Monastère Saint Silouane

Carême de Noël

Chers Frères et Sœurs,

Voici que nous entrons dans le temps de carême de Noël, le temps de « l’attente »!
Et nous sommes toujours dans le désert... ce temps qui n’en finit plus pendant lequel on se cache du « lion qui rôde, cherchant qui dévorer » ; le virus est toujours là avec ses conséquences douloureuses.
Au demeurant ce carême est un temps d’attente mais pas de n’importe quelle attente.
C’est l’attente de la venue du Christ parmi nous. C’est l’attente du salut. C’est l’attente
de la délivrance ...
Probablement que nous aurons encore des jours difficiles face à cette épreuve du mal,
de la peur de la maladie ou de la mort. Mais la peur ne vient jamais de Dieu , elle vient du démon qui cherche à nous décourager, voir à désespérer ! , ne nous laissons pas avoir par le menteur. Puisque c’est l’attente de Dieu qui marque ce carême essayons
de correspondre au mieux à cette période.
Soyons des êtres de désir ! Désirons Dieu, désirons le Christ de toutes nos forces!
Et demandons lui de nous aider à entrer dans ce désir et d’agir en conséquences :
Oui nous sommes pauvres, démunis, les nouveaux « Anawims », les pauvres de Yahvé, les pauvres de Dieu, c’est-à-dire les « courbés », les « inclinés », les petits, les faibles, les humbles, les affligés, les doux...mais soyons aussi les frères des pauvres,
Soyons près d’eux par la prière, par l’entr’aide, par la compassion. Voilà un beau programme de carême ! Ne cherchons pas trop loin pour les trouver, ces pauvres! Ils sont souvent à côté de nous, dans notre famille ,notre maison, notre communauté, notre paroisse. Et n’oublions pas que soulager notre frère c’est soulager le Christ...
Alors si nous désirons Dieu, nous l’aurons trouvé.
Vivons ce temps dans l’humilité : nous avons tout à y gagner , Marie la très Sainte Mére de Dieu fut celle sur laquelle le Seigneur a jeté les yeux « sur la pauvreté de sa servante », sur son « humilité ».
Noël est le mystère même de la pauvreté, pauvreté d’un Dieu qui se fait pauvre parmi nous pour nous rendre riches de son amour, de sa miséricorde, de sa compassion...
Oui nous sommes dans cette attente , dans une certaine détresse, mais nous avons
l’espérance qui est la plus forte ! Alors laissons nos peurs, prions, jeûnons, veillons,
Ayons foi en Dieu et ...le désert refleurira !

