qu’Il nous apprenne progressivement à désirer cette communion d’amour qui est la véritable Transfiguration, qui est la véritable divinisation. Que l’Esprit-Saint vienne en nous pour nous aider dans ce désir, que ce désir aille en grandissant tout au long de notre vie pour qu’au moment de l’éternité, quand nous paraîtrons devant la face du Seigneur, la face lumineuse, la face exceptionnelle, nous puissions dire : « Oui, oui, c’est cela que je désire partager ton amour que Tu m’offres gratuitement ».
Amen


La prière

5/8/2018 Mt XVII, 14-23

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans cet Evangile le Seigneur donne une leçon à ses apôtres qui peut être bien utile aussi à chacun de nous. En effet ce garçon qui était possédé a été présenté aux apôtres et aucun d’entre eux n’a pu le guérir. Ils en sont étonnés et questionnent le Christ alors que Lui-même vient de remettre le garçon à son père en bonne santé. Le Seigneur leur explique que pour ce genre de démon qui possédait ce jeune garçon il y a une nécessité avant tout : c’est de prier et de jeûner. Qu'est-ce que cela veut dire : cela veut dire que, probablement les apôtres avaient compté sur leur propre force pour guérir ce garçon ; probablement qu’ils pensaient que par eux-mêmes ils pouvaient le remettre en bonne santé mais ils avaient oublié l’essentiel : le jeûne et la prière. En effet nous voyons, tout au long de l’Evangile, que le Seigneur se retire régulièrement à l’écart pour prier, pour prier le Père et il ne fait aucun doute qu’Il jeûne également. Pour qu’Il puisse avoir la force divine de guérir il faut qu’il soit en relation avec le Père, une relation profonde, intime, personnelle, ce que les apôtres n’avaient pas compris et Il leur explique : « Il faut que vous priez, c'est-à-dire que vous soyez en relation profonde avec Moi, le Christ, ou avec Dieu mon Père ou avec l’Esprit-Saint ou avec les Trois mais vous ne pouvez pas faire en votre nom un miracle. C’est au nom de Dieu que le démon fuit ». Le démon n’a pas peur des hommes mais le démon a peur du Seigneur. Alors souvent nous avons, soit pour nous-mêmes, soit pour ceux qui nous entourent, à demander la guérison de l’un ou de l’autre, la guérison de notre âme, de notre cœur, la guérison physique aussi mais si nous ne commençons pas par jeûner et prier alors rien n’est possible. C’est grâce à cette relation entre Dieu et l’homme que l’homme peut agir selon Dieu mais s’il n’y a pas cette relation, rien n’est possible. La prière – et on pose souvent cette question : qu'est-ce que la prière ? – la prière ce n’est pas accomplir un devoir, ce n’est pas réciter une certaine quantité de chapelets ou de psaumes ou de prières préalablement écrites, non ce n’est pas cela la prière. Cela n’est que l’extérieur. La véritable prière c’est celle qui nous met en relation avec le Christ. Alors les autres moyens sont tous bons mais s’il n’y a pas au fond de notre cœur ce désir d’être dans l’intimité du Christ pour recevoir sa grâce alors nous ne pouvons rien faire. C’est pour cette raison que dans nos Offices, dans nos Liturgies nous prions beaucoup pour le monde entier et pour chaque catégorie du monde : ceux qui souffrent, ceux qui sont en guerre, ceux qui cherchent, ceux qui sont en prison, ceux qui sont touchés par toutes sortes de maladie et nous terminons toujours cette prière par une demande d’intercession du Christ. Si nous ne faisions pas cela nous perdrions notre temps, nous ne ferions rien de valable. Il faut bien comprendre que tout vient de Dieu, que la grâce vient de Dieu par l’Esprit-Saint que nous invoquons à chaque Office et que sans cette grâce rien n’est possible. Que le Seigneur nous donne de comprendre en profondeur cette réalité de la prière et du jeûne. Le jeûne peut avoir différents formes, cela peut être un jeûne alimentaire mais il y a bien d’autres formes de jeûne : le jeûne de la distraction, de la lecture inutile, de certaines émissions à la télévision et autres. A nous de trouver quelle forme de jeûne nous pouvons nous appliquer pour obtenir de Dieu la grâce voulue. A nous de nous retirer dans notre chambre, c'est-à-dire dans notre cœur, là où se situe l’Esprit, et de prier dans le silence le Seigneur Jésus. Si nous n’accomplissons pas cela, comme les apôtres, nous ne pourrons rien guérir, nous ne pourrons rien faire mais si nous avons cette foi nécessaire qui suscite la prière alors tout devient possible. Nous avons reçu au baptême cette capacité de la foi, nous avons reçu cette capacité de la prière, de l’union à Dieu alors la question est : que faisons-nous de ce que nous avons reçu ? Est-ce que nous l’utilisons régulièrement, avec vérité, avec profondeur, dans la simplicité ou bien oublions-nous que nous avons reçu ces grâces ? Nous pouvons tous les jours prier simplement : regarder l’icône du Christ sans dire un mot est une prière, vénérer une icône est une prière ou bien fermer les yeux et tourner notre âme et notre cœur vers Dieu, c’est une prière. Cela n’exclut pas d’utiliser le chapelet, les psaumes et les autres prières bien sûr, mais si nous ne sommes pas dans ces prières-là unis au Christ Dieu ne nous entend pas. La guérison magnifique que le Christ a accomplie c’est parce qu'Il priait souvent. Il se retirait de l’agitation du monde et Dieu sait si en Orient l’agitation est grande. Il aimait passer de l’autre côté du lac sans ses apôtres, peut-être en restant dans la barque pour ne pas être invité à quelque manifestation et là Il priait le Père dans le secret. C’est ce qu’Il a fait à Gethsémani alors qu’il était au bord du moment - dramatique d’une part et salutaire d’autre part – de la crucifixion, alors qu’Il souffrait intérieurement d’une manière telle qu’Il a même osé demandé que cela Lui soit épargné ; et tout cela Il le faisait dans la prière et c’est dans la prière qu’Il a pu dire après : « Non pas ma volonté mais Ta volonté » ; c’est grâce à cette prière intense, profonde que le Christ une fois mort ressuscite pour notre salut.
Amen


L'anniversaire du monastère

1/8/2018 1Co I, 18-24

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Aujourd'hui nous fêtons le souvenir de la crucifixion du Christ et il se trouve que, non par calcul humain mais peut-être par prévisions divine le monastère dans lequel nous vivons a été fondé en ce même jour de la fête de la croix « d’été ». Autrement dit on peut dire d’une manière assez catégorique et évidente que ce monastère est marqué par le sceau de la croix du Christ et c’est une grande bénédiction, une grande bénédiction puisque c’est par la croix que nous sommes sauvés, c’est par la croix que nous savons que le Seigneur Jésus nous tire vers Lui pour que nous vivions avec Lui le salut éternel. Fonder un monastère c’est toute une aventure, une aventure un peu invraisemblable, un peu inattendue même en ces temps qui sont les nôtres et c’est une aventure parce que aucun d’entre nous, je pense pouvoir le dire, n’était véritablement capable de démarrer ce monastère. Non pas au niveau de la restauration des bâtiments – bien sûr cela ne fut pas aussi simple que cela, il a fallu des années et des années pour que ces bâtiments deviennent habitables et agréables – mais ce n’est pas cela un monastère ; un monastère ce n’est pas un corps de bâtiments ; un monastère c’est un ensemble de personnes choisies par Dieu pour y vivre la prière, pour y vivre le don de soi, pour y vivre un certain abandon de sa volonté propre et c’est peut-être là que l’aventure devient difficile et quelque fois même à la limite de l’impossible. Saint Paul dans son épître nous disait que le Seigneur Jésus choisit pour son œuvre les plus faibles, non les plus forts. Et bien je pense que ce que nous dit Saint Paul s’applique particulièrement à nous sommes moines et moniales, qui sommes ici dans ce lieu depuis 28 ans. Des faibles, par nature déjà, puisque nous sommes déchus et puis des faibles, à cause de nos péchés, de nos limites, de nos incapacités à vivre vraiment l’Evangile ; des faibles, parce que nous sommes trop souvent centrés sur nous-mêmes, nous ne pensons qu’à nous : nous voulons bien être sauvés mais il faut que le Seigneur nous aide, que les autres aussi nous aident ; nous ne pensons pas que nous pouvons être actifs dans ce mouvement de salut. Trop souvent nous nous laissons aller à des gémissements, à des reproches, des critiques et chacun d’entre nous, sans aucun doute, depuis 28 ans, moins pour les plus jeunes, pensent que vivre dans un autre lieu, dans un autre monastère, dans un autre contexte, peut-être avec un autre père spirituel, ce serait beaucoup mieux, beaucoup plus facile, beaucoup plus simple à réaliser. Et pourtant, c’est dans notre faiblesse que le Seigneur se glorifie ; non pas une faiblesse considérée comme acquise définitivement et qui n’aurait pas d’issue mais une faiblesse réellement constatée, réellement acceptée, réellement vécue comme une donnée profonde de la vie monastique. Lorsque le Seigneur Jésus a choisi ses apôtres, il n’a pas choisi à l’origine les plus forts, Il a choisi de pauvres pêcheurs qui gagnaient leur vie au bord du lac ; Il a choisi des êtres qui étaient tous avec des caractères différents, avec des faiblesses, avec de l’orgueil ; cela nous ressemble beaucoup et c’est ainsi que le Seigneur entend construire son Eglise, entend construire un monastère en prenant des êtres faibles mais cela ne doit jamais nous désespérer, cela ne doit jamais nous inquiéter car le Seigneur Lui-même s’est rendu faible, faible jusqu’à la mort pour le salut du monde. Cela veut dire que si nous constatons que, tout au long de ces années qui se sont écoulées, nous n’avons pas été suffisamment forts, nous n’avons pas été « à la hauteur », ce n’est pas grave ; ce n’est pas grave si nous confions tout cela au Seigneur ; ce n’est pas grave si nous savons que c’est Lui le constructeur, le constructeur des âmes car ce qui est le plus important à construire que les bâtiments ce sont nos âmes, nos âmes affaiblies, nos âmes appauvries, nos âmes que le Seigneur prend telles qu’elles sont et que pas à pas Il transforme, ô sans que nous nous en apercevions ; Il transforme nos âmes pour les faire plus grandes qu’elles ne sont, pour les mettre en correspondance avec ce qu’Il attend de nous. Bien sûr, nous savons que nous ne serons jamais parfaits sur cette terre : aucun saint – je vous l’ai souvent dit – n’a été parfait. Notre Père Saint-Silouane, notre saint protecteur, lui-même avant de mourir pensait que ce n’était pas possible qu’il meure car il se sentait encore imparfait : il n’avait pas encore assez d’humilité. C’est une belle leçon pour nous puisqu’il est notre père et notre modèle après le Christ. Il est évident que nous manquons tous d’humilité et que dès que nous regardons ce qu’il y a dans notre cœur nous voyons plus d’orgueil qu’autre chose ; nous aimons que chacun réponde à nos caprices, à nos désirs ; nous rêvons d’être autre que ce que nous sommes mais nous rêvons, nous ne sommes pas dans la réalité. Le Seigneur, Lui, ne rêve pas, Il voit bien qui nous sommes : comme ses apôtres, de pauvres pécheurs mais cela ne doit en aucun cas nous décourager ; si nous avons la grâce de nous déposer aux pieds du Seigneur en disant : « Oui, c’est vrai, je suis pécheur mais je veux bien continuer la route avec Toi, grâce à Toi, sans Toi c’est impossible mais avec Toi, oui, je veux bien continuer ». C’est le souhait que je formule maintenant en ce moment d’anniversaire : que chacun d’entre nous aie à la fois conscience de notre faiblesse, pas de manière masochiste, mais d’une manière réaliste, simple, comme l’enfant qui sait qu’il fait une bêtise et que nous ayons en même temps l’immense espérance, l’immense confiance en Dieu qui transforme tout. Il l’a dit : « Si nous avions la foi, des pierres nous pourrions avoir des pains ». C’est donc une question de foi et d’espérance, les deux sont liées. Un monastère ne se construit pas sans espérance, un monastère ne se construit pas sans la foi. J’ai connu quelques personnes qui ont souhaité démarrer un monastère tout seul, cela n’a jamais mené à rien. Pour qu’un monastère se construise il faut une bénédiction, une bénédiction de Dieu par un père spirituel, une bénédiction qui donne force, qui donne courage et qui est le ciment de base permettant de construire le lieu de l’âme qu’est le monastère.
Amen


Béatitudes, rôle de l'église

24/7/2018 Mt XVIII, 18-22, XIX, 1-2, 13-15 1Co XII, 12-26

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans l’Evangile le Seigneur insiste pour nous dire combien nous devons nous en tenir à ce que nous avons à faire en vérité, à vivre dans la simplicité, dans l’humilité, dans l’amour, dans la serviabilité. Et contrairement à ce que souhaitait la mère des fils de Zébédée, que ses fils soient à la gauche et à la droite du Christ à la fin des temps, que ce n’était pas cela l’important. Et Saint Paul, dans cette très belle épître, nous précise bien que, dans l’Eglise, chacun et chacune a son rôle à jouer, que chacun et chacune est important. Il prend la comparaison du corps et comparant ainsi les différentes parties du corps il nous montre que ce corps que nous constituons symboliquement dans l’Eglise est composé de membres et que tous ont un rôle à jouer, quelle que soit la situation dans laquelle ce membre se trouve. Qu’il soit haut placé dans l’institution de l’Eglise ou qu’il soit un simple fidèle, tous ont un rôle à jouer. Non pas un rôle comme nous l’imaginons mais un rôle simple, très simple ; c’est pour cela qu’il prend la comparaison du corps ; il parle du pied, de la main, de l’œil, de l’oreille, etc., toutes les parties du corps et toutes les parties du corps ont un rôle. Alors nous ne devrions pas, dans l’Eglise, nous ne devrions pas penser que si nous sommes à telle ou telle place, nous sommes supérieurs aux autres. Ou bien l’inverse : que si nous sommes à telle ou telle place, inférieure apparemment, nous sommes des moins que rien. Tout cela est parfaitement faux : Saint Paul est très clair là-dessus. Chaque membre de l’Eglise, chaque membre d’une communauté, qu’elle soit monastique, paroissiale, familiale, sociale, chaque membre à un rôle à jouer et ce rôle est important ; il sera différent pour chacun d’entre nous, selon ce que l’Esprit-Saint nous aura donné comme don, selon ce qui nous sera demandé de faire et il n’est pas toujours facile de faire ce que l’on nous demande. Nous avons une vision souvent faussée à cause de l’orgueil pensant que celui ou celle qui est un peu plus haut que les autres a plus de facilité, n’a pas de souffrance et vit aisément. Alors c’est vrai qu’il arrive que ceux qui ont des positions importantes en profitent pour écraser les autres mais cela n’a aucun sens ; ceux-là n’ont rien compris ; ceux-là n’ont pas beaucoup médité cet épître de Saint Paul et cet Evangile. Jésus est un provocateur – pardon de dire cela mais c’est vrai – parce qu'Il provoque de bonnes choses. Il renverse tout, toutes les valeurs : celui qui est le premier sera le dernier et celui qui est le dernier sera le premier. Relisez les Béatitudes, c’est d’une invraisemblance … « Bienheureux ceux qui pleurent  », si vous trouvez que c’est drôle de pleurer vous avez bien de la chance et pourtant le Christ le dit et Il a raison parce que nous pouvons aller pleurer dans ses bras ; c’est cela le bonheur ; nous pouvons nous réfugier dans ses bras – comme je vous l’ai dit souvent – qu’Il a écartés sur la croix pour les refermer sur chacun d’entre nous pour nous dire combien nous sommes aimés même si, provisoirement, nous sommes dans les pleurs. Si nous relisons toutes les Béatitudes nous voyons que tout est à l’envers et tout l’Evangile est à l’envers parce que le Christ a remis tout à l’endroit, comme il fallait. Alors il faut que nous apprenions à intégrer cela dans nos vies, à ne pas nous croire possesseurs de la fonction que nous avons quelle qu’elle soit, dans l’Eglise, dans le monde, dans la société, dans la famille ; de ne pas désespérer parce que apparemment, apparemment nous sommes au dernier rang. Si nous comprenons bien la comparaison de Saint Paul, nous voyons que rien ne peut marcher si rien, dans le corps, n’est à sa place : si l’œil est à la place de l’oreille ou si le pied à la place de la main cela ne marche pas ; et s’il n’y a pas de main, s’il n’y a pas de pied, s’il n’y a pas d’œil, s’il n’y a pas d’oreilles cela ne marche pas. Il faut que nous interprétions cela, évidemment, c’est une comparaison mais cela doit nous entraîner à nous aimer les uns, les autres quelle que soit notre fonction, nous respecter, à ne pas gémir sans cesse sur notre situation parce qu'elle n’est pas comme celle-ci ou comme celle-là ou comme elle devrait soi-disant être. Madame Zébédée n’avait rien compris lorsqu'elle demandait que ses fils soient à droite et à gauche du Christ : qu'est-ce que cela peut faire ? Du moment qu’ils sont près du Christ et tout le monde peut être près du Christ, c’est là le miracle. Il faut intégrer tout cela dans notre vie ; l’Evangile, les épitres, les textes Liturgiques que nous lisons sont là à notre disposition, non pas pour que nous les apprenions tous par cœur, que nous puissions les réciter, que nous soyons fiers de savoir que le psaume un tel à un tel numéro. Dieu s’en fiche de tout cela. Ce qu’il veut c’est qu’on se serve de tous ces textes pour grandir, pour comprendre qu’on est aimé, pour comprendre qu’il n’y a pas dans la société, dans la hiérarchie, dans nos systèmes humains les valeurs que Lui souhaite que nous vivions. Alors si nous comprenons cela un tout petit peu, si nous essayons de renverser la vapeur, de chercher quel est vraiment le sens de notre vie, tels que nous sommes, avec nos richesses et avec nos faiblesses. Nous avons tous envie d’être différents de ce que nous sommes ; qui, sur cette terre n’a pas envie d’être blond alors qu’il est brun ? Qui n’a pas envie d’avoir les yeux bleus alors qu’ils sont noirs ? Qui n’a pas avoir envie d’avoir la peau plus claire ou plus foncée ? Qui n’a pas eu envie d’être plus grand physiquement ? Tout cela c’est humain mais ce n’est pas cela que Dieu nous propose. « Laissez venir à Moi les petits enfants » dit-il à ses apôtres ; les petits enfants, les plus faibles, les plus fragiles, les plus simples, c’est eux qu’il voulait avoir près de Lui. Réfléchissons à tout cela mais ne nous contentons pas de réfléchir : laissons descendre dans notre cœur toutes ces données pour en vivre, pour que tout notre être soit rempli de tout cela, pour que nous vivions autrement, que nous changions nos regards, nos manières de penser, nos manières de vivre avec l’autre, que nous sortions des jugements, des comparaisons et toutes ces bêtises. C’est cela que Dieu attend de nous et c’est possible puisque Dieu nous aime, que non seulement avec cet amourn en le demandant à chaque fois que nécessaire, avec cet amour nous pouvons tout. C’est là où nous devenons grands quand nous acceptons de recevoir l’amour de Dieu qui se pose sur notre misère ; c’est ce qu’on appelle la miséricorde de Dieu, l’amour de Dieu ; c’est ce que nous avons tant de mal à vivre et pourtant c’est l’essentiel de notre vie.

Amen


Multiplication des pains.

22/7/2018 Mt XIV, 14-22 Multiplication des pains

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous connaissons bien cet Evangile que nous venons d’entendre mais la question est de savoir si nous comprenons bien tout ce que cela signifie pour nous. Ce fut un évènement historique, important qui a certainement marqué tous ces hommes, ces femmes, ces enfants qui entouraient le Christ, qui venaient pour se faite guérir, pour L’écouter parce qu'ils savaient qu’Il avait une grande puissance de parole et une grande sagesse ; mais comprenons-bien ce qu’il y a derrière cet évènement ? Il y a quelque chose d’encore plus important. En effet, si vous avez été attentifs à ce qui a été lu, il nous a été dit que Jésus fut pris de compassion pour tout le peuple et, à partir de là, à partir de 5 pains et de quelques poissons, il fait cette multiplication miraculeuse qui va permettre de nourrir tous ceux, toutes celles qui, fort nombreux, étaient autour de Lui. C’est un acte d’amour de la part du Christ. Le Christ ne veut pas que ceux qui sont venus pour recevoir sa Parole ou sa guérison repartent le ventre creux. Il veut aussi nourrir les affamés mais ceux qui étaient là, comme nous aujourd'hui, avaient faim avant tout – et c’est pour cela qu’ils étaient venus d’ailleurs – ils avaient faim de son amour, de sa miséricorde, de cet amour offert gratuitement, abondamment, sans conditions à tous ceux qui étaient là. Autrement dit, la multiplication de ces pains, cela signifie pour nous, la capacité sans limite de l’amour de Dieu pour chacun et chacune d’entre nous. Qui que nous soyons, quelle que la situation dans laquelle on se trouve, aujourd'hui, hier ou demain, Dieu nous aime et Il nous aime en abondance. Nous fêtons aujourd'hui Sainte Marie-Madeleine que l’on qualifie d’égale-aux-apôtres car elle a joué un rôle important, proche du Seigneur, au-delà de ce qui est écrit dans l’Evangile d’ailleurs. Mais il nous est dit aussi qu’elle fut guérie par le Christ de 7 démons, autrement dit de 7 formes de péchés – le chiffre 7 n’étant qu’un chiffre symbolique qui indique « beaucoup, beaucoup de fautes ». Mais Marie-Madeleine, mes amis, c’est nous, c’est nous qui avons besoin de la compassion du Christ, c’est nous qui sommes capables de tomber, de pécher, de nous égarer, de nous tromper, de nous détourner de Dieu à certains moments même  ; oui, Marie-Madeleine c’est nous. Ces hommes et ces femmes au nombre de plus de cinq mille qui étaient autour du Christ, c’est nous, aujourd'hui ; c’est la terre entière aujourd'hui qui attend et qui désire un amour sans fin. Car s’il y a une caractéristique particulière qui touche tous les hommes de la terre, c’est bien ce besoin d’être aimé et ce qui est extraordinaire avec le Christ ce n’est pas uniquement qu’Il nous aime c’est qu’Il nous aime sans aucune condition. Il aime tous les hommes et nous les chrétiens nous devons recevoir ce message d’amour comme un message de salut, un message de vie, un message dynamisant, confortant. Oui, le Seigneur nous aime malgré nos fautes, malgré nos faiblesses, malgré nos chutes. Il nous aime et Il veut nous nourrir de l’essentiel, son amour qui bien sûr se concrétise de manière sacramentelle dans la réception de son Corps et de son Sang qu’Il aura versé pour nous et par amour sur la croix. Et cet amour continue de couler comme un fleuve sans fin. On nous dit que Marie-Madeleine serait celle qui aurait versé, sous la forme d’une onction, un parfum, un nard, une myrrhe sur les pieds du Seigneur, c’est probablement vrai mais ce qui est encore plus extraordinaire c’est que la miséricorde du Christ devienne un baume apaisant, guérissant qu’Il dépose sur nos plaies, toutes les plaies que nous avons créées par nos faiblesses car qui ici est digne – dites-moi – qui sur cette terre est digne ? Personne, absolument personne. C’est pour cette raison que le Seigneur Jésus est venu sur la terre pour nous dire, de manière spécifique, catégorique et éternelle que malgré nos indignités et quelles qu’elles soient nous sommes aimés, que nous fautes Il les a jetées derrière sa croix une fois pour toutes. Bien sûr nous commettons encore des fautes et nous en commettrons d’autres bien évidemment puisque nous sommes, d’une part avec une nature déchue et d’autre part avec une faiblesse que nous provoquons nous-mêmes, ce qu’on appelle le péché mais le Seigneur ne s’attarde pas à nos péchés. Il nous demande simplement de nous présenter à Lui tels que nous sommes, de Lui dire : « Je n’ai pas peur que tu me regardes comme je suis. Peut-être que je suis laid, peut-être que je suis blessé, peut-être que je t’ai abandonné mais aujourd'hui je me tourne vers Toi, Toi qui a dit « Venez à moi vous tous qui peinez, frappez et je vous ouvrirai », Toi qui es rempli d’amour, débordant d’amour. C’est un miracle permanent que cette compassion du Christ, cette miséricorde du Christ, cet amour du Christ ; c’est un miracle permanent qui existera jusqu’à la fin des Temps et dont nous aurons le bénéfice éternel et là il n’y aura plus de péché. Alors cela doit réconforter nos cœurs, nous réjouir profondément, nous redonner vie, nous remettre debout dans la lumière de Dieu, nous redonner la force de marcher, d’avancer, de courir vers Lui pour Lui dire : « Oui, oui je suis indigne, pauvre pécheur, mais Toi, Toi tu es miséricorde ». Saint-Silouane de l’Athos nous le dit : « Nos péché sont comme une goutte d’eau dans l’océan de la miséricorde de Dieu ».  Entendons-nous bien cette phrase ? Nos péchés sont comme une goutte d’eau dans l’océan de la miséricorde de Dieu ; l’océan, vous vous rendez compte ? Une goutte d’eau dans l’océan voilà ce que sont nos péchés par rapport à la miséricorde de Dieu.
Alors cette multiplication des pains qui fut réelle, historique, bien sûr, elle va bien au-delà des 5.000 hommes et des 5.000 femmes présents. Cette multiplication d’amour va bien au-delà de ceux qui étaient présents ; cette multiplication touche toute la terre mais attention : nous autres chrétiens, nous en sommes responsables, nous en sommes responsables et, ayant reçu, recevant et nous recevrons encore cette miséricorde du Christ, cet amour du Christ, nous devons aussi offrir cet amour, offrir cette miséricorde à celui et à celle qui nous est proche ou qui nous est lointain ou à celui qu’on éloigne et qu’il faut rapprocher de nous par amour, par miséricorde, par compassion. Voilà je pense ce qu’il est bon de retenir de ce miracle exceptionnel, extraordinaire qui marque nos mémoires mais il faut que nos mémoires soient marquées d’un sceau indélébile et ce sceau s’appelle miséricorde de Dieu.

Amen


Sacrement de pénitence

8/7/2018 Mt IX, 1-8

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Ce miracle que le Seigneur Jésus a accompli auprès de ce paralytique a pour nous une grande signification. En effet, nous constatons ainsi que le Seigneur Jésus peut tout faire ; Il guérit la paralysie physique de cet homme mais aussi il guérit son âme et il insiste en commençant par la guérison de l’âme. Quelques- uns qui sont présents et qui assistent à ce miracle sont scandalisés parce qu'Il annonce à cet homme que ses péchés lui sont remis. Ensuite Il leur prouve par le second miracle – la guérison de ses jambes et de tout son corps – Il leur prouve que, lui aussi, peut remettre les péchés et c’est pour nous une grande consolation : c’est pour nous un repère ; c’est pour nous une assurance. En effet, nous constatons ainsi que le Seigneur peut guérir non seulement nos corps comme Il le fait auprès du paralytique mais aussi nos âmes. Il faut bien reconnaître que, sur cette terre, il y a sans doute beaucoup plus d’âmes paralysées que de corps paralysés. Cela n'exclut pas de prier et de porter auprès du Seigneur par la prière ceux qui souffrent dans leur corps, ceci est de notre responsabilité ; nous le faisons et il faut le faire de tout notre cœur à chaque fois que cela nous est demandé. Mais il faut aussi prier pour que le monde connaisse que le Seigneur est miséricordieux ; c’était la prière de Saint-Silouane : « Que le monde Te connaisse par le Saint Esprit ». Il voulait dire par là : que le monde Te connaisse dans ton infini amour. C’est important – je le disais au début- pour nous qui sommes là comme pour tous les hommes de la terre. Lorsque nous sentons notre âme paralysée par des fautes, par des erreurs, par des faiblesses, par des chutes, il ne faut pas nous tourner vers nous-mêmes ou vers quelque thérapeute humain mais il faut nous tourner vers le Grand Thérapeute, Celui qui nous délivre de cette paralysie de l’âme, le Seigneur Jésus. C’est pour cette raison qu’Il a proposé à ses apôtres d’être son intermédiaire pour accorder le pardon à ceux qui viendraient le chercher ; c’est pour cette raison que le Seigneur nous dit : « Venez à Moi vous tous qui peinez et je vous soulagerai ». Car le péché nous met dans la peine ; il nous met dans un état qui n’est pas notre véritable état. Notre véritable état c’est d’être debout dans la lumière de Dieu or que le péché nous écrase mais, à cause de la Parole du Seigneur, il suffit de se tourner vers Lui, de Lui dire qu’Il peut nous regarder tels que nous sommes, tombés, à terre, dans la chute et que nous serions heureux qu’Il tende sa main et qu’Il nous mette debout à nouveau pour poursuivre notre route ; alors Il le fera sans aucun doute, Il le fera. Nous avons cette chance d’avoir à notre disposition ce sacrement de la confession ou de la pénitence, ce sacrement qui nous apporte une grâce, la grâce de la miséricorde du Christ qui nous aime dans l’état où nous sommes, dans notre paralysie. Nous avons beaucoup de chance d’avoir à notre disposition ce sacrement et il ne faut pas hésiter à l’utiliser à bon escient, à chaque fois que nécessaire. J’ai eu l’occasion dans ma vie de rencontrer plusieurs fois des Protestants ou des Protestantes, des Pasteurs et certains me disaient combien ils considéraient que nous avions vraiment de la chance d’avoir conservé ce sacrement dans notre Eglise car ils souffraient de ne pouvoir sentir sur leur tête la main non pas du prêtre mais la main de Dieu qui apaise, qui donne force et remet debout suite à notre état de paralysie. Alors ne gâchons pas notre vie puisque nous avons à notre disposition la possibilité de sortir de cette paralysie qui nous empêche de vivre. N’ayons pas peur, dans un premier temps, de crier vers le Seigneur pour qu’Il nous applique le baume de sa miséricorde sur les plaies que nous avons causées sur notre être profond. Et puis, dès que l’occasion nous en est donnée, n’hésitons pas à aller, non vers ce qu’on a appelé à tort à une certaine période le tribunal du Christ, ce n’est pas cela le Tribunal du Christ. Lorsque nous venons déposer au pied du Seigneur nos fautes, nous confessons, non pas nos fautes mais sa miséricorde ; nous recevons sa miséricorde. Il ne s’agit donc pas d’un tribunal qui condamne et qui rejette et qui emprisonne. Le véritable tribunal, il aura lieu à la fin de notre vie ; ce ne sera pas non plus un lieu où le Christ nous rejettera ; ce sera le lieu où nous-mêmes nous nous jugerons, où nous-mêmes nous nous sentirons indignes de nous approcher du Seigneur ; et si nous en restons là, à cause de notre orgueil, si nous ne voulons pas accueillir la miséricorde du Christ, alors oui, Il nous laissera dans cet état de paralysie éternelle ; c’est là que se situera le véritable tribunal. Que Dieu fasse qu’il n’y ait personne qui soit rejetée ou plus exactement qui soit dans un état de rejet personnel face à la miséricorde de Dieu.

Amen


Tentation et prière

1/7/2018 Mt VIII, 28 – IX, 1

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
C’est une drôle d’histoire que nous venons d’entendre. En effet, alors que la plupart du temps lorsque Jésus guérit ceux qui se présentent à Lui, tous ceux qui assistent à cette guérison, quelle qu’en soit la forme, en sont heureux, stupéfaits certes, mais ressentent beaucoup de joie face à l’évènement. Or ici, se produit quelque chose d’un peu surprenant puisque, dans ce village des Gadaréniens, les gens qui ont entendu dire que les deux possédés ont été guéris demandent au Seigneur de quitter leur village ; c’est l’inverse qui se produit : non seulement ils ne manifestent pas de joie mais ils demandent à Jésus de quitter le village. On peut être surpris de cette réaction mais il faut comprendre que les Gadaréniens n’étaient pas dans la Tradition juive, la preuve en est qu’ils gardaient des troupeaux de porcs, or chez les Juifs on ne mangeait pas de porc. Alors, bien sûr, les habitants de ce village n’ont vu là qu’un souci matériel de plus peut-être, à savoir que ce troupeau dont ils pensaient tirer profit était perdu. Mais ils n’ont pas vu l’essentiel, ils ont vu le secondaire, ils se sont attachés au « matériel » mais ils n’ont pas compris que Jésus venait de poser un acte extraordinaire, un acte d’amour auprès de ces deux hommes qui étaient possédés à tel point que tout le village en avait peur et qu’on ne savait pas comment faire avec eux. Cela nous ramène à l’action du démon qui est toujours à l’œuvre pour essayer de détruire la Création de Dieu d’une manière ou d’une autre, d’éloigner la créature de son Créateur. Ces hommes qui étaient possédés, violemment possédés, avaient sans aucun doute d’abord été tentés par le démon car tout cela commence par la tentation : « Ne nous laisse pas entrer dans la tentation ». C’est ce que nous demandons au Seigneur lorsque nous récitons le « Notre Père » : « Ne nous laisse pas entrer dans la tentation ». Parce qu'en effet, entrer dans la tentation c’est prendre des risques. Les Pères nous disent qu’une pensée – entendons-là une mauvaise pensée – qui traverse notre esprit n’est pas le péché mais que si nous commençons à nous intéresser à cette pensée mauvaise, à dialoguer avec elle, alors nous entrons dans la tentation. Et entrer dans la tentation c’est entrer dans le péché. Il convient donc d’abord de supplier le Seigneur de nous éviter d’entrer dans la tentation et puis aussi d’œuvrer, en communion avec la grâce de Dieu, pour ne pas laisser cette tentation entrer en nous. Il nous faut pour cela prier beaucoup. On ne sait pas bien ce qui s’est passé chez ces deux Gadaréniens avant de constater combien ils étaient possédés par le démon, rien ne nous est dit à ce sujet mais il est probable qu’ils se sont fait piéger progressivement, qu’ils ont accepté cette tentation et qu’elle s’est développée en eux au point qu’ils n’étaient plus maîtres d’eux-mêmes. C’est le démon qui les gérait, qui les dirigeait, qui les conduisait. Les hommes ne pouvaient plus rien faire pour eux.
Alors pour nous c’est une leçon, une fois encore, que le Seigneur nous adresse au travers de ce miracle. Il peut tout, Il peut tout faire, la preuve. Il peut chasser les démons. Entre parenthèses les démons se sont bien adressé à Lui en tant que Fils de Dieu, ils L’avaient reconnu et, en quelque sorte, ils ont foi en Lui : ils reconnaissent sa Personne divine. Le Seigneur va les chasser. Il peut tout, mais n’attendons pas d’être dans cette situation pour Le supplier. Nous sentons la tentation venir – et elle vient souvent dans nos vies, tous les jours ; oh ce sont souvent des petites tentations : nous sommes fatigués, nous sommes énervés alors nous réagissons et puis la réaction s’amplifie et puis elle se transforme en dispute, en mots plus ou moins violents, plus ou moins blessants et puis cela peut nous mener très loin. Il y a toutes sortes de tentations : la tentation du découragement parce que l’évènement que nous vivons est difficile et que l’on ne croit pas suffisamment en la force du Seigneur pour nous en tirer, nous croyons trop en nous-mêmes ; la tentation de vouloir tout diriger par nous-mêmes, d’être certains de nous-mêmes et puis toutes les autres que nous connaissons vous comme moi. Alors il nous faut, oui, prier beaucoup, pour ne pas entrer dans la tentation. Le Seigneur Jésus Lui-même, à Gethsémani, après avoir demandé à ses disciples de prier, Lui aussi, s’est mis en prière pour ne pas entrer dans la tentation car Il savait que l’évènement qui se présentait à Lui allait être très difficile à vivre, c’était une épreuve, une épreuve sublime, l’épreuve la plus grande, au point que Jésus a demandé au Père que cette coupe s’éloigne de Lui, cette coupe amère qui était la crucifixion. Il s’est repris parce qu'Il priait. On peut être tenté et dire au Seigneur que l’on est tenté, constater que l’on est tenté, qu’on a envie d’entrer dans cette tentation mais dire au Seigneur : « Non, non pas ma volonté mais Ta volonté. Sauve-moi ». C’est la prière qui va nous aider. Si nous chutons, si nous tombons, c’est parce que nous ne prions pas assez. Il ne s’agit pas de dire des prières à longueur de journée, d’ouvrir des livres et lire du début jusqu’à la fin, de connaître le psautier par cœur ou l’Evangile par cœur, toutes ces choses. Ce n’est pas cela la prière. La prière c’est être en relation avec le Seigneur, une relation d’intimité, une relation de personne à personne, une relation unique, privilégiée, qui nous permet justement de pouvoir dire au Seigneur : « Je suis tenté. Viens à mon secours ». Ne pas avoir peur de lui dire : « Je suis tenté mais viens, Toi qui peut tout ». Nous comprenons bien que, sans la prière, rien n’est possible puisque la prière est la mise en relation avec Dieu. C’est pour cela que la prière est importante. Ce n’est pas un devoir, la prière. Quand on est à l’école on nous fait faire des devoirs pour apprendre mais Dieu ne nous nous fait pas faire des devoirs. Il a autre chose à faire. Non, Il nous invite, Il nous invite à être aimé ; Il nous invite à parler avec Lui, dans un cœur à cœur ; Il nous invite à ouvrir notre cœur pour qu’Il vienne loger dans notre cœur par l’Esprit-Saint et qu’ainsi nous puissions être plus forts par sa grâce, ne pas nous faire piéger par le démon qui voudrait nous mener par le bout du nez et qui voudrait surtout nous mener au désespoir, nous enchaîner comme les deux Gadaréniens. L’enchaînement, c’est la passion ; la passion c’est la tentation qui s’est accomplie et qui se répand en nous comme une habitude. Je me souviens que une fois quelqu'un est venu me trouver pour me dire qu’il vivait une certaine passion et cette personne d’ajouter : « Oh, ce sera comme cela jusqu’à la fin ». Ce qui était grave ce n’était pas d’avoir une passion c’était de dire : « Ce sera comme cela jusqu’à la fin », c’était de ne pas croire que le Seigneur pouvait guérir, chasser cette passion, l’apaiser peut-être progressivement et avec amour ; c’était là l’erreur. Alors ayons confiance dans le Seigneur Jésus puisqu’Il peut tout, nous venons de l’entendre. Il a « déchaîné » ceux qui étaient enchaînés. Il a fait beaucoup de miracles et le plus grand miracle c’est que par sa mort et sa Résurrection Il nous sauve.
Amen