+Syméon
Évêque de Domodedovo
Monastère Saint Silouane

Généalogie

22/12/2019 Mt I, 1-25
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous venons d’entendre cette longue généalogie que nous rapporte l’Evangéliste Matthieu, une généalogie un peu particulière : elle ne correspond pas à la généalogie que nous aurions faite aujourd'hui de nos ancêtres mais peu importe ; ce que veut signifier l’Evangéliste c’est que, à partir d’Abraham jusqu’à Jésus, il y a tout cet ensemble d’hommes et de femmes qui cherchent Dieu à leur manière. Abraham qui est le premier cité est le Père de la foi : c’est celui qui a dit oui à Dieu d’une manière tout à fait catégorique dans la confiance totale et l’abandon entre les mains du Seigneur puisque Dieu lui disait : « Va où je te montrerai » ; il ne savait pas où il allait atterrir mais il est parti, il a obéi à Dieu dans la confiance. A l’autre bout de la généalogie, nous trouvons joseph et Marie qui eux aussi vont dire oui face à l’incompréhensible ; c’est comme s’il y avait une clôture de ce oui d’origine d’Abraham qui vient prendre toute son ampleur dans le oui de Joseph et de Marie. Alors dans cette généalogie il y a des gens très bien, il y a des justes mais il n’y a pas que des justes : il y a des brigands, il y a des tyrans, il y a des pécheurs bien évidemment ; on cite David, Saint David, mais avant d’être saint il a connu la faute, le péché grave, gravissime, un double péché : meurtre et adultère et pourtant puisqu’il se repend, puisqu’il comprend qu’il s’est égaré, de nouveau il dit oui au Seigneur. Le Christ Jésus en naissant vient donner à tous ces hommes ce qu’on pourrait appeler l’Adam total qui commence et qui se terminera à la fin des temps ; le Christ Jésus vient donner quelque chose de plus : ce n’est plus l’humanité, c’est l’humano-divinité ; en naissant Jésus nous offre sa divinité, un partage ; ce partage a commencé certes dès le début : c’était l’intention de Dieu lorsqu'Il a créé Adam, le premier homme ; ce partage s’est fait pédagogiquement tout au long de l’Ancien Testament puis se poursuivra pédagogiquement aussi ensuite jusqu’à la fin des temps ; en définitive, le Seigneur nous apprend à dire oui : « Oui, je veux bien être sauvé, oui je veux bien être divinisé, participer à Ta divinité » ; parce que ce n’est pas si évident que cela à cause de notre faiblesse, des faiblesses qu’ont connues tous nos ancêtres et tous ceux qui viennent d’être cités ; à certains moments on dit oui à Dieu et puis à d’autres moments on écarte Dieu et même on arrive à Lui dire non mais pour Dieu qui est miséricordieux il y a toujours une solution. Combien d’années se sont passées depuis Abraham jusqu’à la venue du Christ ? C’est difficile de le savoir mais en tout cas ce fut un long, long, long moment ; long moment entaché de fautes, d’errance, d’erreurs, de renonciations ; le peuple de Dieu n’était pas facile à manier pour Dieu, il avait la nuque raide comme il est dit dans l’Ancien Testament et puis à chaque fois le peuple de Dieu se repentait parce que Dieu venait lui tendre la main, ne l’abandonnait pas, jusqu’au moment où le Christ est venu d’une manière définitive pour nous tendre la main définitivement : Il tend la main à Adam et Eve pour les tirer du tombeau et les mettre debout ; Il nous tend la main à nous, nous tous qui sommes ici et à tous les hommes de la terre ; Il tend la main et Il nous tire de notre boue, de notre misère, de notre faiblesse, de nos péchés, de nos errances et nous en tant que chrétiens nous le savons, cela nous a été révélé ; le Christ a dit : « Je suis venu pour vous, non seulement pour les ancêtres mais pour vous aussi et pour ceux qui viendront » ; Il est venu pour nous et Il ajoute « Je suis venu pour les pécheurs et non pas pour les Justes », autrement dit Il est venu pour nous car nous sommes chacun des pécheurs certes pas tout le temps mais à certains moments et de toute façon nous sommes responsables de ce qui se passe dans l’humanité, dans l’humanité entière : nous avons la responsabilité d’accueillir la main du Christ, d’accueillir la miséricorde du Christ pour tous ceux qui, à certains moments s’échappent de cette main pour des raisons variées, diverses ; ce n’est pas à nous de juger; le Christ nous le dit : « Ne jugez pas » ; ce n’est pas à nous de juger ; c’est à nous d’essayer, comme le Christ, de faire miséricorde à notre frère, à notre sœur, de l’aimer au-delà de l’impossible apparent ; il y a des situations lourdes dans la vie, peut-être nous en connaissons certaines dans notre histoire ancienne ou récente, des moments où on ne sait plus, on ne sait plus quoi faire face à une situation inextricable, on n’a pas les moyens pour aider notre frère, notre sœur, notre enfant, on ne sait pas mais le Christ le sait et notre responsabilité c’est d’aller frapper à la porte du Christ et de dire : « Donne-nous Ta miséricorde, donne-nous accès à ton amour ; Tu l’as dit : frappez et je vous ouvrirai » ; je frappe à ta porte et je te dis : « Viens, viens à mon secours, viens au secours de mon frère » ; car en naissant, le Christ est venu au secours de l’humanité entière, de tous qui l’avaient précédé et de tous ceux qui lui succèderaient jusqu’à la fin des temps. Autrefois, dans mon enfance, on appelait l’Ancien Testament l’Histoire Sainte ; c’est une autre manière de voir les choses : non plus l’Ancien Testament mais l’Histoire Sainte ; elle devient sainte à cause de la naissance du Christ ; elle est transfigurée cette histoire, elle est transformée, ce n’est plus la même, c’est l’histoire de l’amour, de l’amour de Dieu et cette histoire sainte se poursuit jusqu’à aujourd'hui et puis demain et après-demain et jusqu’à la fin ; nous avons nous la responsabilité de sanctifier, avec le Christ bien sûr, cette histoire, puisque nous sommes divinisés à partir du baptême ; nous appartenons à Dieu, nous goûtons de sa divinité et nous pouvons frapper à sa porte pour que l’humanité entière soit sauvée, soit guérie, voie ses plaies apaisées, ses souffrances diminuées ; c’est notre responsabilité de chrétiens pour l’humanité entière. Nous fêterons Noël dans quelques jours, la Nativité du Christ ; nous célèbrerons cette fête dans la joie, bien sûr, puisque le salut nous est donné mais n’oublions pas que le salut nous est donné au travers de la pauvreté dans laquelle le Christ vient habiter, de la misère dans laquelle le Christ vient habiter, des conséquences du péché dans lesquelles le Christ vient habiter ; c’est cela le salut car lorsque Jésus naît, il naît dans la pauvreté totale, dans la fragilité totale ; ce n’est pas quelques bergers puis plus tard quelques mages qui rendent l’évènement extraordinaire c’est Lui qui rend l’évènement extraordinaire en venant participer à notre vie, à nos souffrances jusqu’à la mort et la mort sur la croix pour nous dire qu’Il nous aime et qu’Il nous sauve de cette façon-là et qu’Il nous ouvre les portes de son coeur totalement : nous pouvons nous y plonger à chaque fois que nécessaire lorsque nous errons, lorsque nous sommes effrayés, lorsque nous avons peur de la situation dans laquelle nous nous trouvons, dans laquelle nous souffrons ; plongeons-nous dans le coeur du Christ, dans ce coeur d’amour qui n’a de cesse de déverser comme un torrent de miséricorde pour chacun d’entre nous. Voilà ce que l’on peut dire – et on pourrait dire encore beaucoup d’autres choses de cette généalogie qui paraît un peu bizarre, elle est un peu lassante même cet généalogie : on répète des noms, des noms, des noms ; on n’en connaît qu’une partie et encore ; mais il y a quelque chose derrière, c’est cela qu’il faut découvrir ; ce qu’il faut découvrir c’est l’amour de Dieu qui mène son peuple jusqu’à l’arrivée du Christ, qui le prépare, qui l’éduque ; c’étaient des barbares pour la plupart mais est-ce que nous sommes mieux aujourd'hui ? Je pense qu’il y a encore pas mal de barbares sur la terre mais Dieu est toujours là pour nous éduquer, nous éveiller, nous encourager, nous illuminer, nous tendre la main. Que cette main tendue nous la prenions tous pour tous les hommes de la terre et que nous ne la quittions pas.