Saint Pierre et Saint Paul

29/6/2018 Mt XVI, 13-19 Saint Pierre et Saint Paul

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
L’Eglise aujourd'hui fête Saint Pierre et Saint Paul, les deux grands apôtres que la Tradition appelle les coryphées c'est-à-dire ceux qui dynamisent, ceux qui entraînent, ceux qui sont en avant pour que les autres suivent. Pierre et Paul, chacun à leur manière, sont des saints exceptionnels qui ont marqué toutes l’existence de l’Eglise. Ils ont versé leur sang, l’un comme l’autre, en tant que martyrs à Rome. Et ce qui est intéressant de voir c’est comment leur sainteté a évolué, d’où ils sont partis et comment ils sont arrivés à donner leur vie pour le Christ.
Lorsque le Seigneur Jésus a choisi Pierre, il a choisi un homme simple qui était un pêcheur avec ses frères ; son métier était le métier d’un homme simple – nous dirions aujourd'hui d’un ouvrier. Le Seigneur l’a choisi par élection car Il savait qu’Il pouvait mener progressivement Pierre vers ce qu’il fut à la fin de sa vie et qu’il est toujours. Pierre n’a pas toujours été un homme simple et facile ; il avait un caractère très marqué, très volontaire ; il aimait être reconnu par le Christ mais peut-être d’une manière qui n’était pas tout-à-fait spirituelle. Souvenons-nous de l’épisode où, voyant Jésus marcher sur les eaux, il veut en faire autant mais peut-être par bravoure, peut-être aussi par amour. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que sa foi n’a pas été suffisamment solide et qu’il est tombé dans l’eau ; c’est le Christ qui l’a tiré hors de l’eau. Ceci est très intéressant parce que nous voyons que c’est le Christ qui a tiré Pierre des eaux tourbillonnantes, c’est Lui qui l’a mis debout ; Il lui a fait le reproche de ne pas avoir suffisamment de foi mais c’est Lui qui a continué de l’enseigner, de le guider, de le reprendre à certains moments ; Il lui a dit qu’il serait capable de Le trahir. Mais Pierre avait choisi le Christ, de toutes ses forces, de toute son âme et de tout son cœur. Il avait mis le Christ au centre de sa vie, c’était sa vie.
Pour Saint Paul, l’histoire est un peu différente au départ. Saint Paul est aussi un fougueux, un homme sûr de lui qui commence par persécuter ceux qu’il considère comme membres d’une secte, ceux qui sont en dehors du judaïsme intégral et parfait mais le Seigneur va le rattraper d’une manière certes un peu brutale, catégorique, puisque Paul est terrassé sur le chemin de Damas ; il est aveuglé mais il entend une voix et un dialogue s’instaure à ce moment-là. Il comprend que ceux qu’il persécute c’est Jésus Lui-même et, dans les instants qui suivront, il se fera baptiser. Il deviendra le grand Paul, celui qui, lui aussi, aura choisi le Christ comme centre de sa vie. Il va témoigner, jusqu’à la mort, de l’amour du Christ pour tous les hommes. C’est lui qui va ouvrir même l’Eglise à tous.
Pierre s’occupait tout particulièrement – et ceci est tout-à-fait normal – des Juifs qui l’entouraient pour les convertir au christianisme mais Paul va plus loin ; il va aller au-delà de la conversion du peuple juif ; il va ouvrir cette possibilité de communion à tous les hommes de la terre et il va circuler dans le monde entier pour annoncer le Christ et son amour.
Tous les deux sont de grands saints que l’Eglise aime à prier, à vénérer, à prendre comme intercesseurs. Ce qu’il faut retenir c’est qu’ils étaient comme nous, des pécheurs, capables de jalousie, de trahison et tout ce que nous savons mais, parce qu'ils avaient choisi le Christ comme étant le sens de leur vie, ils sont devenus saints et ils ont accepté de verser leur sang pour le Christ. Ce qui veut dire que, pour nous, qui ne sommes pas meilleurs que Pierre et Paul mais peut-être pas pires, il nous est possible, nous aussi, de marcher sur le chemin de sainteté mais à une condition, une condition indispensable et même peut-être la seule condition : mettre le Christ au centre de notre vie, faire que le Christ soit notre relation privilégiée, régulière, fréquente, aimante, abandonnée. Si le Christ n’est pas le centre de notre vie alors ce n’est pas la peine de s’appeler moine, moniale, chrétien. Non, dans ce cas-là, nous nous égarons. Ce n’est pas la peine d’être exigeants pour ceux qui composent l’Eglise ou pour les autres à plus fortes raisons ; ce n’est pas la peine de critiquer, ce n’est pas la peine de vouloir révolutionner une communauté, une famille, un diocèse, une Eglise si le centre de notre vie n’est pas le Christ Jésus. Tant qu’on n’a pas rencontré le Christ Jésus comme une personne divine qui s’est incarnée pour nous en tant qu’amour pour les personnes que chacun et chacune d’entre nous sommes, si nous n’avons pas compris cela, nous n’avons pas compris la vie chrétienne, mais tout est possible. Peut-être qu’il n’est pas toujours facile de mettre le Christ au centre de notre vie à cause de notre orgueil, de notre vanité, de nos certitudes bien éphémères mais peut-être qu’il faut du temps. A Paul il a fallu du temps et une conversion radicale. A Pierre il a fallu du temps pour comprendre que le Christ était vraiment Dieu et le centre de sa vie. Oui, il faut du temps, de la patience. Justement, Pierre n’avait pas de patience, c’était un fougueux : il voulait tout de suite arriver au résultat, il l’a prouvé à plusieurs reprises. Cela nous montre que la sainteté, comme je vous l’ai souvent dit, n’est pas un état de perfection mais un désir très fort, violent même. Le Christ nous a dit : Le Royaume des Cieux appartiendra au violent (dans le bon sens du terme) , ceux qui mettent toute leur énergie à aller vers le Christ, pour vivre avec Lui, pour se sentir aimé par Lui, par le Père et par l’Esprit.
C’est de cela que Pierre et Paul témoignent pour chacun d’entre nous. C’est pour cela qu’on les appelle les coryphées : dans un corps de ballet, les coryphées sont ceux qui entraînent tout le groupe de danseurs et de danseuses à être ce qu’ils doivent être sur le moment. Ce sont des entraîneurs, des dynamiseurs qui donnent envie d’en faire autant. Alors que Pierre et Paul soient des modèles pour nous. Non pas que nous devions les copier intégralement, cela n’a aucun intérêt mais qu’ils nous donnent cette envie, ce dynamisme, ce goût d’avoir le Christ comme le plus grand ami qui soit sur cette terre, la personne la plus intime avec qui nous pouvons vivre, à qui nous pouvons tout dire, y compris nos bêtises car nous savons que le Christ ne nous rejettera jamais. Il n’a jamais rejeté Pierre. Il n’a jamais rejeté Paul.
Amen

Foi et humilité

24/6/2018 Mt VIII, 5-13 Lc I, 1-25, 57-68, 76, 80 Nativité de Saint Jean-Baptiste

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous fêtons aujourd'hui la Sainte Résurrection du Christ, comme tous les dimanches et également la fête de la Nativité de Saint Jean le Baptiste, le Prophète, le Précurseur du Seigneur, celui qui L’a annoncé, celui qui L’a précédé. Quand il a annoncé le Seigneur, Jean-Baptiste n’a pas fait de grands discours ; il a simplement dit : « Voici l’Agneau de Dieu, Celui qui ôte le péché du monde » puis il a rajouté « Je ne suis pas digne de délier les courroies de ses sandales ». Par ces paroles nous comprenons combien Jean le Baptiste vivait dans l’humilité ; il nous est dit qu’il vivait dans le désert simplement, pauvrement louant Dieu et Le suppliant. Son humilité, effectivement, précède le Seigneur qui lui est l’humilité parfaite.
C’est cette humilité que nous retrouvons dans cette histoire du centurion qui désire voir son serviteur guéri par le Christ. Cet homme était un romain, chef d’armée, occupant, mais, ayant entendu que le Christ était important, faisait des miracles et ayant de la compassion pour son serviteur, il s’adresse à Lui en Lui demandant de le guérir. Le Seigneur lui répond : « Je vais aller le guérir » mais c’est dans la réponse du centurion que nous trouvons, là aussi, l’humilité : « Je ne suis pas digne, je ne suis pas digne que tu entres dans ma maison mais si tu dis une parole mon serviteur sera guéri ». Il y a donc chez ce centurion deux choses : à la fois l’humilité, la grande humilité, et puis la foi. Il explique au Christ comment cela se passe autour de lui, dans son corps d’armée. Et le Christ confirme qu’Il a entendu et vu un homme de grande foi et Il guérit le serviteur.
Humilité et foi. Nous avons reçu la grâce de la foi au moment de notre baptême ; nous avons été plongés dans les eaux comme Jésus par humilité s’est laissé plonger dans les eaux du Jourdain et a été baptisé par Jean que nous fêtons en ce jour. Si nous croyons dans le Christ et que nous n’avons pas d’humilité, en vérité nous ne croyons pas mais si nous avons dans le cœur de l’humilité alors la foi devient active en nous. Elle est en nous, certes, par la grâce, mais elle doit s’activer, grandir et elle grandira par l’humilité, cette vertu qui n’est pas si facile à acquérir. Nous le savons bien, dans notre vie il nous est difficile de vivre dans l’humilité mais demandons-nous cette humilité dans la prière ? Demandons-nous de bénéficier de la grande humilité du Christ dans une prière fervente ? Nous humilions-nous lorsque nous constatons notre faiblesse ? Allons-nous d’abord vers le Christ ou bien vers nous-mêmes ? Si nous allons vers le Christ nous faisons comme le centurion, alors notre foi grandit car nous savons que le Christ peut nous guérir de notre orgueil. Il n’est pas facile de vivre humblement. Le contexte de vie, quel qu’il soit d’ailleurs, monastique ou autre, ne nous porte pas à l’humilité. Et pourtant, le Seigneur dit : « Si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il ne porte pas de fruits ». Autrement dit, il est mort. Accepter, désirer l’humilité doit être quelque chose qui nous donne un dynamisme de vie. Il faut que nous essayions d’être comme ce centurion, d’être comme Jean le Baptiste, Précurseur. Il aurait pu se glorifier puisqu’il était né de manière miraculeuse déjà et qu’il était le cousin du Seigneur. Il aurait pu dire : « Je suis quelqu'un dans ma famille de très grand, je suis quelqu'un de bien, je suis dans une belle lignée, etc. ». Non « Je ne suis pas digne de délier les courroies de ses sandales ». Le centurion aurait ou dire : « Je suis un chef d’armée, je suis gradé, je suis quelqu'un d’important ». Non, il dit : « Je ne suis pas digne que tu viennes dans ma maison mais je crois en ta parole ». Et ceci est important parce que nous pouvons dire nous-mêmes au Seigneur : « Oui, je ne suis pas digne de Toi mais viens pour me guérir ». Les Pères nous ont dit que la sainte communion au Corps et au Sang du Christ était un médicament pour les malades que nous sommes, malades d’orgueil. Lorsque nous nous approchons du calice, nous récitons une très belle prière où nous attestons de notre indignité, que nous sommes pécheurs et même chacun de nous le premier des pécheurs. Le tout est de vivre de cette prière car dire des prières c’est une chose mais si l’on n’en vit pas cela reste des mots vains. Nous avons l’occasion de nous humilier tous les jours dans notre vie, si nous sommes attentifs, absolument tous les jours. Il suffit alors de se souvenir combien le Seigneur nous aime malgré notre faiblesse ; combien, Lui, nous a montré son humilité totale, combien Il s’est abaissé : Il s’est abaissé jusqu’à la mort sur une croix. Il faut saisir les occasions de l’humilité qui nous sont offertes par Dieu, il faut les saisir, les capter, les faire nôtre ; nous en avons la capacité si notre orgueil ne nous aveugle pas. Nous avons spontanément tendance à juger, critiquer, réclamer par rapport à ceux qui nous entourent mais si nous commencions par réclamer quelque chose pour nous ; si nous commencions par dire : « Je ne suis pas digne Seigneur, pardonne-moi, pardonne mon orgueil. Donne-moi de participer à cette humilité que Tu as eue, qu’a eue Jean-Baptiste et le centurion et d’autres ». Saint-Silouane a eu cette prière : « Je voudrais seulement acquérir l’humilité et l’amour du Christ, ne mépriser personne et prier pour tous les hommes comme pour moi-même ». C’est tout simplement, dit d’une autre manière, la prière de Jésus : Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi pécheur.
Amen

La paix

17/6/2018 Mt VI, 22-33

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« Paix à tous ». C’est peut-être par cette phrase que nous pourrions résumer l’Evangile que nous venons d’entendre. « Paix à tous ». Cette paix que nous perdons si facilement et le Seigneur Jésus nous explique, dans cet Evangile, comment nous la perdons. Parce que nous nous inquiétons, nous nous inquiétons de toutes sortes de choses. Il nous faut beaucoup prier et réfléchir sur cet Evangile. La paix intérieure, la paix du cœur dont parle les Pères, est sans aucun doute un des plus grands trésors qui nous soit offert par Dieu. C’est pour cette raison qu’à chaque Office, chaque Liturgie, l’évêque ou le prêtre dit « Paix à tous » ; cette paix qui vient de Dieu, cette paix qui devrait nous être naturelle mais qui, à cause de notre nature déchue, a été atteinte. Quand Adam s’est caché aux yeux de Dieu, au paradis, il était inquiet à cause de sa faute et il avait perdu la paix ; il se cachait. Nous perdons la paix facilement, oh souvent pour des questions matérielles comme cela nous est rapporté dans l’Evangile : une affaire de vêtements, de nourriture. Le Seigneur ne nous dit pas de ne pas nous organiser mais Il nous demande de ne pas être inquiets. Souvent nous perdons la paix, nous sommes inquiets, nous sommes angoissés, nous sommes tristes parce que peut-être nous avons reçu une phrase qui nous a blessés, peut-être que, un frère, une sœur nous a fait une remarque qui nous a déplus, qui a touché notre orgueil et qui nous paraissait injuste et voilà que nous entrons dans l’inquiétude, dans l’angoisse, dans la tristesse mais nous n’avons pas compris qu’il nous faut alors pour trouver et garder la paix aller vers le Christ. Nous n’avons toujours pas compris cela ! C’est si fondamental à la vie chrétienne. A quoi bon entendre « la paix soit avec vous » si nous ne la recevons pas, si nous se sommes pas suffisamment attentifs pour la recevoir, si nous ne sommes pas désireux de la recevoir : « Donne-moi ta paix, Seigneur. Fais-moi partager ta paix ». Moi comme vous il m’arrive de perdre la paix bien sûr, et je sais aussi – et vous le savez – que dès que l’on ressent ce sentiment désagréable, si l’on se tourne vers le Seigneur Jésus et qu’on lui crie « Donne-moi ta pax », alors Il nous la donne mais il nous faut avoir ce reflexe et non pas penser que nous allons, par nous-mêmes, résoudre cette inquiétude, cette angoisse, cette tristesse. Non, ce n’est pas par nous-mêmes et pourtant il y a bien des moyens qui nous sont offert pour, soi-disant, retrouver la paix. Je dis, soi-disant, car ces moyens ne sont quelque fois pas totalement faux mais ne sont pas suffisants. Si nous n’allons pas directement à Celui qui guérit notre cœur meurtri et nous redonne la paix, nous avons beau chercher toutes sortes de solutions nous ne trouverons pas la paix, la paix profonde, celle qui nous fait vivre, celle qui nous fait respirer, celle qui nous fait rendre grâce à Dieu. Alors, oui, le Seigneur a raison, il suffit de regarder la nature. En ce moment, elle est belle, la nature, mais elle est toujours belle même en hiver ; lorsque la neige recouvre notre terre, tout devient beau, lumineux, pacifiant. Lorsqu'au printemps nous voyons comme maintenant les fleurs qui sortent des herbes, des arbres qui fleurissent, la nature qui verdit, les oiseaux qui chantent ; ils sont tous beaux. Nous avons l’évidence que Dieu veille sur nous et qu’Il peut tout. Alors pourquoi s’inquiéter ? Nous nous inquiétons parce que nous n’avons pas suffisamment de foi, de confiance en Dieu. Nous n’avons pas ce réflexe d’aller vers Lui. Non, on va d’abord aller trouver l’higoumène pour lui demander quelque chose qui nous console. Ce n’est pas l’higoumène qui donne la paix ; ce n’est pas le prêtre qui donne la paix ; ce n’est pas l’évêque qui donne la paix même si nous pouvons être des artisans de paix. C’est Dieu qui donne la paix en utilisant, certes, des éléments humains mais c’est d’abord Dieu qui donne la paix. C’est pour cette raison que le Christ, après sa mort sur la croix, alors qu’Il est ressuscité et qu’Il apparaît aux apôtres - qui étaient inquiets puisqu’ils n’avaient pas suffisamment de foi alors que le Christ leur avait dit : « Je ressusciterai le troisième jour » mais ils étaient inquiets. Probablement que nous l’aurions été, nous aussi dans les mêmes circonstances – donne à ses apôtres cette première Parole « la paix soit avec vous ». Les hommes sont quelque fois terribles sur cette terre ; ils nous font perdre la paix. Ce ne sont pas toujours uniquement ceux qui commettent des violences, des attentats, des meurtres ; c’est quelque fois notre frère ou notre sœur qui nous fait perdre la paix et c’est la même réalité, fondamentalement la même réalité.
Il nous faut avoir un abandon, le plus grand possible, dans l’amour de Dieu. Dieu connait chacun d’entre nous, chaque personne, unique à ses yeux. Il sait quels sont nos besoins, quelles sont nos fragilités, quelles sont nos souffrances, nos angoisses, nos blessures. Il le sait et si nous nous tournons vers Lui, Il offre sa paix. Nous nous blessons même nous-mêmes, par le péché et nous souffrons car le péché n’est jamais agréable ; on en ressent les conséquences : nous perdons la paix. Et pourtant nous avons à notre disposition le moyen immédiat de retrouver la paix : la prière, se tourner vers le Christ, lui dire « Oui, j’ai péché contre le ciel et contre toi » et je viens à Toi qui a dit : « Venez à Moi, vous tous qui peinez et je vous soulagerai ». Voilà ce que le Christ a dit. « Venez à Moi vous tous qui peinez, je vous soulagerai ». Entendons-nous cette Parole ? Vivons-nous de cette Parole. Sommes-nous dynamisés par cette Parole ? Ou bien c’est une Parole pieuse que l’on lit comme on lirait un roman agréable ? Non, il faut que nous soyons conscients de ce que le Christ nous dit. Il faut relire, avec l’intelligence du cœur, les Evangiles, les faire pénétrer notre cœur, que notre cœur soit imbibé de cette certitude : la paix vient de Dieu. Alors oui, si nous accueillons cette paix, si nous la comprenons, c'est-à-dire si nous la prenons avec nous, dans le sens profond du mot comprendre, alors tout change : la vie devient belle, la nuit est éclairée par le soleil, le soleil qui est Dieu dans notre vie. Alors oui, nous pourrons dire : « La paix est avec nous » .
Amen

Esprit Saint

27/5/2018 Jn VII, 37-52 VIII, 12

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Lorsque les hommes cherchent à s’élever par eux-mêmes et pensent qu’ainsi ils obtiendront le bonheur, cela ne mène pas très loin : c’est ce qui arriva lors de la construction de la tour de Babel mais lorsque les hommes font confiance au Christ, à sa Parole et lorsqu' ils accueillent l’Esprit-Saint, alors tout change. Nous l’avons entendu dans « les Actes des Apôtres », ces apôtres qui étaient des hommes simples, comme nous tous, des hommes capables de douter, de pécher, de tomber, de renier mais ces hommes avaient le désir de suivre le Christ et de vivre de sa Parole. Or le Christ vient de nous dire : « De Moi coulera une eau vive ». Cette eau vive, c’est l’Esprit-Saint. C’est l’Esprit-Saint que nous fêtons en ce jour non pas comme un mémorial d’un évènement qui a eu lieu il y a 2000 ans mais comme un évènement qui est toujours actuel car tout ce que nous vivons dans l’Eglise, d’une manière ou d’une autre, est actualisé par l’Esprit-Saint. L’Esprit-Saint rythme, en quelque sorte, par sa présence, la vie de l’humanité entière depuis sa création au moment où il nous est dit qu’il planait sur les eaux. L’Esprit-Saint s’est manifesté au moment où l’Archange Gabriel est apparu à la Mère de Dieu sous la forme d’une nuée. L’Esprit-Saint est apparu sur le Christ Lui-même lorsqu'Il fut baptisé par Jean et voilà qu’aujourd'hui il apparaît sous la forme de langues de feu sur la tête des Saints Apôtres. Oui, l’Esprit-Saint rythme notre vie et l’Esprit-Saint continue de rythmer notre vie : nous l’avons reçu au baptême par la chrismation et lorsque, tout à l’heure, nous prononcerons les paroles de demande pour que l’Esprit-Saint descende sur nous et sur les dons qui sont présentés sur l’autel, le pain et le vin, afin qu’ils deviennent le Corps et le Sang du Christ, l’Esprit-Saint sera encore une fois de plus en action. L’Esprit-Saint est présent en nous, si nous le voulons bien, à chaque instant de notre vie. Nous commençons nos prières par cette prière à l’Esprit-Saint « Roi céleste » parce que sans l’Esprit-Saint il nous est difficile de prier sincèrement avec un cœur purifié car c’est l’Esprit-Saint qui purifie tout notre être et nous avons besoin, sans cesse, d’être purifiés. Nos cœurs sont encombrés de toutes nos faiblesses, de toutes nos misères mais par l’Esprit-Saint, par cette eau vive dont parle le Christ, tout est soudainement purifié. Nous pouvons nous considérer comme des enfants de Dieu ; nous pouvons nous adresser au Père ; nous pouvons nous adresser au Christ et nous pouvons nous adresser à l’Esprit ; nous pouvons nous adresser à la Mère de Dieu, aux Saints et nous pouvons le faire par l’action de l’Esprit-Saint qui ouvre les yeux de notre cœur, qui nous permet d’être dans une relation authentique, qui vient profondément jaillir de nous et qui se tourne vers Dieu-Trinité. Les Pères ont souvent caractérisé la Sainte Trinité comme le lieu d’amour par excellence et effectivement c’est un lieu où mystérieusement bien évidemment les Trois Personnes de la Sainte Trinité communient sans cesse dans l’amour et ce depuis le commencement des temps et nous sommes invités par l’Esprit-Saint à entrer, à pénétrer dans ce mouvement de communion d’amour. Il n’y a pas de vie chrétienne sans communion d’amour et la communion d’amour ne peut se faire que par l’Esprit-Saint. Nous vivons aujourd'hui la grande fête de la venue de l’Esprit-Saint. Nous le prions depuis hier soir pour que cet Esprit-Saint nourrisse nos cœurs, nos âmes, notre être profond, pour que nous laissions de côté tout ce qui nous encombre, tout ce qui est de la nature déchue qui n’est pas la vraie nature avec laquelle Dieu souhaite nous voir vivre. Il faut laisser le vieil homme, comme disent les Pères, comme dit Saint Paul, de côté. Le vieil homme c’est la nature déchue, c’est la nature atteinte par le péché, celui d’Adam et le nôtre également mais par l’Esprit-Saint ce vieil homme, cette nature déchue peuvent être déposés comme quelque chose d’inutile qui ne sert à rien puisque nous savons que l’utile, ce qui va donner un sens à notre vie c’est l’amour de Dieu sur nous obtenu par l’Esprit-Saint. Nous avons cette responsabilité et en même temps cette joie, ce bonheur profond d’accueillir en nous Dieu. Dieu vient en nous par le Saint-Esprit pour que ce pain et ce vin devienne le Corps et le Sang du Christ par l’Esprit-Saint et quand nous communierons au Christ c’est par l’Esprit-Saint que nous communions. Toute notre vie doit être nourrie de ce que l’Esprit-Saint peut faire en nous et Il peut tout faire même l’impossible à nos yeux. Demandons dans une prière humble, simple mais demandons à l’Esprit-Saint de venir habiter en nous, que notre âme progressivement se creuse pour faire un nid à l’Esprit-Saint, pour qu’il se repose et qu’il nous permette ainsi le véritable repos qui n’a de sens que dans l’amour.

Amen

Parole de Dieu

22/5/2018 Jn XVI, 2-13

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
L’Evangile que nous venons d’entendre nous rapporte le discours que tient Jésus à ses apôtres. En fait Il les prépare à recevoir l’Esprit-Saint. Les apôtres sont dans la même disposition que nous : nous sommes aussi dans l’attente de la venue de l’Esprit-Saint et Jésus enseigne à ses apôtres à comprendre que l’Esprit-Saint va venir, d’une part pour les consoler de son départ de la terre mais aussi pour les enseigner. Car si le Seigneur les enseigne à ce moment-là Il leur dit : «  J’ai encore beaucoup d’autres choses à vous dire mais vous ne pouvez les comprendre que lorsque l’Esprit-Saint sera venu sur terre ». Autrement dit pour nous, c’est la même réalité ; il nous faut désirer cet Esprit-Saint pour que nous comprenions comment le Seigneur Jésus s’adresse à nous, comment, au travers de chaque parole de l’Evangile, Il nous dit quelque chose mais quelque chose de particulier, quelque chose qui va toucher notre personne. Pour l’un ce sera une parole particulière, pour l’autre, une autre. La même parole pourra signifier deux choses différentes selon que l’Esprit-Saint inspirera celui ou celle qui reçoit la Parole du Seigneur. C’est pour cette raison que nous avons beaucoup de commentaires de l’Evangile. Les Pères se sont adressés à ceux qui les entouraient, ils s’adressent encore à nous au travers de leurs ouvrages en interprétant les Paroles de Jésus. Les interprétations sont quelque fois un peu différentes, elles ont toujours à peu près le même sens mais, selon les circonstances et selon les personnes qui se trouvaient là, les Pères enseignaient selon l’Esprit-Saint pour que le cœur de chacun s’ouvre à la Parole de Dieu. Alors pour nous c’est la même chose. Lorsque nous écoutons la Parole de Dieu dans nos Offices, d’une manière générale, au travers des psaumes, au travers des textes liturgiques, au travers de l’Epître ou de l’Evangile, nous recevons quelque chose ou plus exactement nous pouvons recevoir quelque chose mais pour ce faire nous devons être attentifs, nous devons avoir un cœur qui est « comme en creux », un cœur qui est prêt à recevoir la Parole qui nous est adressée à ce moment-là par l’Esprit-Saint qui nous éclaire. Il faut avoir l’humilité pour recevoir la Parole de Dieu. Lorsqu'on est sûr de soi-même, l’Esprit-Saint n’a pas son mot à dire. Lorsqu'on a un cœur humble alors l’Esprit-Saint vient nous éclairer par la Parole de Jésus. Nous ne pouvons pas accueillir la Parole de Dieu autrement que par l’humilité du cœur et de l’âme. C’est pour cette raison que le Seigneur a enseigné par Lui-même, par sa vie, à ceux qui l’entouraient, l’humilité. Sa grande humilité dépasse et dépassera toujours la nôtre, c’est évident mais nous devons – comme disait le Bienheureux Père Sophrony – aller puiser dans la grande humilité du Christ pour nous-mêmes en avoir le bénéfice et, ayant reçu ce bénéfice, de l’humilité, alors nous recevrons la Parole de Dieu telle que le Seigneur le souhaite par l’Esprit-Saint.
Amen

Trinité amour du Père

20/5/2018 Jn XVII, 1-13

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans cette belle prière du Christ qui s’adresse à son Père - cette prière que l’on appelle sacerdotale, parce que c’est la prière du Grand Prêtre qu’est le Christ - Il s’adresse au Père pour que ses apôtres en particulier - parce que c’est d’eux dont Il parle - aient la plénitude de sa joie. Quelle est donc cette plénitude de la joie que le Christ ressent ? C’est une joie à double face. C’est d’abord une joie humaine, que ressent le Christ dans sa nature humaine, la nature qu’il a acceptée de prendre sur lui pour nous sauver et sa joie humaine c’est qu’il voit les résultats de ce qu’Il a voulu faire au nom du Père, de l’Esprit.et en son propre nom, à savoir que ses apôtres sont les véritables témoins de l’amour de Dieu. C’est cela sa première joie. Elle est mêlée à une deuxième joie qui est une joie divine mais humaine aussi car Il dit à un moment : « Tout a été accompli. J’ai fait ce que tu m’avais demandé ». Et rappelez-vous, sur la croix, Il dit : « Tout est accompli ». Il a accompli sa mission divine et c’est cela qui est sa joie aussi, joie que partagent le Père et l’Esprit et joie que nous sommes invités, avec les apôtres, à partager, nous aussi. Le Christ précisera : « Ma joie c’est qu’ils te connaissent, Toi, le Père, le vrai Dieu ». Il ne s’agit pas ici de connaître Dieu d’une manière intellectuelle, scientifique, réflexive ; il s’agit de connaître le Père dans l’intimité de la relation avec Lui. C’est cela que le Seigneur a proposé aux hommes de la terre. C’est cela qui fait sa joie. « Qu’ils te connaissent, Toi, le Père ». Vous vous rappelez sans doute que Philippe a posé la question au Christ : « Mais nous n’avons pas vu le Père » et le Christ lui répond : « Qui m’a vu a vu le Père ». Parce qu'il y a une telle intimité entre le Christ et le Père que l’un – qui n’est pas l’autre – reflète l’autre: c’est le mystère de la Sainte Trinité. Trois personnes en un seul Dieu. Une seule divinité, 3 Personnes qui s’aiment et qui nous entraînent à entrer dans cet amour parce que la connaissance du Père, comme la connaissance du Fils, comme la connaissance de l’Esprit-Saint, c’est la connaissance de l’amour du Dieu trine. C’est l’entrée dans cette communion d’amour qui n’a de cesse entre les trois Personnes. C’est un témoignage que le Seigneur Jésus laisse à ses apôtres, c’est son testament en quelque sorte : « … qu’ils connaissent », que nous connaissions le Père. Rappelez-vous, il y a une parabole très importante, très importante qui nous permet d’appréhender ce mystère de la connaissance du Père : c’est la parabole du Fils Prodigue. Ce Père qui accueille le Fils qui s’est éloigné, qui est parti loin, qui a fait de nombreuses bêtises, qui a même abandonné son Père, qui a gaspillé tout ce que le Père lui avait donné mais il revient à cause du souvenir ; il revient vers le Père et là nous avons la possibilité de comprendre dans notre intimité qui est le Père car le Père ouvre ses bras, accueille le Fils Prodigue l’embrasse, ordonne qu’on lui donne la robe blanche, la robe de la fête, qu’on lui mette un anneau au doigt et que l’on festoie. Voilà comment est le Père, voilà comment nous pouvons connaître intimement le Père car nous sommes tous, moi le premier, des fils prodigues, tous, sur cette terre mais ce n’est pas grave, ce n’est pas grave puisque le Père est là avec ses bras, qui nous attend pour nous recevoir, pour nous embrasser, pour nous tenir contre Lui, pour dire au ciel : « Soyons dans la fête, il ou elle est revenu(e) ». Voilà la connaissance du Père, elle est là, elle est résumée dans cette parabole que nous a offerte le Christ. Voilà pourquoi il dit que sa joie est que nous connaissions le Père. C’est extraordinaire. Nous vivons dans un monde qui est difficile – il l’a toujours été et il le sera jusqu’à la fin - mais il y a des moments plus ou moins difficiles. Actuellement c’est difficile : le démon est à l’attaque partout, des gens souffrent terriblement. Alors qu'est-ce qu’on fait avec tout cela ? On désespère ? On pleurniche ? Non, on croit en l’amour du Père miséricordieux qui accueille même ceux qui sont la cause de nos malheurs et de nos souffrances, s’ils le veulent. Voilà comment est la connaissance du Père au travers de ce que nous avons à vivre. Oui, nous vivons des souffrances, tous, à certains moments plus que d’autres ; oui, le monde est dans la souffrance mais nous nous savons, en tant que chrétien, nous avons cette responsabilité de connaître le Père, d’aller vers Lui, pour le monde entier et de plonger dans les bras du Père le monde entier, vous comprenez, le monde entier, plonger dans les bras du Père par nous qui avons cette responsabilité comme les apôtres ont eu cette responsabilité. Voilà comment nous sommes appelés à connaître le Père.
Amen

Ascension

17/5/2018 Mc XVI,9-20 Ascension

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Comme pour toutes les grandes fêtes du Seigneur il y a un enseignement théologique important à recevoir. En cette fête de l’Ascension, autant dans l’Epître que dans l’Evangile, nous recevons de la part du Seigneur un message, un message d’une importance capitale. En effet, lorsque par décision trinitaire, le Seigneur Jésus est venu sur terre et s’est incarné dans le sein de la Mère de Dieu, à ce moment-là, à sa nature divine s’est ajoutée la nature humaine. Il y a eu comme une compénétration des deux natures en une seule personne. Au moment où le Seigneur Jésus quitte ses apôtres, ils auraient dû ressentir une certaine tristesse car lorsque l’on perd, lorsque l’on quitte quelqu'un que l’on aime bien, on est toujours un peu triste mais l’enseignement du Seigneur, les paroles qu’Il offre à ses apôtres font qu’ils repartirent à Jérusalem dans la joie et qu’ils y restèrent ainsi. Pourquoi ? Pour deux raisons : la première raison, le Seigneur la donne : Je vais vous envoyer l’Esprit-Saint, l’Esprit-Saint qui vous donnera force et qui vous permettra de vivre en plénitude tout l’enseignement que je vous ai offert mais il y a quelque chose d’autre, qui n’est pas formulé mais qui est bien exprimé dans l’Evangile. Nous avons bien entendu tout à l’heure que le Seigneur apparaît à ses disciples et leur dit : « Regardez-moi bien, touchez-moi, c’est mon corps. Regardez mes plaies, ce sont les plaies de la crucifixion. Et puis donnez-moi à manger comme vous vous mangez ». Là Il leur précise bien qu’il est bien de la nature humaine et que cette nature humaine s’ajoutant à la nature divine devient pour nous comme un trésor car lorsque le Seigneur Jésus s’élève vers les cieux, vers le Père, vers l’Esprit, Il s’élève avec nous, avec notre nature humaine et il arrive auprès du Père et de l’Esprit avec les deux natures qui ne le quitteront pas : la nature divine qui ne l’a jamais quitté et la nature humaine que par humilité et par amour Il a accepté de prendre en Lui. C’est pour cela que je disais au tout début que cet évènement a un caractère théologique très fort parce que c’est à partir de la compénétration de ces deux natures que nous avons accès à la divinité, je dirai même plus, en répétant ce qu’on dit nos Pères, à la divinisation ; non pas que nous remplacions Dieu, il n’en est pas question mais nous participons à la vie de Dieu. C’est quelque chose d’extraordinaire qui dépasse évidemment tout notre entendement, toute notre raison mais le Seigneur l’a dit : si le Seigneur l’a dit c’est que c’est vrai, c’est authentique et c’est avec cela que nous devons vivre. Dans notre nature humaine nous avons bien du mal à vivre. Il y a des moments d’épreuve, des moments difficiles, des moments de découragement, des moments d’épuisement, toutes sortes de choses qui nous arrivent, qui nous blessent, qui nous font mal. Le Seigneur Jésus a partagé tout cela : à certains moments Il a eu faim, Il a eu soif. Il a même été tenté par le démon, comme nous et puis Il a été crucifié pour nous, Il a accepté la mort pour nous, le tombeau, pour nous et la Résurrection pour nous. Ce partage d’amour, c’est un testament qui nous est donné, un testament indélébile : personne ne pourra nous retirer l’amour de Dieu. On peut tout nous retirer : la vie, oui, mais l’amour de Dieu, jamais. Personne ne pourra nous le retirer. C’est cela que nous vivons aujourd'hui, concrètement, au travers de cet évènement de l’Ascension du Christ. C’est Lui qui mène cette Ascension en tête, c’est Lui qui nous entraîne à cette Ascension, tous, non seulement nous les Chrétiens mais tous les hommes de a terre de bonne volonté. Si nous les chrétiens, nous sommes responsables de notre christianisme, tous les hommes alors sont tirés, sont « acsensionnés ». C’est une grâce particulière, spécifique, unique. C’est la grâce de l’amour de Dieu
Amen