Amen

Foi Mère de Dieu

18/8/2019 Mt XIV, 22-34

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
L’histoire qui nous est rapportée dans ce passage évangélique est sans aucun doute un enseignement pour chacun d’entre nous par rapport à ce qu’est la foi. En effet, lorsque Jésus, marchant sur les eaux, apparait aux apôtres, leur premier réflexe n’est pas de croire que c’est Lui mais ils ont peur, ils ont peur que ce soit un fantôme. St Pierre lui-même aura un doute puisqu’il mettra une condition au Seigneur : « Si c’est Toi, si c’est bien Toi alors ordonne que je marche sur les eaux ». Et le Seigneur va l’éprouver, il va lui montrer qu’il ne suffit pas de mettre des conditions pour avoir la foi et que c’est une grâce que l’on doit demander avant tout à Dieu. En effet, Pierre, sur la proposition du Christ se met à marcher sur les eaux mais il est repris par le doute car sa foi n’est pas assez vive puisqu’il a mis une condition à Jésus pour croire et il arrive ce que nous avons entendu : au bout d’un moment, Pierre a peur et commence à couler dans l’eau. Au demeurant, il a ce réflexe – bon réflexe – de crier vers le Christ et de Lui dire : « Sauve-moi ». Et Jésus le sauve non sans lui avoir dit qu’il était un homme de peu de foi. Alors, voyez-vous, cet épisode marquant, nous ramène à nous-même : est-ce que comme Pierre nous avons la foi à condition que Dieu nous montre quelque chose qui nous encourage, qui nous fasse ne plus douter ou avons-nous une foi pure sans condition – car une foi avec une condition n’est pas une vraie foi. Chacun devra répondre à cette question devant Dieu. Il est évident que, je pense, pour chacun d’entre nous, il y a des moments où nous avons une foi vive, claire, forte, conséquente et, à d’autres moments, comme Pierre nous voudrions bien croire mais è condition que … Dieu se manifeste. C’est un réflexe de notre nature humaine, il y a donc une certaine logique par rapport à la nature déchue que nous avons mais ce n’est pas la véritable attitude. Il faudrait, avec la grâce du Seigneur, il faudrait que nous nous entraînions à croire véritablement sans condition. Ce n’est pas facile mais nous venons de fêter, nous fêtons encore, la Dormition de la Très Sainte Mère de Dieu qui elle a cru sans douter et pourtant ce que lui disait malgré ce que lui avait dit l’Archange Gabriel ; l’évènement aux pieds de la croix pouvait laisser dans son coeur un doute par rapport à ce qu’elle avait entendu au début et ce qu’elle voyait à la fin mais elle est restée debout, c'est-à-dire dans la foi par rapport au Christ qui avait enseigné ses apôtres, elle-même et ceux qui l’entouraient en leur disant bien qu’Il ressusciterait au troisième jour. La seule qui n’a pas douté c’est elle ; tous les apôtres ont douté : à Getsemani tout le monde est parti ; ils ont tous laissé le Christ seul, arrêté, ils avaient peur ; nous aurions probablement fait la même chose ; mais la Mère de Dieu, elle, n’a pas douté. C’est pour cette raison – comme je l’ai dit le jour de la fête - qu’elle doit être pour nous une référence, une étoile qui brille haut dans le ciel, très haut, aussi haut que son Fils et que nous pouvons regarder lorsque nous sommes troublés, nous avons un doute, nous sommes inquiets, angoissés ; nous pouvons nous tourner vers elle et lui dire d’intercéder auprès de son Fils pour que notre foi soit réveillée, rallumée, réactivée, qu’elle devienne un sentiment fort qui nous laisse debout et non pas écrasé. Nous avons souvent à être confrontés à des épreuves, bien sûr, à des moments difficiles, des choses désagréables que nous n’aimons pas mais il faut alors nous tourner vers la Mère de Dieu ; elle aussi elle a eu des moments désagréables mais elle a cru ; il nous faut nous tourner vers elle pour demander une part de sa foi, qu’elle nous rende plus solide, plus ferme dans notre foi et que nous puissions ainsi poursuivre notre route comme les apôtres l’ont poursuivie. Ils ont eu du mal à croire – on en a la preuve aujourd'hui de ce passage mais il y a encore bien d’autres passages où nous voyons que les apôtres ont des doutes. Au demeurant, aux pieds de la croix, l’un d’entre eux était là aussi debout, St Jean. Et comme les autres il avait douté, il s’était même enfui de Getsemani mais il s’était quand même arrangé pour être près du lieu où la Christ allait être jugé, Pierre était là aussi d’ailleurs ; il a suivi le Christ dans sa Passion jusqu’au moment où, avec la Mère de Dieu, il est debout aux pieds de la Croix. Ce qui veut dire que c’est possible, c’est possible pour la Mère de Dieu et c’est possible pour St Jean qui était comme nous, un pécheur. Cela doit nous donner l’espérance, cette petite vertu à laquelle on ne pense pas souvent. Que Dieu, comme le Christ l’a fait à St Pierre, nous tende la main et nous mette debout là où nous avons tendance à nous effondrer.
Amen