Samaritaine

6/5/2018 Jn IV, 5-42 Dimanche de la Samaritaine

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« Si tu savais le don de Dieu », cette petite phrase que le Seigneur Jésus adresse à la Samaritaine, il nous l’adresse aussi à nous, bien évidemment puisque la Parole de Dieu est toujours d’actualité. « Si tu savais la don de Dieu … ». Mais quel est donc ce don de Dieu ? Ce récit que nous avons entendu précise que c’était à la sixième heure que Jésus était près du puits et qu’il demanda à la femme : « J’ai soif, donne-moi à boire ». C’est aussi sur la croix, à la sixième heure, que le Seigneur Jésus dit : « J’ai soif ». De quoi donc le Seigneur a-t-Il soif ? Il a soif que nous nous tournions vers Lui pour recevoir tout l’amour de Dieu par son Esprit-Saint. « J’ai soif ». Et c’est là le don de Dieu. Dieu a soif. Il a soif de nous voir nous tourner vers Lui et de Lui dire : « Donne-moi à boire. Donne-moi de ton amour ». C’est ce qui est fondamental pour la vie chrétienne. « Si tu savais le don de Dieu ». Nous avons reçu, par le baptême, le don de Dieu. Nous avons reçu, par la Sainte Communion, que nous recevons régulièrement le don de Dieu. Et nous chantons à la fin de la Liturgie : nous avons vu la vraie Lumière, nous avons reçu l’Esprit céleste, le don de Dieu, l’amour. C’est cet amour que la Samaritaine a reçu car elle n’a pas été rejetée, méprisée mais accueillie par le Christ. Elle a reçu l’amour du Christ. C’est pour cette raison qu’elle a pu lui dire avec simplicité quelle était donc sa vie, une vie que nous pourrions aujourd'hui cataloguée de dissolue mais là n’était pas le problème : il fallait qu’elle entende de la part du Christ qu’Il l’aimait, qu’Il l’aimait comme elle était. Non sans humour le Christ lui pose la question : « Va chercher ton mari », Il savait bien qu’elle avait plusieurs maris ou qu’elle en avait eu plusieurs mais Il veut ainsi qu’elle-même, devant Lui, dise : « Je n’ai pas de maris », ce qui était vrai, elle n’avait pas de vari mari. Et le Christ confirme : « Tu as raison, tu as bien dit ». Autrement dit par l’amour du Christ elle peut se révéler dans sa faiblesse, dans sa misère, dans sa pauvreté. Le Christ l’accueille dans sa misère, dans sa faiblesse, dans sa pauvreté. Et progressivement, Il va lui faire comprendre quel est le don de Dieu. Ce n’est pas d’adorer ici ou là, ceci est secondaire, c’est de recevoir l’amour de Dieu. Si tu savais le don de Dieu. Alors pour nous aujourd'hui comment cet épisode peut-il résonner dans notre cœur ? Connaissons-nous le don de Dieu ? Probablement, au moins un peu. Mais le connaissons-nous dans le sens profond du terme : connaître c’est être intimement lié à l’autre ? Connaissons-nous dans l’intimité le don de Dieu, gardons-nous dans l’intimité le trésor qui nous est offert, le don de Dieu, l’amour de Dieu ? Alors que nous sommes pauvres, pécheurs, tous. Il n’y a pas d’hommes qui vivent et ne pèchent pas, dit-on dans l’Office des Défunts. Oui, si tu savais le don de Dieu. Est-ce que nous connaissons le don de Dieu, profondément ? Est-ce que nous en vivons ? Car c’est là toute la question. Et comment en vivre, c’est la problématique ? Et bien en faisant comme la Samaritaine : en laissant notre cruche sur le bord du puits, notre cruche qui est remplie ou vide. Si elle est remplie, elle est remplie de nos certitudes, de nos évidences personnelles et pire encore, de nos capacités d’écraser l’autre par ce que nous savons mais qu'est-ce que nous savons ? Il n’y a rien dans cette cruche, elle est vide alors il faut la laisser sur le bord du puits et puis recevoir, recevoir l’eau vive qui est le Christ. Il l’a dit : « Je suis l’eau vive ». Recevoir le Christ cela s’apprend toute la vie. Ce n’est pas maintenant pendant que je parle ou dans quelques instants ou après la Liturgie que nous pourrons dire : « Oui, ca y est, c’est fait. Je L’ai rencontré et c’est définitif », non, il faut toute la vie pour recevoir le don de Dieu pour apprendre à le recevoir, pour désirer le recevoir, qui que nous soyons : moines, moniales, laïcs, dans la ville, dans la famille, dans la société. Nous sommes tous appelés à recevoir le don de Dieu. Si tu savais le don de Dieu. L’homme croit savoir beaucoup de choses et il en croit certaines à juste titre par son intelligence donnée par Dieu mais est-ce que l’homme connait le fondamental, l’essentiel, le vital qui dynamise, qui donne un sens à la vie, ce sens de la vie qui aujourd'hui est très atteint, peut-être l’était-il depuis le commencement des siècles. Et le Christ nous le donne par cette interrogation : « Si tu savais le don de Dieu … », ce don c’est l’amour pour chacun, pas uniquement pour les chrétiens, bien sûr pour les chrétiens, mais pour tout le monde, pour le monde entier. Ce don que nous recevons en tant que chrétiens au moment du baptême, nous en sommes responsables, nous n’avons pas à en tirer un titre de gloire mais une responsabilité, une responsabilité de vie pour l’humanité entière, pour le salut du monde, pour que le monde entende cette parole d’une manière ou d’une autre. Si tu savais le don de Dieu. Alors, comment faire, comment être, comme cette femme, témoin de l’amour du Christ ? En en vivant, en cherchant à vivre de l’amour du Christ, tous les jours. Il faut recommencer tous les jours, à tous les instants car nous perdons facilement le trésor que nous avons reçu et nous pouvons le retrouver, ce n’est jamais perdu si nous désirons garder, retrouver et garder à nouveau ce don de Dieu. Si tu savais le don de Dieu.

Amen

Sainteté

10/6/2018 Mt IV, 25 - V, 12

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Aujourd'hui, dans la suite de la fête de tous les Saints que nous avons fêtés dimanche dernier, nous fêtons les Saints plus particuliers de la terre de France et de la terre de Russie. Nous avons lu tout de suite l’Evangile où le Seigneur Jésus appelle ses premiers apôtres. A quoi les appelle-t-il ? Il les appelle à Le suivre : « Venez, suivez-Moi » leur dit-il de manière assez immédiate. Et ils le suivirent. Il me semble qu’entre cet Evangile et la fête des Saints de France et de Russie il y a un pont, un lien. En effet, on ne peut être sur le chemin de la sainteté sans avoir été fondamentalement suscités par le Christ. C’est le Seigneur Jésus qui suscité la sainteté, sainteté à laquelle nous sommes tous appelés à partir du moment où nous avons été baptisés. Nous avons reçu la capacité de la sainteté. Bien sûr, la sainteté n’est pas un état de perfection totale, la sainteté c’est plutôt un désir profond, un désir dynamique de se rapprocher le plus possible de Dieu, de vivre le plus possible selon les commandements du Christ. C’est cela le chemin de sainteté. Et nous y sommes tous appelés. Cela ne veut pas dire que nous serons un jour sur un icône, canonisés. Non, tous les Saints ne sont pas sur les icônes ; tous les Saints ne sont pas canonisés ; il y en a beaucoup plus que sur nos icônes. Il y a tous ceux qui, appelés par le Seigneur d’une manière ou d’une autre, ayant été captés par la grâce, ont tenté, dans le désir et dans l’accomplissement de ce désir, progressivement, de devenir les plus proches du Seigneur. Ce que nous avons à vivre, nous le savons bien, c’est d’aimer. Aimer Dieu et aimer nos frères, ceux qui nous entourent. Ce sont les commandements du Christ. C’est ce que le Seigneur Jésus essayera d’expliquer non sans mal à certains moments à ses apôtres. Ils ne seront pas parfaits et justement c’est cela qui est intéressant parce que nous avons là l’évidence que la sainteté n’est pas la perfection au sens humain où nous l’entendons mais quelque chose d’autre. En effet, si nous regardons rapidement comment les apôtres se sont comportés, on voit bien qu’ils se sont comportés à peu près comme nous et pourtant ils étaient avec le Seigneur : ils le voyaient, ils L’entendaient, ils mangeaient avec Lui mais ils étaient comme nous avec une nature déchue et avec des faiblesses. Rappelez-vous les frères, enfants de Zébédée, se sont disputés pour savoir qui serait le premier, le plus proche auprès du Seigneur dans l’éternité. Pierre a trahi le Seigneur par trois fois alors qu’il avait été averti de cette trahison. Et d’ailleurs tous ont abandonné le Christ a Gethsémani. Cela est quelque part consolant pour nous parce que nous voyons que même si nous avons des moments de faiblesse, de chute, de péché même, il est possible d’avancer sur ce chemin de sainteté. Le Seigneur Jésus a dit à un moment à Pierre : « Retire-toi de moi, satan », il a été jusque là. Et pourtant ce n’est pas Pierre c’est Saint Pierre. Plus tard, Paul, qui n’a pas été parmi les apôtres de la communauté primitive était quelqu'un qui pourchassait les chrétiens et pourtant Dieu lui a fait signe. Certes d’une manière magistrale mais Paul est entré dans le retournement, dans la conversion. Nous avons, à la suite de tous ces exemples à essayer d’entrer dans la conversion, non pas de se convertir à une Eglise – on ne se convertit pas à l’Eglise, on se convertit au Christ. Mais pour ce faire il nous faut prendre des moyens et si nous regardons quelques Saints, nous en avons sorti quelques reliques ce matin, si nous regardons par exemple Saint Séraphim de Sarov ou Saint Martin de Tours, un Saint russe et un Saint français, qu’ont-ils de particulier qui nous attache à eux ? C’est leur humilité. Saint Seraphim de Sarov a été un homme remarquablement humble, certes un homme de prière, un homme qui cherchait tous les jours à s’approcher le plus possible du Seigneur avec les larmes et avec de longues prières qui jaillissaient de son cœur et cela a entraîné une grande humilité. Quand on voit son icône, on a tout compris : on voit un homme qui ne se redresse pas par l’orgueil et qui baisse la tête humblement. Saint Martin de Tours, dans un autre style, est aussi marqué par une grande humilité. Ce n’est pas lui qui s’est proposé pour être évêque, on l’a arraché à sa vie pour qu’il devienne évêque, de force. Il a accepté malgré les critiques des autres évêques qui le jugeaient pas suffisamment bien habillé pour être évêque comme si c’était cela l’important pour être évêque, comme si c’était important d’être bien habillé pour être un saint. Ce n’est pas cela l’humilité, ce n’est pas cela la sainteté. Saint Martin, tout en étant évêque, a continué d’être le moine qu’il était, l’humble moine qu’il était : il se cachait dans des grottes avec quelques compagnons. Il a continué de vivre sa vie ascétique dans la prière, dans les larmes et dans l’humilité.
Alors pour nous, pour nous qui sommes appelés à être des saints, il nous faut mettre le pied sur ce chemin de sainteté, tous les jours, au travers des occasions qui nous sont offertes, au travers de l’appel que le Christ nous lance comme il l’a fait à ses apôtres : « Viens et suis-Moi ». Le Grand Humble c’est le Christ. Il nous faut aller plonger dans la grande humanité du Christ pour essayer d’être humbles. Il nous faut saisir les occasions où l’on est peut-être critiqué, bafoué, méprisé ou peut-être tout simplement que l’on se constate comme étant pécheur, pauvre. Il faut accepter d’être regardé par le Christ, oui, d’être regardé par Lui, par ce regard d’amour qui transforme tout. Si nous acceptons d’être regardés par Lui, dans l’état où nous sommes, dans la situation où nous nous retrouvons, même si nous avons grandement péché. Si nous nous laissons regardés par la miséricorde du Christ, alors nous sommes sur le chemin de la sainteté. Amen

Paralytique compassion

29/4/2018 Jn V, 1-15 Dimanche du paralytique

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Lorsqu' Jésus s’approche de ce paralytique il faut remarquer que celui-ci ne Lui a rien demandé ; c’est Jésus Lui-même qui prend l’initiative en lui posant cette question : « Veux-tu être guéri ? », veux-tu ? Cela signifie que le Seigneur nous veut libre, ne nous force pas à être guéri. Nous sommes tous malades ; nous sommes tous paralysés d’une certaine façon : notre âme et notre cœur sont atteints par notre faiblesse, notre nature déchue et par tout ce que nous commettons volontairement ou involontairement et qui va contre les commandements du Christ. Et le Seigneur – très souvent et beaucoup plus souvent qu’on ne le croie - s’adresse à nous et nous dit : « Veux-tu être guéri ? » Le paralytique ne Lui répond pas directement mais il explique que oui, il voudrait bien être guéri mais il n’arrive pas dans l’eau suffisamment à temps. Pour nous c’est un peu la même chose : nous pourrions dire au Seigneur « Oui, je veux bien être guéri mais je n’y arrive pas, je n’y arrive pas tout seul », parce que c’était là la question ; cet homme n’arrivait pas à être guéri tout seul : il n’avait pas la force, son corps ne le suivait pas et il n’était pas guéri. Mais c’est Jésus qui le guérit ; c’est Jésus qui a de la compassion pour lui, une compassion à la fois pour sa maladie invalidante mais aussi pour autre chose qui n’apparait qu’à la fin du récit et peut-être que nous n’y faisons peut-être pas suffisamment attention. Le Seigneur Jésus lui demande si tout va bien, s’il est guéri et Il lui dit : « Va et ne pèche plus ». Cet homme était un pécheur, bien sûr, comme tous les hommes de la terre, c’était un pécheur qui péchait plus conséquemment que les autres - ce n’est pas dit - mais pour que le Seigneur lui dise : « Va et ne pèche plus » et il ajoute « il pourrait t’arriver des choses plus graves que celles qui te sont arrivées », c'est-à-dire, non pas la paralysie physique mais la paralysie de l’âme et du cœur. « Va et ne pèche plus ». Mais c’est par compassion que le Seigneur dit cela au paralytique, ce n’est pas une leçon de morale : le Christ n’a jamais donné de leçon de morale ; la morale n’est pas une affaire spirituelle même si, de temps en temps dans l’Eglise, on trouve des moralistes, plus exactement des moralisateurs. Non, le Christ n’est pas quelqu'un qui fait la morale, c’est quelqu'un qui compatit à la souffrance de l’homme, à notre souffrance. Et cela veut dire aussi que nous pouvons être certains que le Seigneur – comme je vous le disais au début – assez souvent nous dit : « Veux-tu être guéri ? » Alors bien sûr à nous de répondre puisque nous sommes libres de répondre oui ou non. Et puis il y a une autre leçon, une leçon qui est en quelque sorte la conséquence de ce récit pour chacun d’entre nous. Avoir de la compassion comme le Christ en a eu envers cet homme. Avoir de la compassion envers nos frères et nos sœurs qui quelque fois se présentent avec des faiblesses, non pas des faiblesses physiques mais des faiblesses d’ordre spirituel, des péchés pour résumer. Souvent notre premier réflexe est de juger, de rejeter, de mépriser ou de critiquer et là nous nous égarons totalement. Le Seigneur Jésus ne critique pas cet homme, Il le guérit. Il le guérit comment ? Par son amour. Alors nous nous sommes confrontés dans notre monastère à des frères ou à des sœurs qui ne sont pas parfaits - c’est la même chose d’ailleurs dans une famille ou dans une société. Il est évident que si l’on vit dans un lieu comme celui-ci, en vase clos, comme dans un laboratoire, tout est observable, alors on voit, on voit un frère qui tombe, une sœur qui tombe. On subit le caractère qui n’est pas celui que l’on souhaiterait de celui ou celle qui est en face de nous. On subit la douleur de la faute. On subit le mauvais caractère, l’agressivité, la bêtise, les réflexes idiots. Tout cela on le subit bien sûr mais si on ne fait que le subir en rejetant, en critiquant, en parlant car souvent les moines ont des langues qui ressemblent à des escalators, cela descend et cela remonte très vite. Si nous agissons ainsi nous nous trompons. Nous ne suivons pas le Christ, nous suivons notre maladie. Nous restons dans notre maladie, cette maladie terrible qu’est la critique, le jugement, le mépris, comme si nous étions meilleurs que l’autre parce que c’est cela que l’on pense : moi je suis meilleur, je ne fais pas ca, moi je ne dis pas ca, je ne me comporte pas comme cela, non, non. Moi je suis un bon moine ou une bonne moniale. Et le chrétien doit se dire la même chose à certains moments. Je suis chrétien : je suis meilleur que celui-ci ou celui-là, dans ma famille, au travail, dans la société. Quelles bêtises ! Quel temps perdu alors que le Seigneur est là et dis à chacun d’entre nous : « Veux-tu être guéri ? » C’est cela qui est important. Si on n’a pas compris cela on n’a rien compris au christianisme, rien, absolument rien du tout, et que l’on soit habillé de noir avec des fichus sur la tête ou des barbes longues, cela ne change rien. On n’a rien compris. Alors la véritable leçon nous devons l’entendre et l’accueillir mais pour nous, pour moi-même en tant que personne. Comment je vis la compassion ? Comment je vis l’accueil de l’autre car le Christ a accueilli cet homme qui était paralysé de corps et d’âme puisqu’il lui dit : « Va et ne pèche plus » et on entendra cette phrase à plusieurs reprises dans l’Evangile. Puisque nous avons choisi en tant que baptisé et puis au travers d’un appel particulier pour les moines de lui répondre oui à cet appel. Qu'est-ce que l’on fait de cet appel ? On le piétine quand un agit ainsi. On le rejette. On devient indigne. Alors ces paroles peuvent sembler terribles mais elles nous permettent de nous réveiller car lorsque le Christ nous guérit, Il nous invite à nous réveiller. Lorsque le Christ nous empêche de porter des jugements, de critiquer, de parler sur les fautes des autres, alors Il nous guérit. Il nous invite à sa suite à vivre dans la compassion, le non-jugement, l’amour de l’autre puisque nous savons que nous sommes aimés nous-mêmes malgré nos turpitudes, nos échecs, nos chutes, puisqu’à certains moments nous avons reçu cette grâce de l’amour du Christ qui se pose sur nous comme un baume apaisant sur les plaies pour nous dire qu’Il nous aime même si l’on est par terre alors pourquoi, pourquoi écraser notre frère, notre sœur parce qu'elle est par terre … parce que nous sommes faibles mais il y a une solution, la seule solution : c’est le Christ et c’est la supplication que nous devons faire au Christ : « Empêche-moi d’avoir une âme paralysée par la critique et le rejet, le non-amour et, en définitive, l’orgueil qui gère tout cela. Empêche-moi ». Le Saint Père Sophrony disait très souvent – je l’ai entendu – que, peut-être la prière la plus importante que nous avions à dire chaque jour, c’était celle que nous récitons – mais réciter ce n’est pas forcément prier, il faut que le cœur s’y mette : « Daigne Seigneur nous garder ce jour sans péché ». Si nous formulons cette prière avec le cœur, pas avec l’intelligence, pas par habitude mais avec un cœur contrit, humilié et humble : « Daigne Seigneur nous garder ce jour sans péché ». Alors oui nous serions sur le chemin de la guérison par le Christ. Alors oui nous regarderions notre frère ou notre sœur autrement. Alors oui nous aurions, comme le Christ, la possibilité de verser le baume de l’amour sur les plaies de la sœur ou du frère.
C’est cela la leçon qui nous est offerte aujourd'hui par le Christ Jésus. Tout l’Evangile nous rapporte des évènements comme celui que nous avons entendu : la compassion du Christ nous est offerte en permanence et nou,s que faisons-nous de la compassion ?
Amen

Rameaux Royaume de Dieu

1/4/2018 Jn XII, 1-18 Dimanche des Rameaux

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Ce que nous célébrons dans chaque eucharistie, surtout le dimanche, nous allons le célébrer durant toute la semaine : la grande semaine où Jésus a accompli, une fois pour toutes, l’évènement du salut du monde, l’évènement qui retourne toute notre histoire humaine de la mort vers la vie. Quel est donc cet évènement, ce mystère d’amour qui nous dépasse, que Jésus nous demande de vivre avec lui durant ces jours ? En ce premier jour de la semaine ses disciples pensent que le Fils de David entre à Jérusalem pour devenir roi. En réalité, à travers l’image de Jérusalem, le Fils de Dieu devenu mortel comme nous, marche devant nous pour nous ouvrir les portes du Royaume de notre Père. Jésus nous précède et nous entraîne pour faire partager à tous les humains, tous les humains, la communion d’amour de la Très Sainte Trinité. Cet amour sera notre Royaume, là enfin, tous les enfants du Père pourront être réconciliés. Alors que notre histoire, toute histoire depuis celle d’une famille jusqu’à celle d’un groupe, d’un monastère, d’une paroisse, de l’humanité entière est celle de l’incommunicabilité entre les personnes qui se côtoient, se heurtent mais ne se rencontrent pas dans ce qu’elles sont et seront éternellement. Ce drame est en nous, en chacun de nous. C’est cela que Jésus vient sauver. Alors que nous allons vers la mort, nous pourrons, dans son Royaume, être enfin réconciliés, ne plus vivre repliés sur notre égoïsme, sur notre personnage mais vivre pour notre Père et pour les autres, comme Jésus est totalement vers le Père et vers nous, comme l’Esprit-Saint est avec nous pour nous unir à Jésus et au Père. Voilà le Royaume de la Vérité auquel Jésus est venu rendre témoignage en étant vrai, vrai dans son humanité. Dieu seul est humain. Laissons de côté l’aspect folklorique de ce dimanche et laissons-nous saisir par sa réalité mystérieuse : Jésus, le Fils bien-aimé, Fils éternel du Père et fils de la Vierge, Lui le seul vrai Roi, Lui qui va faire l’unité de tous les enfants de Dieu, comment entre-t-il dans le Royaume ? On l’a chanté tout à l’heure : monté sur le petit d’une ânesse. Quelle stupidité pour les grands de ce monde mais quelle vérité révélatrice de notre roi. Il n’y a en Lui aucune domination, il n’y a en Lui aucune domination. Alors que depuis notre enfance, nous cherchons à nous imposer, à dominer, Lui, notre Seigneur et notre Dieu se fait le serviteur de tous. Il est humble, c'est-à-dire qu’il est vrai car il n’y a aucune violence en Dieu, tandis que nous sommes habités par la violence, même à l’égard de nous-mêmes. La vérité de l’amour ne s’impose pas de l’extérieur, par des lois mais elle est accueillie parce qu'elle est désirable. C’est ainsi qu’elle libère au lieu d’assujettir. Dans le Royaume de notre Père, il n’y a pas de sujets mais des êtres libérés dans le Fils. Dans le Royaume qui vient c’est par l’humilité du serviteur que tous les humains, surtout les plus pauvres et les plus démunis sont enfin respectés. Il est infini le respect de Dieu pour chaque personne humaine. En ce jour nous ne pouvons comprendre la douceur de notre Roi que si nous consentons à partager, un peu, son humilité. C’est pourquoi, à Jérusalem, ce sont les enfants qui L’acclament dans le Temple car c’est par la bouche des tout petits que notre Dieu se ménage une louange. A la lumière de ce jour une autre parole de Jésus apparaît dans sa vérité saisissante : « Si vous ne retournez à l’état des enfants, vous ne pourrez entrer dans le Royaume des Cieux ».
Amen

Annonciation

25/3/2018 Fête de l’Annonciation Lc I, 24-38

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« Dieu, toi mon Dieu, je Te cherche dès l’aurore, mon âme a soif de Toi. Après Toi languit ma chair, terre sèche, altérée, sans eau ». Ce début de psaume que nous connaissons bien, c’est le cri d’Adam et de tous ceux qui ont succédé jusqu’à ce moment qui vient de nous être rappelé. Oui, Adam cherchait Celui qu’il avait perdu par sa faute. Et le Seigneur – cela nous est dit dans la Sainte Liturgie – lorsqu'Il mit Adam hors du paradis ce n’était pas, comme on peut peut-être le concevoir, comme une punition, c’était pour lui redonner le désir de Dieu. Ce désir de Dieu il s’est accompli parfaitement dans la Vierge Marie, cette jeune fille consacrée au temple depuis longtemps. Il nous est dit ailleurs qu’elle gardait toutes ces choses dans son cœur, son cœur de désir, son cœur de désir de Dieu. En répondant à l’ange : « Qu’il me soit fait selon ta parole. Je suis la servante du Seigneur », en répondant ainsi, elle manifestait qu’elle avait le cœur totalement pur, un cœur de désir, animé uniquement du désir de Dieu. « Aujourd'hui l’aurore de notre salut s’annonce ». Nous avons chanté ce tropaire, mais comprenons-nous bien le premier mot : aujourd'hui ? Car ce que nous fêtons maintenant, ce n’est pas une histoire qui date de 2.000 ans, c’est la fête aujourd'hui puisqu’aujourd'hui notre salut commence et cet aujourd'hui est un aujourd'hui permanent, c'est-à-dire que c’est aujourd'hui mais ce sera demain et encore demain et après-demain si nous avons le désir de cet aujourd'hui, le désir de cette visite de Dieu, le désir d’être sauvé. Dieu Lui n’avait que ce seul désir : créer l’homme pour sa plus grande joie et la joie de l’homme. C’est pour cette raison qu’il a mis Adam hors du paradis pour lui donner ce désir qu’il avait perdu. Alors pour nous, cette fête, cette grande fête qui, par chance, se trouve toujours dans la période du carême, vient nous donner un espoir extraordinaire, l’espoir du salut, l’espoir d’être sauvé aujourd'hui. Aujourd'hui notre salut commence et demain, si nous voulons, nous pourrons redire la même chose. L’aujourd'hui de Dieu est permanent. Nous, nous sommes dans un temps comptabilisé humainement mais Dieu n’est pas de ce temps, Dieu est hors du temps. Son temps c’est l’aujourd'hui de sa présence en nous, pour nous, pour l’humanité entière. Alors en tant que chrétien, notre responsabilité est d’accueillir cette visite de l’ange Gabriel à Marie, d’accueillir la réponse de Marie comme étant la nôtre : « Qu’il me soit fait selon Ta Parole. Je suis la servante du Seigneur ». Car Marie était bien l’une d’entre nous. Sa particularité était d’avoir ce désir de Dieu depuis le début de sa vie et rien d’autre. Certes elle a été provoquée probablement par des tentations mais elle n’est pas tombée car son désir était trop fort alors pour nous qui vivons dans ce temps, ce temps qui quelque fois est un temps de misère, de douleurs, d’épreuves, de souffrances, nous pouvons nous assimiler à Marie qui reçoit le cadeau de Dieu pour l’humanité entière et puisqu’elle nous est offerte par Dieu, gratuitement, qu’elle peut devenir une intercession permanente pour nous, elle devient une étoile, une étoile qui brille dans le ciel, toujours, et lorsque nous sentons l’épreuve arriver alors tournons-nous vers l’étoile et demandons à Marie qu’elle fasse grandir en nous ce désir.

Amen

Foi Esprit - Saint

18/3/2018 Dimanche de Saint Jean Climaque Mc IX, 17-31

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Le Seigneur Jésus, en guérissant cet enfant, nous donne aussi une grande leçon, une double leçon. Tout d’abord Il dit d’une façon très catégorique que le pouvoir c’est la foi. Si l’on ne croit pas on n’a aucun pouvoir car, en fait, le pouvoir ce n’est pas nous qui l’avons mais c’est Dieu, c’est Dieu qui le possède et qui le met à notre disposition si nous avons la foi. C’est ce qui est arrivé à cet homme humble qui a répondu au Christ : « Seigneur je crois mais augmente ma foi ». Et c’est sans aucun doute ce que nous sommes amenés à dire à chaque fois que nous avons besoin du Seigneur, de son pouvoir divin. Nous pouvons Lui dire : « Oui je crois Seigneur mais augmente ma foi. Apprends-moi à avoir la foi ».
La seconde leçon est aussi importante que la première. C’est dans la finale de cette péricope que nous l’entendons : « Ce genre de problème, c’est par le jeûne et la prière que nous pouvons le guérir ». La prière qui est vitale, la prière qui n’est pas une action obligatoire, qui n’est pas un devoir, qui n’est pas magique, la prière c’est la relation avec Dieu. La prière est un élément vital, nous le savons bien ; sans la prière, sans cette relation privilégiée à Dieu rien n’est possible, absolument rien. Car c’est dans la prière que nous sommes dans la communion avec le Seigneur. Certes il y a d’autres moyens de communion : la communion au Saint Corps et au Saint Sang du Christ que nous prendrons tout à l’heure et aussi la communion dans la fraternité avec ceux qui nous entourent. Nous ne pouvons pas prier sans l’aide de l’Esprit-Saint, ceci est impossible. C’est pour cette raison que, pendant la Liturgie, nous demandons, par l’épiclèse, ce temps privilégié qui vient consacrer les Saints Dons, nous demandons au Seigneur de nous envoyer son Esprit très Saint sur nous et sur les saints Dons. Nous commençons par les demander sur nous car nous ne pouvons pas poursuivre la Liturgie sans avoir l’Esprit-Saint avec nous. C’est par l’Esprit-Saint que nous pouvons nous adresser à Dieu. C’est par l’Esprit-Saint que nous pouvons aimer nos frères, c’est par l’Esprit-Saint que nous pouvons participer au salut du monde. Aimer les autres, nous le savons bien, c’est une chose difficile et sans l’Esprit-Saint qui est amour ce n’est pas possible. Cet homme qui aimait son enfant a pu l’apporter aux pieds du Seigneur Jésus parce qu'il croyait, il croyait en Dieu, à sa manière certes, mais il croyait et le Christ l’a vu et, pour cette raison, il a guéri l’enfant. Nous devons, nous aussi, nous acharner à croire, à croire que l’Esprit-Saint peut tout faire. La semaine dernière, tout au long de la semaine, nous avons vénéré la croix du Christ, la croix qui est le seul moyen que nous offre l’Esprit-Saint pour vivre selon le Christ : « Celui qui veut venir à ma suite qu’il prenne sa croix et qu’il me suive ». Nous ne pouvons pas prendre notre croix tout seul, cela est impossible. Nous ne pouvons pas aimer ceux qui nous entourent sans accepter cette croix et pour ce faire, il nous faut prier, prier beaucoup, prier l’Esprit-Saint pour qu’Il agisse en nous, pour qu’Il aime en nous alors tout devient possible, tout devient possible par la grâce et c’est l’Esprit-Saint qui nous procure la grâce. Retenons donc cette leçon que le Seigneur Jésus nous offre : avoir du pouvoir c’est avoir la foi et, pour Le suivre, porter notre croix tous - car nous devons tous la porter d’une manière ou d’une autre - c’est la seule solution pour suivre le Christ. Pour porter cette croix nous avons besoin de l’Esprit-Saint. Qu’Il vienne en nous et qu’il soit notre secours.
Amen

Dimanche de la Croix

11/3/2018 Dimanche de la Croix Mc VIII, 34, IX, 1

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous voici arrivés à la mi-carême, à la fin de cette première partie où nous avons essayé dans le jeûne, l’ascèse, la prière de nous approcher le plus possible du Seigneur. Nous constatons peut-être que tout cela n’est pas si simple, n’est pas si facile et est même quelque fois douloureux. La confrontation avec notre être profond, avec ce que nous sommes en vérité n’est pas toujours agréable à nos yeux. C’est pour cette raison que l’Eglise nous propose de méditer sur la croix du Seigneur, méditation que nous reprendrons pendant la semaine sainte. La croix, la croix dont nous avons été marqués dès notre baptême. C’est le premier acte que le prêtre a posé sur nous : il nous a signés du signe de la croix. Et depuis nous vivons avec ce signe : nous portons une croix sur nous, nous faisons le signe de la croix souvent, fréquemment, peut-être quelque fois sans attention, mais nous sommes marqués par ce signe. Pourquoi ? Parce que c’est sur la croix que tout le mystère du salut s’est accompli. C’est là que le Seigneur Jésus a abandonné totalement son moi humain, son égo humain (dans le bon sens du terme), Il l’a abandonné totalement entre les mains du Père : « Je remets mon Esprit entre tes mains », «  comme un agneau sans taches, muet devant celui qui le tond, ainsi il n’ouvre plus la bouche ». Cette phrase d’Isaïe qui prophétise le mystère de la croix du Christ, que nous répétons d’ailleurs pendant l’Office de la Proscomédie, cette phrase est forte, belle et doit toucher notre cœur. « … Comme un agneau pur que l’on mène à l’abattoir ainsi il n’ouvre pas la bouche ». C’est ainsi que le Seigneur accepte la croix. Souvent pour nous il est difficile de vivre les épreuves quelle qu’elle soit, les petites, les quotidiennes comme les plus rares, les plus exceptionnelles, les plus dures, les plus broyantes même mais nous avons toujours la possibilité de nous tourner vers le Christ sur la croix. C’est là qu’Il s’offre à nous en s’offrant au Père ; c’est là qu’Il nous offre au Père en s’offrant Lui-même. Nous ne sommes pas perdus sur cette terre. Pourtant, à certains moments, nous sentons que tout nous échappe, la force, l’énergie, la joie de vivre, la paix intérieure, que tout cela semble disparaître mais il nous reste toujours le Christ sur la croix. On peut toujours lever les yeux vers le Christ sur la croix et lui dire : « Viens, viens m’aider à porter ma propre croix car sans Toi je ne puis rien faire ». Pourtant le Christ nous dit aussi aujourd'hui : « Celui qui veut venir qu’il prenne sa croix et qu’il me suive » et lorsqu'Il dit « qu’il me suive », cela veut dire qu’il écoute ma Parole, qu’il écoute mon enseignement, qu’il écoute tout ce que je lui ai dit par ma vie. Il suffit de relire l’Evangile pour comprendre ce que le Seigneur Jésus a vécu depuis son enfance. Il a vécu tout ce que nous vivons sur cette terre, tout sauf le péché mais toutes les conséquences du péché même Il a accepté de les vivre jusqu’à la mort et la mort sur la croix. Alors nous ne devons pas voir la croix comme un simple instrument de torture, même si c’en est un, bien évidemment, mais nous devons aussi voir la renaissance de l’arbre de vie par la croix, l’arbre qui donne la vie et cet arbre c’est Jésus qui nous donne la vie en nous aimant tel que nous sommes et en nous invitant à passer au travers des épreuves avec Lui, non pas sans Lui, avec Lui, mais en vivant nos épreuves comme une participation à ce qu’Il a vécu Lui-même tout au long de sa vie terrestre, sur la croix et à Gethsémani. Alors soyons consolés par cette parole : « Viens et suis-Moi » et « Si tu veux me suivre, prends ta croix. » Que le Seigneur nous donne la grâce, la grâce de son Esprit-Saint pour comprendre non pas intellectuellement mais comprendre dans l’expérience de la vie que la croix, même la plus difficile, est source de vie. Cela peut paraître à certains moments insupportable et ce l’est mais le Christ est là, Lui qui a supporté l’insupportable. Il est là et Il nous tient par les bras, dans le cœur, dans l’âme, de toutes ses forces, par son Esprit-Saint et c’est par là que nous pouvons vivre nos épreuves. Que Dieu nous donne cette grâce.
Amen

Dimanche du Jugement dernier

11/2/2018 Dimanche du Jugement dernier Mth XXV, 31.46

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Les paroles du Seigneur Jésus que nous venons d’entendre sont sans aucun doute des paroles pour nous permettre de comprendre ce qui arrivera à la fin des temps. Certes ces paroles sont conséquentes, importantes. Elles résonnent dans nos cœurs mais elles nous sont données aussi pour notre vie d’aujourd'hui, pas uniquement pour imaginer ce qui pourrait nous arriver à la fin des temps, au jugement dernier. Tout ce que décrit le Seigneur Jésus est fait pour que nous soyons éveillés, éveillés à notre propre vie et à ce que nous en faisons. Le Seigneur Jésus nous a dit : « Qui m’a vu a vu le Père » et nous voulons voir le Père à la fin des temps mais si le Seigneur nous a dit « Qui m’a vu a vu le Père », il faut bien comprendre que nous pouvons voir le Seigneur Jésus aujourd'hui, Le voir dans notre frère, dans notre sœur : c’est tout le message de l’Evangile de ce jour. Il faut que nous soyons éveillés pour découvrir en chacun, en chacune de ceux que nous sommes appelés à rencontrer, le visage du Christ. Le psalmiste, dans le psaume 26 dit : « Seigneur je cherche ton visage » mais ton visage, Seigneur, est dans mon frère, dans ma sœur et je ne le vois pas. Je ne le vois pas parce que mes yeux sont fermés ou plus exactement ils ne sont pas fermés mais ils sont tournés vers moi au lieu d’être tournés vers mon frère, vers ma sœur pour y découvrir la belle face qui est celle qui T’appartient. Il nous est plus facile de voir les défauts de nos frères et nos sœurs. Il nous est plus facile de critiquer, de juger, de repousser mais voir la beauté de Jésus dans celui ou celle qui est en face de nous, c’est quelque chose d’extraordinaire qui peut nous arriver si nous sommes éveillés, si nous veillons autrement-dit, si nous sommes attentifs. Nous sommes heureux quand nous vivons avec des amis, des personnes que nous aimons, c’est facile à vivre mais il faut aller au-delà de cela encore, il faut découvrir le Seigneur Jésus en eux et plus encore il faut découvrir le Seigneur Jésus dans ceux qui nous sont moins faciles au niveau de la communication, de la présence, de la communion : découvrir la beauté de Dieu, la beauté du Christ dans le cœur de l’autre à condition que mon cœur ne soit pas tourné uniquement vers moi. Nous sommes tous touchés par l’égoïsme et par l’orgueil mais il faut être libéré de tout cela alors comment ? Parce qu’il faut que nous arrivions à voir dans notre frère et notre sœur le Christ, qu’il vienne nous dire : « C’est Moi que vous avez vêtu, c’est Moi que vous avez nourri, c’est Moi que vous avez accueilli, c’est Moi que vous avez visité ». La question est : « Pourra-t-il me dire cela lorsque j’arriverai devant Lui ? Ou bien me dira-t-il ce qu’il dit aux autres ? Pour ce faire il faut que nous soyons éveillés et que nous veillons, que nous soyons attentifs dans nos relations et dans notre foi aussi car ceci nécessite la foi. Pourquoi nous est-il possible, pendant l’Eucharistie, de dire, parce que le Christ nous l’a révélé, du pain et du vin qui est sur l’autel, corps et sang du Christ alors qu’il nous est difficile de voir le Christ dans notre frère et notre soeur ? Pourquoi ? Parce que nous sommes égoïstes, tous, moi comme vous, alors il faut nous réveiller pour que nous soyons éveillés. Nous avons des moyens, ces moyens nous sont apportés par l’Esprit-Saint, notamment dans la prière. C’est dans la prière que notre cœur se purifie, se cristallise, devient transparent et nous permet de voir. La prière nous mène à l’amour : l’amour de Dieu et l’amour du frère et de la sœur, la vraie prière, celle qui est amour justement. Il n’y a aucune prière authentique qui ne soit pas amour. Il n’y a pas d’amour authentique sans prière et tout cela nous est donné par l’Esprit-Saint. Alors certes, nous pouvons constater notre faiblesse et il est bon et important de la constater mais il ne faut pas nous arrêter là, il faut avoir foi dans l’Esprit-Saint : Il va susciter en nous la prière pour que nous sachions aimer et que, sachant aimer, nous découvrions la beauté de la face du Christ dans ceux qui nous entourent.
Amen

Regard du Christ

25/2/2018 Jn I, 43-51

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Pendant les 4 premiers jours de cette dernière semaine nous avons lu, entendu et médité le canon de Saint André de Crète que nous lisons traditionnellement tous les ans à cette période. Ce canon qui nous permet de prendre conscience de ce que nous sommes, de nos faiblesses. Y sont cités beaucoup de personnages de l’Ancien Testament qui ont commis des fautes pour nous rappeler que, nous aussi, nous sommes capables de commettre ces fautes. Ce canon, peut-être un peu terrifiant à entendre, mais il y a toujours une note d’espoir qui termine chaque partie du canon et aujourd'hui, alors que nous avons médité sur nos propres fautes, et que, peut-être cela nous a attristés, aujourd'hui, en entrant dans l’église nous contemplons l’icône du Christ Sauveur en souvenir du rétablissement de la vénération des icônes. En fait cette icône c’est le Christ qui nous regarde et qui guette notre regard, c’est le Christ qui veut manifester son amour. Lorsque Adam et Eve ont péché, ils se sont cachés, et c’est Dieu qui les a cherchés : « Où es-tu Adam ? » Le regard du Christ sur cette icône est certainement aussi un regard qui nous cherche et qui nous cherche pour nous dire combien Il nous aime. C’est le regard qu’Il a posé sur la Samaritaine, sur Zachée, sur la femme adultère, sur Nathanaël, comme nous venons de l’entendre : un regard qui apaise, un regard qui donne espérance, un regard qui réconforte. Le Christ nous dit : « Oui je vais te séduire, te conduire au désert et parler à ton cœur ». Tout ce temps de carême qui est un temps de désert le Christ souhaite nous parler, nous dire quelque chose et pour ce faire il faut que notre cœur se libère, se désencombre pour que le Christ puisse s’exprimer. Cela va être tout le travail ascétique de cette période carémique. Le regard du Christ c’est un regard de Créateur, de Celui qui nous a fait à partir de rien et qui, en s’incarnant sur la terre, a voulu montrer son visage d’amour, a voulu nous offrir son regard d’amour, ce regard d’amour qui n’a eu de cesse, tout au long de sa vie terrestre, de se poser sur chacun de ceux qui l’entouraient, y compris sur la croix. Sur la croix le Christ regarde ceux qui l’entourent : Il regarde le Bon Larron, Il regarde les soldats, le centurion, sa mère, Saint Jean. Il est surpris de voir combien on L’a rejeté : « O mon peuple, que t’ai-je fait ? » Aujourd'hui Il nous dit : « Que m’as-tu fait ? Où es-tu ? Où t’es-tu éloigné de Moi ? Approche et n’aie pas peur ». Il est impressionnant de lire tous ces passages de l’Evangile où tous ceux qui approchent le Christ sont guéris s’ils étaient malades ou transformés dans leur âme et nous aujourd'hui nous nous laissons regarder par le Christ qui est sur cette icône par ce regard d’amour. Bien sûr nous sommes pécheurs et le Seigneur le sait bien mais ce n’est pas cela qui l’intéresse. Ce qui l’intéresse c’est que nous nous laissions regarder par Lui, même dans le péché. C’est cela qu’Il cherche à nous faire comprendre et à nous dire : Il ne nous rejette pas, Il nous accueille, comme Il accueille Nathanaël. Toute notre vie nous serons confrontés à nos faiblesses : il nous faudra lutter contre les tentations et demander le secours du Christ pour pouvoir continuer la route. Sans l’amour du Christ, sans ce regard d’amour, nous ne pouvons pas grand-chose mais avec Lui tout devient possible. Le carême est une période particulière, c’est un temps où l’on peut d’avantage peut-être voir qui on est et qui on devrait être et en même temps sentir combien le Seigneur est proche de nous pour nous soutenir, nous encourager, nous prendre par la main. Nous pouvons Lui dire : « Je suis une brebis perdue, appelle-moi, ô Sauveur, et sauve-moi », comme nous le disons dans l’Office des défunts. Il viendra alors, Il viendra pour nous sauver. Alors lorsque nous arriverons devant Lui à la fin des temps, nous pourrons Lui dire : « Je suis l’image de ta gloire ineffable malgré les stigmates de mes péchés ». Oui nous pourrons dire cela car le Seigneur nous aura appris à accueillir son regard d’amour ; Il nous aura appris à poser un regard d’amour sur ceux qui nous entourent ; Il nous aura appris à aimer.
Amen

Rencontrer le Christ

2/2/2018 Lc II, 22-40 La Sainte Rencontre

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Aujourd'hui nous fêtons la Sainte Rencontre, la Sainte Rencontre entre Jésus, le Christ, et le vieillard Siméon et tous ceux qui l’entourent. Rencontrer le Christ - on le comprend bien dans cet Evangile – est vital pour le Vieillard Siméon. C’est un moment de grâce qui lui a été prédit par l’Esprit-Saint et il sait qu’avant de mourir il verra le Christ et le tiendra dans ses bras. Il ne s’agit pas de n’importe quel enfant car le Vieillard Siméon l’exprime et le comprend : il s’agit du Sauveur du monde qu’il tient dans ses bras. L’expérience de Siméon, c’est une expérience que nous devons essayer et désirer vivre à un moment ou l’autre de notre vie. Certes on ne nous apportera pas l’enfant Jésus dans nos bras mais il s’agit de Le rencontrer sous une forme ou sous une autre par quelque moyen que ce soit. C’est indispensable à la vie spirituelle, à la vie chrétienne : rencontrer le Christ. Certes, nous connaissons le Christ, nous avons reçu la foi au baptême et nous croyons en Lui mais L’avons-nous rencontré ? Est-ce que plus exactement nous avons eu ou nous avons encore le désir de Le rencontrer, de personne à personne ? La question se pose : mais comment, comment Le rencontrer ? En fait, c’est une fausse question. Nous devons avoir le désir de Le rencontrer et demander cette rencontre dans la prière fervente, régulière, tenace et c’est le Seigneur Lui-même qui provoquera la rencontre, ce n’est pas nous. Nous, nous la demanderons, nous la désirerons mais celui qui la provoquera en nous rencontrant c’est le Christ. C’est Lui qui a été déposé dans les bras du Vieillard Siméon par sa mère Marie et Joseph. C’est important cette rencontre parce que nous ne pouvons pas vivre sans cette rencontre. Même si c’est à la fin de notre vie que cela se produit, peu importe le moment mais il faut qu’elle ait lieu comme pour le Vieillard Siméon : avant la mort, la rencontre avec le Christ, une vraie rencontre, une rencontre qui nous ouvre le cœur, qui transforme notre âme, qui change notre vie, qui fait qu’après la rencontre nous ne serons plus exactement le même ou la même. Le Seigneur peut venir à notre rencontre sous différentes formes, extrêmement variées. Bien sûr il y a quelques personnes exceptionnelles qui verront le Christ de leurs yeux, quelques saints, comme Saint Silouane et qui ainsi le rencontreront mais le Christ pourra se manifester de bien d’autres manières. Peut-être un moment où nous prierons nous sentirons la douceur de sa présence. Nous aurons l’évidence et la conviction qu’Il est là et qu’Il nous dit quelque chose qui sera approprié à notre propre personne au moment voulu. Peut-être cela se fera autour d’une parole entendue, inattendue et qui viendra toucher notre cœur et peut-être faire verser nos larmes. Il y aura peut-être la réception de son Saint Corps et de son Saint Sang lors de l’Eucharistie à un moment qui se manifestera comme étant plus fort, plus particulier, plus personnel … et bien d’autres manières. L’important c’est la rencontre, c’est le désir de la rencontre et, accompagnant cela, une vertu, une vertu qui nous est difficile d’acquérir qui s’appelle la patience. Le Vieillard Siméon a attendu longtemps. Il était âgé. Il savait qu’il rencontrerait le Christ mais il ne savait pas quand et il a su attendre, ce que très souvent nous ne savons pas faire. Nous sommes des impatients. Nous voulons avoir le plus vite possible toutes sortes de grâces, plus particulièrement cette grâce de la rencontre. Bien sûr c’est légitime, ce désir est légitime mais il doit s’accompagner de patience : si ce n’est pas aujourd'hui ce sera demain et si ce n’est pas demain, ce sera plus tard. Peu importe, mais nous devons garder au cœur le désir de cette rencontre et une fois que cette rencontre aura eu lieu dans la profondeur de notre cœur, de notre être, nous serons changés, nous serons autre intérieurement, profondément. Hier, pendant la Vigile nous avons entendu un moment un petit texte que peut-être on a laissé passer sans attention et qui m’a paru significatif. Il était dit que le Vieillard Siméon ayant reçu le Christ dans ses bras était allé annoncer à Adam que le Sauveur était là. C’est le Christ qui va tirer Adam du lieu où il se trouve depuis qu’il a été chassé du paradis mais déjà, dans la situation où il se trouve, il lui est annoncé que le Sauveur est arrivé. Alors c’est pour nous une grande consolation parce que nous entendons aujourd'hui par la bouche du Vieillard que le Christ est venu, qu’il l’a eu dans les bras, qu’il peut aller maintenant dans son repos éternel, Siméon. Mais, indépendamment de Siméon, Adam, c'est-à-dire l’homme, l’humanité entière apprend qu’elle est sauvée avant même que le salut se soit accompli totalement par la mort et la Résurrection du Christ. Adam ne s’attendait probablement pas à cette nouvelle, en tout cas sous cette forme. Comme beaucoup d’hommes et de femmes sur la terre n’attendent pas la venue du Christ pour nous sauver mais nous, comme Siméon, nous avons la responsabilité de faire connaître au monde entier que le monde est sauvé potentiellement. Cette responsabilité ne se fera pas forcément par la parole, certainement pas par du prosélytisme inutile mais par notre vie, notre vie qui étant transformée par la rencontre deviendra manifeste aux yeux des hommes d’une manière ou d’une autre, peu importe. Mais nous aurons cette responsabilité de vivre et de garder ce mode de vie qui est différent de celui qui avait lieu avant la rencontre pour que le monde sache, pour que le monde connaisse que le salut est venu au milieu des hommes.
Amen

Pharisien et publicain

14/1/2018 Lc XVII, 12-19

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« Seigneur Jésus aie pitié de nous ». C’est par cette prière que s’expriment les dix lépreux atteints de cette terrible maladie et qui souhaitent être guéris par le Seigneur. « Seigneur, aie pitié de nous ». Et le Seigneur les exauce, le Seigneur les envoie se montrer aux prêtres, comme c’était la coutume lorsqu'on était guéri, et pendant qu’ils cheminent vers les prêtres pour se montrer, ils sont effectivement guéris de la lèpre. La leçon que nous donne le Christ aujourd'hui est facile à comprendre : un seul sur les dix revient rendre grâce au Seigneur. Le Seigneur en est étonné et il pose la question : « Où sont les neuf autres ? ». Il attire notre attention sur le fait que sur les dix le seul qui est revenu est un étranger, un non-juif. Cela prouve, entre autre que le Seigneur peut tout faire et que les guérisons ne sont pas réservées aux chrétiens mais à tous les hommes de la terre, pour qui les chrétiens doivent prier, bien sûr, c’est notre responsabilité. La leçon c’est : pourquoi disons-nous  « Seigneur aie pitié de nous » et pourquoi ne disons-nous pas « Merci Seigneur » ? Nous autres les moines, les moniales et les fidèles aussi, utilisons ce que l’on appelle « la prière de Jésus » dont l’origine est dans ce texte : Seigneur Jésus aie pitié de nous ou aie pitié de moi et nous répétons beaucoup de chapelets en redisant la même chose, à juste titre d’ailleurs, mais pensons-nous de temps en temps à dire le chapelet en disant : « Seigneur Jésus, sois béni pour ce que tu m’as donné » ? La question vaut la peine que nous nous la posions. Nous demandons souvent des prières – et nous avons raison – pour nous-mêmes, pour nos malades, pour des situations difficiles. Il faut demander, le Seigneur nous l’a dit : « Demandez, frappez à la porte, je vous ouvrirai ». Mais là, il est étonné parce que tout le monde est venu frapper à sa porte pour être guéri et un seul est venu dire merci. Alors à nous de nous interroger pour savoir s’il y a un équilibre entre nos demandes et nos actions de grâce. Ce que nous célébrons en ce moment s’appelle « Eucharistie ». C’est un mot grec qui signifie « merci ». C’est un mot qui existe toujours : quand vous allez en Grèce, pour dire merci, n’importe où vous dites « evcharisto » mais le disons-nous au Seigneur quelle que soit la langue ? Est-ce que pendant ces deux heures que nous passons ensemble, il nous viendra à l’esprit de rendre grâce au Seigneur et pourtant il y a des prières qui vont bien dire que nous rendons grâce mais est-ce que nous serons dans ces prières ? Est-ce que notre oreille entendra des mots simplement ou est-ce que notre cœur s’ouvrira pour dire merci au Seigneur, pour ce qu’il a fait pour nous : sa mort sur la croix, sa résurrection et toutes les guérisons, pour le salut qui nous est offert ? Soyons attentifs à ce que nous faisons dans notre vie spirituelle, à ce que nous disons à Dieu. Tout à l’heure, après la Communion, nous chanterons : « Nous avons vu la vraie lumière, etc… » Est-ce que c’est simplement un chant, une ritournelle que l’on chante systématiquement après la Communion, à laquelle on ne fait guère attention ou bien est-ce que, dans ce chant, nous ferons entrer notre merci à Dieu pour ce que nous avons goûté, pour ce que nous avons reçu, son Corps, son Sang, sa bénédiction, sa paix, la joie du cœur retrouvée ? Quand j’étais petit enfant - je pense qu’on le fait toujours aux petits enfants – quand on me donnait quelque chose et que je ne disais pas merci, mes parents me disait : « Et alors, et alors … Où est-il le merci ? ». Oui, j’ai été éduqué comme cela. Alors bien sûr Dieu ne donne pas des taloches, Il a autre chose à faire mais quand même, il faut réveiller nos cœurs, nos âmes, il faut prendre conscience de nos manquements. Ce n’est pas compliqué de dire merci à Dieu quand une grâce est venue, quand nous avons été exaucés, quand un ami, une amie, une personne pour laquelle nous avons prié est exaucée. Rendre grâce, c'est-à-dire reconnaître la grâce, c’est cela que veut dire « rendre grâce », reconnaître devant Dieu que c’est Lui qui est à la source de la grâce. Alors voilà c’est tout l’enseignement simple, facile à retenir, qu’il faut vivre ; pas simplement retenir dans l’intellect mais vivre avec le cœur. Alors que le Seigneur nous apprenne à dire merci pour tout ce qu’il nous offre.
Amen

Remercier

14/1/2018 Lc XVII, 12-19

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« Seigneur Jésus aie pitié de nous ». C’est par cette prière que s’expriment les dix lépreux atteints de cette terrible maladie et qui souhaitent être guéris par le Seigneur. « Seigneur, aie pitié de nous ». Et le Seigneur les exauce, le Seigneur les envoie se montrer aux prêtres, comme c’était la coutume lorsqu'on était guéri, et pendant qu’ils cheminent vers les prêtres pour se montrer, ils sont effectivement guéris de la lèpre. La leçon que nous donne le Christ aujourd'hui est facile à comprendre : un seul sur les dix revient rendre grâce au Seigneur. Le Seigneur en est étonné et il pose la question : « Où sont les neuf autres ? ». Il attire notre attention sur le fait que sur les dix le seul qui est revenu est un étranger, un non-juif. Cela prouve, entre autre que le Seigneur peut tout faire et que les guérisons ne sont pas réservées aux chrétiens mais à tous les hommes de la terre, pour qui les chrétiens doivent prier, bien sûr, c’est notre responsabilité. La leçon c’est : pourquoi disons-nous  « Seigneur aie pitié de nous » et pourquoi ne disons-nous pas « Merci Seigneur » ? Nous autres les moines, les moniales et les fidèles aussi, utilisons ce que l’on appelle « la prière de Jésus » dont l’origine est dans ce texte : Seigneur Jésus aie pitié de nous ou aie pitié de moi et nous répétons beaucoup de chapelets en redisant la même chose, à juste titre d’ailleurs, mais pensons-nous de temps en temps à dire le chapelet en disant : « Seigneur Jésus, sois béni pour ce que tu m’as donné » ? La question vaut la peine que nous nous la posions. Nous demandons souvent des prières – et nous avons raison – pour nous-mêmes, pour nos malades, pour des situations difficiles. Il faut demander, le Seigneur nous l’a dit : « Demandez, frappez à la porte, je vous ouvrirai ». Mais là, il est étonné parce que tout le monde est venu frapper à sa porte pour être guéri et un seul est venu dire merci. Alors à nous de nous interroger pour savoir s’il y a un équilibre entre nos demandes et nos actions de grâce. Ce que nous célébrons en ce moment s’appelle « Eucharistie ». C’est un mot grec qui signifie « merci ». C’est un mot qui existe toujours : quand vous allez en Grèce, pour dire merci, n’importe où vous dites « evcharisto » mais le disons-nous au Seigneur quelle que soit la langue ? Est-ce que pendant ces deux heures que nous passons ensemble, il nous viendra à l’esprit de rendre grâce au Seigneur et pourtant il y a des prières qui vont bien dire que nous rendons grâce mais est-ce que nous serons dans ces prières ? Est-ce que notre oreille entendra des mots simplement ou est-ce que notre cœur s’ouvrira pour dire merci au Seigneur, pour ce qu’il a fait pour nous : sa mort sur la croix, sa résurrection et toutes les guérisons, pour le salut qui nous est offert ? Soyons attentifs à ce que nous faisons dans notre vie spirituelle, à ce que nous disons à Dieu. Tout à l’heure, après la Communion, nous chanterons : « Nous avons vu la vraie lumière, etc… » Est-ce que c’est simplement un chant, une ritournelle que l’on chante systématiquement après la Communion, à laquelle on ne fait guère attention ou bien est-ce que, dans ce chant, nous ferons entrer notre merci à Dieu pour ce que nous avons goûté, pour ce que nous avons reçu, son Corps, son Sang, sa bénédiction, sa paix, la joie du cœur retrouvée ? Quand j’étais petit enfant - je pense qu’on le fait toujours aux petits enfants – quand on me donnait quelque chose et que je ne disais pas merci, mes parents me disait : « Et alors, et alors … Où est-il le merci ? ». Oui, j’ai été éduqué comme cela. Alors bien sûr Dieu ne donne pas des taloches, Il a autre chose à faire mais quand même, il faut réveiller nos cœurs, nos âmes, il faut prendre conscience de nos manquements. Ce n’est pas compliqué de dire merci à Dieu quand une grâce est venue, quand nous avons été exaucés, quand un ami, une amie, une personne pour laquelle nous avons prié est exaucée. Rendre grâce, c'est-à-dire reconnaître la grâce, c’est cela que veut dire « rendre grâce », reconnaître devant Dieu que c’est Lui qui est à la source de la grâce. Alors voilà c’est tout l’enseignement simple, facile à retenir, qu’il faut vivre ; pas simplement retenir dans l’intellect mais vivre avec le cœur. Alors que le Seigneur nous apprenne à dire merci pour tout ce qu’il nous offre.
Amen

Zachée

14/1/2018 Lc XIX, 1-10

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« La force et la grâce de Dieu se manifestent dans notre faiblesse ». Ceci pourrait être le titre du passage évangélique que nous venons d’entendre. En effet dans l’histoire de cette rencontre entre le Seigneur Jésus et Zachée il y a la manifestation évidente de la grâce de Dieu, une manifestation qui peut paraître cachée à nos yeux mais qui pourtant est bien réelle. En effet, comme il est dit, Zachée est un publicain, quelqu'un qui ne vit pas – on dirait aujourd'hui – saintement, c'est-à-dire correctement, quelqu'un qui profite un peu des autres et qui s’enrichit sur le dos des autres. Il le sait. Il le sait et c’est pour cette raison - indépendamment de sa taille puisqu’il est dit qu’il était petit - qu’il est monté dans le sycomore. Il voulait voir le Christ, il avait entendu parler de Lui comme d’un thaumaturge, comme quelqu'un d’exceptionnel, un prophète. Il voulait Le découvrir, donc il fallait qu’il monte dans un arbre sinon les autres l’auraient empêché de voir le Christ mais il y a une autres raison pour laquelle il monte dans l’arbre, c’est parce que dans un arbre feuillu on n’est pas vu, on se cache et il se cache parce qu'il sait, comme Adam au paradis, qu’il ne peut pas être vu par Dieu dans son état de pécheur. Mais là il se trompe car c’est le Seigneur Jésus qui va l’interpeller, même s’il est caché, comme Dieu dans le paradis appelle ; « Adam où es-tu ? ». Et le Seigneur dit : «  Zachée descends, descends de ton arbre. Aujourd'hui je dois entrer dans ta maison, prépare le repas ». Et Zachée obéit au Seigneur. Il est certainement troublé, il se demande ce qui se passe : comment moi, pécheur, suis-je désigné pour accueillir celui qui est, apparemment, le Saint par excellence mais il s’exécute. Alors dans plusieurs Evangiles, l’évènement est relaté avec quelques nuances et quelques détails supplémentaires. On sait que pendant le repas il y a un dialogue qui s’instaure entre le Christ et Zachée – c’était d’ailleurs la volonté du Christ - et Zachée voyant la délicatesse du Christ, la manière dont il respecte sa personne telle qu’elle est : pécheur, pauvre, misérable même, mais respecté.  Zachée voyant cela est ému dans son cœur. Il est touché par la grâce du Christ mais le Christ ne lui demande rien. Il ne lui fait aucun reproche. Il ne lui dit pas : « Tu es un voleur, il faut changer de vie ». Non, Il ne lui dit rien. Il lui a simplement demandé un service : « Prépare la table pour moi », comme Il demandera à la Samaritaine : « Donne-moi de l’eau ». C’est cela le respect de Dieu qui nous prend tel que nous sommes, dans l’état où nous sommes, au moment où nous en sommes, dans notre beauté comme dans notre laideur, dans notre richesse comme dans notre pauvreté. Il nous accueille. Il nous demande seulement quelque chose : d’ouvrir notre porte. Zachée ouvre sa porte et prépare le repas. Cela entraînera pour lui une décision qu’il prendra à haute voix devant tous ceux qui sont là : je vais rendre ce que j’ai volé et distribuer encore les choses qui m’appartiennent à ceux qui en ont besoin. Zachée est amené à changer de vie. Il se retourne. Il entre sur le vrai chemin. Alors pour nous qu'est-ce que cette histoire signifie ? Est-ce simplement un souvenir historique sympathique où cela a-t-il une résonnance dans nos cœurs ? Parce que – bien sûr nous ne sommes pas des voleurs au sens strict du terme - mais sommes-nous vraiment parfaits ? Je pense que personne ici ne va répondre oui, en tout cas pas moi. Mais ce qui est extraordinaire c’est que le Seigneur se penche sur nous, qui que nous soyons, quoi que nous ayons fait et qu’il nous offre son amour qui s’appelle miséricorde. Il nous l’offre gratuitement, généreusement et sans condition si nous acceptons de nous laisser regarder par Lui comme nous sommes. Quelle extraordinaire leçon, quelle magnifique leçon. Elle se répètera dans l’Evangile mais elle est particulière aujourd'hui, elle est significative car nous pressentons que, dans quelques semaines, nous entrerons dans le grand carême qui nous préparera à la Résurrection du Christ. Il y a encore plusieurs semaines avant d’entrer dans ce carême, les semaines que l’on appelle le Triode et nous verrons qu’à chaque dimanche il y a un Evangile qui nous prépare, qui prépare notre cœur et notre âme à entrer sur le chemin du repentir, de la conversion, du retournement intérieur et cela sera suscité non pas par nous mais par le Christ parce que Dieu nous aime, tout simplement. Dieu nous aime parce que c’est sa nature, Il est amour et Il aime sa créature, sa création, quelle qu’elle soit et quelle que soit sa faiblesse. Alors c’est pour nous comme un baume d’apaisement qui se répand sur nous, sur notre âme, dans notre cœur, de savoir que, qui que nous soyons, nous sommes aimés. Nous cherchons tous l’amour, nous avons besoin d’amour, sans amour on ne peut vivre, on le sait mais nous avons à notre disposition l’amour de Dieu qui est là comme un grand trésor dans lequel on peut puiser sans cesse. Il nous faut simplement dire au Seigneur : « Donne-moi de Ton amour ». Alors le Seigneur s’exécutera. C’est certain puisque nous venons de l’entendre dans cet Evangile qui nous encourage et qui nous met debout dans la lumière de Dieu.
Amen

Ténèbres, mort, lumière du Christ

7/1/2018 Mt IV, 12-17

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Le texte évangélique que nous venons d’entendre peut nous paraître banal, simple voire simplement descriptif. Et pourtant il comporte peut-être un enseignement important, un enseignement auquel nous ne pensons pas forcément. En effet, il est rapporté ceci : « Le peuple qui se trouvait dans les ténèbres a vu une grande lumière. Sur ceux qui habitaient les obscurs parages de la mort une lumière a resplendi ». Ces phrases viennent en écho de la fête que nous avons célébrée hier, le baptême du Christ, car la lumière dont il est question, c’est Lui, le Christ sauveur, rédempteur mais ce texte nous est adressé à chacun d’entre nous aujourd'hui. Ce n’est pas simplement la Galilée des nations, la terre de Zabulon, la terre de Nephtali, c’est à nous qu’il est dit : à ceux qui se trouvaient dans les ténèbres, le peuple a vu une grande lumière. Sur ceux qui habitaient les obscurs parages de la mort, une lumière a resplendi. Un des écrivains du siècle passé, Antoine Blondin, a dit ceci dans la bouche d’un de ses héros : « Je me suis habitué à vivre au seuil de moi-même. A l’intérieur il y fait trop sombre ». Cette phrase qui n’est pas très optimiste me rappelle ou fait écho à ce que nous venons d’entendre : les obscurs parages de la mort, les ténèbres, l’intérieur où il fait sombre. Alors dans un premier temps je vais m’adresser à mes frères et sœurs et à moi-même dans la vie monastique mais aussi de toute manière à vous tous qui êtes là car, de toute façon, être moine n’est rien d’autre que d’essayer d’être chrétien. Mais je voudrais, là aussi, citer une phrase que je fais totalement mienne d’un des moines de notre temps qui a écrit ceci : « Le but de la vie monastique n’est pas de réaliser des prouesses ascétiques comme un athlète accumulerait des exploits à la force du poignet pour en tirer une gloire ; il est de conduire le moine à l’impasse, à l’échec, au brisement du cœur, ce point mort ou ce point d’épuisement où l’homme confronté à ses fragilités et pataugeant dans sa pauvre vérité jusqu’aux genoux, découvre que seul il ne peut s’en sortir. Réduit ainsi à sa plus simple expression, à sa pauvreté radicale, il est alors paré pour rencontrer la grâce qui l’attend justement là, à ce point de son extrême faiblesse que peu acceptent de voir en face ». Ce merveilleux texte monastique – qui encore une fois s’adresse à tous les chrétiens - vient bien en écho à ce que nous avons entendu dans l’Evangile : le peuple qui se trouvait dans les ténèbres, c’est nous car, à certains moments de nos vies nous nous trouvons dans nos ténèbres. Nous sommes dans les obscurs parages de la mort et, d’après les textes de ce moine, il est nécessaire que, dans notre vie, nous fassions l’expérience de ce cœur broyé, de cet anéantissement intérieur. Cela n’est pas dans la logique humaine, c’est une espèce de perspective inversée digne de Dieu. Nous voudrions être brillants aux yeux des hommes. Nous voudrions qu’on se souvienne de nous. Nous voudrions qu’on nous prenne comme modèle mais l’on ne peut pas nous prendre comme modèle, comme repère si nous n’acceptons pas l’impasse, l’échec, le brisement du cœur, ce point mort, ce point d’épuisement où nous sommes confrontés à nos fragilités, où nous pataugeons dans notre pauvre vérité. Alors, alors seulement nous découvrons qu’il est impossible de s’en sortir tout seul. Alors nous sommes prêts, parés, comme dit le moine, à rencontrer la grâce qui nous attend justement à ce point extrême et cette grâce c’est la lumière qui resplendit, c’est là que le Christ nous attend, c’est là qu’Il veut se manifester et nous dire : « Je suis là ». C’est l’expérience d’un Silouane qui s’entend dire par le Christ : « Tiens ton esprit en enfer – dans ce cœur broyé - mais ne désespère pas car ma lumière est là. Je suis la lumière du monde. Je suis là pour toi et constate ta faiblesse, ton anéantissement, ton cœur broyé ». Alors ce texte devient merveilleux, ce texte devient positif, ce texte devient dynamisant, source de grâce, source de force, source de joie et de paix intérieure car qui que nous soyons moine, moniale, laïc, peu importe, lorsque nous faisons ce constat et nous acceptons ce constat car il faut l’accepter, l’accepter de tout cœur, accepter que nous ne sommes pas aussi brillants que nous voudrions l’être et que notre cœur en est broyé alors oui le Christ peut nous rencontrer, alors Il est là, alors Il vient nous consoler, nous conforter, nous redonner vie. Pour atteindre la vie, quelque part il faut mourir, mourir à soi-même, mourir à son égo qui nous atteint tous. Et lorsqu'au travers des épreuves, des constats de nos faiblesses, nous avons le cœur broyé, alors la lumière du Christ est là qui illumine notre cœur, qui l’envahit, qui l’emplit et qui lui donne le sens de sa vie.
Ce petit texte, apparemment, insignifiant est d’une beauté exceptionnelle. Il est simple à retenir, très simple : les ténèbres, la mort et au milieu la lumière du Christ qui resplendit pour nous sauver.
Amen

Théophanie

6/1/2018 Sainte Théophanie Mt III, 13-17

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Au travers de la fête que nous vivons aujourd'hui et de l’Evangile que nous venons d’entendre, nous recevons pour la première fois, d’une manière évidente, la notification de la Sainte Trinité. En effet, Jésus, deuxième Personne de la Sainte Trinité, se laisse baptiser par Jean et, au même moment, l’Esprit-Saint sur la forme d’une colombe se manifeste puis la voix du Père témoigne de l’affection qu’il porte à son Fils bien-aimé. Le Père, le Fils et l’Esprit-Saint sont manifestés au même moment. Et ce moment qui est vital pour chacun d’entre nous, puisque c’est le mystère du salut qui se concrétise de plus en plus et particulièrement à ce moment où Jésus va commencer sa vie publique connue où Il parlera à tous ceux qui l’entoureront, où Il manifestera l’amour de Dieu pour tous les hommes. Ce moment est important, d’autant plus que, comme pour la Nativité, il se vit dans une humilité totale. En effet, lorsque Jésus se présente à Jean pour être baptisé, Jean est le premier qui témoigne de l’humilité : il refuse de baptiser son cousin qu’il connait, qu’il sait d’avance qu’Il est le Fils de Dieu. Il dit même qu’il n’est pas capable de dénouer la courroie de ses sandales. L’humilité de Jean est reprise évidemment, avec une plus grande intensité, un plus grand développement par l’humilité du Christ qui accepte d’être plongé dans les eaux du Jourdain où Jean baptisait les pécheurs pour qu’ils se convertissent. Le Seigneur Jésus n’avait pas besoin d’être lavé d’aucun péché. Il n’avait pas besoins de se convertir mais s’Il entre dans les eaux souillées du Jourdain c’est par humilité, par association profonde avec notre humanité pécheresse. Sans être pécheur, il prend le péché des hommes sur ses épaules et Il les plonge avec Lui dans les eaux du Jourdain. Au même moment, ces eaux souillées par le péché sont purifiées. C’est là un grand mystère comme tout ce qui touche Dieu. Le mystère d’une décision d’amour trinitaire d’envoyer le Christ sur la terre pour nous sauver. C’est pour cette raison que la Trinité se manifeste à ce moment-là : que l’on comprenne bien que c’est une décision de Dieu Père, Fils et Saint-Esprit pour sauver les hommes de la terre, tous les hommes de la terre. C’est pour cette raison que cette fête a été, dans l’histoire, la première à être célébrée liturgiquement avant celle de Noël. Vous comprenez l’importance de cette fête, même si Noël a son importance bien évidemment aussi. Alors pour nous cela doit résonner dans nos cœurs en signe d’espérance car si nous sommes tous pécheurs, capables de pécher, quelque fois gravement, peu importe, si nous nous tournons vers le Christ, nous sommes surs que nos péchés sont effacés.
En se plongeant dans les eaux du Jourdain le Seigneur Jésus commence sa vie publique qui va se dérouler jusqu’à la mort et à la mort sur la croix où Il versera son sang pour nous, à nouveau, pour s’offrir à nous. Il leur a dit : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » et Il donne sa vie. Il la donne dès le baptême et ce don se concrétise en final par sa mort sur la croix et par sa Résurrection. Lorsque nous consommons le précieux Sang du Christ et son Corps, nous recevons le don de Dieu, le salut de Dieu. C’est pour cette raison que lorsque la communion est terminée, l’évêque ou le prêtre disent : « Ceci a touché vos lèvres, vos péchés sont pardonnés et vos iniquités sont effacées ». Le cycle s’achève : ce cycle qui commence maintenant lorsque Jésus est plongé dans les eaux du Jourdain et qui s’achève lorsque nous recevons son Corps et son Sang avec conscience et que nous comprenons, non pas par l’esprit mais par le cœur, que nous sommes sauvés. Bien sûr tout cela se réalisera en plénitude dans l’éternité lorsque nous serons dans le face-à-face avec Celui qui est venu pour nous sauver. Alors il n’y aura plus besoin de rien. Nous aurons l’essentiel, nous aurons tout. Nous aurons Dieu avec nous.
Amen

Écoute de la parole de Dieu

1/1/2018 Lc II, 201-21, 40-52

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous avons fêté Noël il y a quelques jours. Nous avons fêté l’Incarnation du Christ, cette grande humilité de Dieu qui se manifeste en prenant le corps que nous avons, un corps d’homme. Aujourd'hui, dans ce récit, un peu condensé, nous voyons que Jésus continue sa vie d’enfant et d’adolescent. Cette grande humilité qui nous a frappés, marqués lors de la fête de sa naissance nous marque encore aujourd'hui car nous voyons qu’il continue de s’abaisser en acceptant de vivre les lois et les règles qui se pratiquaient à cette époque dans ce pays et dans la tradition juive : Il se laisse circoncire comme tous les enfants de cet âge. Et puis, il part avec ses parents pour la fête de Pâque à Jérusalem et là il se passe quelque chose de particulier au retour puisqu’il disparaît aux yeux de Marie et de Joseph et qu’ils ont bien du mal à le retrouver. Ils le retrouvent enfin dans le temple et il nous est dit qu’Il écoutait ceux qui étaient présents et leur posait des questions. Là encore nous retrouvons sa grande humilité : Il écoute et questionne, Lui qui est Dieu et qui sait tout. On nous dit par ailleurs que dans le dialogue qui s’instaure avec ceux qui sont présents dans le Temple, tous étaient surpris par son intelligence qui se reflétait dans le dialogue et les réponses que lui-même pouvait donner. Ensuite l’Evangile se terminera en nous disant que Jésus croissait en taille et en sagesse et qu’il était soumis à ses parents, nouvelle marque d’humilité : soumis à ses parents.
Peut-être que pour nous il y a deux leçons à retenir – peut-être plus mais au moins deux – au travers de ce texte. D’abord la nécessité de suivre le Christ dans son humilité qui que nous soyons. Si nous savons être humbles, si nous savons être nous-mêmes devant les hommes comme devant Dieu alors nous sommes sur le chemin que le Christ nous propose, le chemin de la sainteté car il n’y a pas de sainteté sans humilité. Et puis il y a quelque chose que nous pourrions peut-être aussi retenir c’est que Jésus écoute ceux qui sont en train de commenter la Torah. Il écoute, il est attentif à la Parole de Dieu, Lui qui est le Logos, la Parole incarnée. Il écoute la Parole de Dieu, Il la laisse entrer dans son cœur d’homme, Il se laisse compénétrer par cette sagesse divine qui est en même temps la sienne mais, dans sa nature humaine, Il l’accueille progressivement et Il est attentif à tout ce qui est dit. Alors pour nous la question se pose. Est-ce que, à l’image du Christ, nous sommes attentifs à la Parole de Dieu, à cette parole que nous entendons dans nos Offices, à cette Parole que nous pouvons lire dans nos Evangiles, dans la Bible que nous avons à la maison mais la lisons-nous ? La lisons-nous bien, c'est-à-dire avec attention, avec respect, en étant certains que cette Parole s’adresse à nous, pour nous, pour nous faire grandir, pour nous faire avancer sur ce chemin de sainteté ? C’est une leçon que Jésus nous donne par son attitude au milieu des docteurs de la Loi et de tous ceux qui se trouvaient au temple à ce moment-là, une leçon d’humilité et aussi une leçon de sagesse : savoir accueillir la Parole de Dieu qui n’est pas une parole ordinaire. C’est une parole créative, qui nous recrée sans cesse si nous voulons bien l’écouter et la faire nôtre, si nous voulons bien vivre de cette parole. Nous avons probablement trop l’habitude d’entendre la parole mais de ne pas l’écouter. On l’entend, comme on entend une chanson à la radio mais on ne l’écoute pas car écouter c’est quelque chose qui demande de l’attention, du respect, une attitude intérieure. La Règle de Saint Benoît, ce grand moine d’Occident, commence par : « Ecoute, ô mon fils » et il s’adresse à ses moines. Ecoute. Et on sait bien qu’on a plutôt tendance à parler qu’à écouter, à savoir par nous-mêmes plutôt que de se laisser nourrir par la connaissance de Dieu. Alors c’est une question que nous devons nous poser simplement, sans drame. Qu'est-ce que je fais de la Parole de Dieu ? Il y a une Tradition Liturgique dans l’Eglise qui consiste à ce que la Parole de Dieu soit toujours sur l’autel, sur tous les autels orthodoxes vous trouverez la Parole de Dieu, toujours. Et lorsque l’évêque ou le prêtre ou le diacre entre dans le sanctuaire, il vénère l’Evangéliaire, il l’embrasse car, comme une icône, la Parole de Dieu est présente, là, sur l’autel et elle va devenir agissante si je veux bien l’écouter, si je veux bien la faire mienne, l’assimiler, la prendre comme une nourriture car la Parole de Dieu est sans aucun doute la nourriture la plus efficace qui soit sur cette terre. Interrogeons-nous, essayons de répondre le plus librement et le plus authentiquement à cette question. Qu'est-ce que je fais de la Parole de Dieu ? Et puis demandons au Seigneur d’ouvrir les oreilles de notre cœur pour effectivement entendre ce qu’Il a à nous dire au travers de cette parole sainte.
Amen

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