Foi jeûne prière carême

7/4/2019 Mc IX, 17-31

A
u nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Ce récit de la guérison de ce jeune enfant est accompagné de tout un enseignement de la part du Seigneur Jésus, enseignement qu’Il donne au Père de l’enfant ainsi qu’à ses apôtres et tous ceux qui L’entouraient. Les apôtres n’ont pas réussi à expulser le démon qui envahissait cet enfant et essayait de le faire mourir. Jésus nous donne trois repères, trois points qui nous permettent de comprendre que tout est possible à condition, à condition tout d’abord d’avoir la foi : tout est possible, dit-Il, à celui qui a la foi ; le pouvoir c’est la foi. Nous qui avons souvent tendance à croire que nous pouvons agir avec pouvoir sur les autres, dans notre famille, dans notre société, dans notre travail, dans notre monastère, dans notre Eglise, nous n’avons pas entendu la Parole du Christ. Le pouvoir c’est la foi, ce n’est pas autre chose. Autrement dit la foi donne une autorité différente de la notion de pouvoir telle que nous l’avons habituellement dans nos esprits ; c’est instinctivement que nous cherchons à dominer l’autre par le pouvoir, ce n’est pas réservé aux hommes politiques ou aux grands hommes d’Eglise, tous nous sommes atteints par cette maladie d’une manière ou d’une autre à certains moments ; nous confondons le pouvoir et la foi ; le Seigneur est formel si bien que le père de cet enfant comprend ; il n’est pas dit qu’il était un juif pratiquant, on ne sait pas qui c’était mais il dit : « Je crois mais augmente ma foi » ; c'est-à-dire que la foi ce n’est pas quelque chose que l’on a reçu au moment du baptême et que l’on possède ; on ne dit pas j’ai la foi comme j’ai une « mercédès » ou une « jaguar », ce n’est pas la même chose : la foi c’est une grâce de Dieu et c’est une grâce qui est en permanence dans un dynamisme si nous demandons à l’Esprit-Saint de venir nourrir cette foi, la faire grandir, la faire dominer notre être profond, l’animer. Et puis Jésus, aux apôtres étonnés de ne pas avoir pu chasser ce démon, leur dit : « Pour chasser ce démon il faut pour cela prier et jeûner alors ce n’est pas pour rien que cet Evangile est lu en pleine deuxième partie du carême où nous essayons de prier et de jeûner ; les apôtres certainement avaient une tradition de jeûne et de prière d’autant plus qu’ils étaient près du Seigneur mais avaient-ils jeûner et prier avant de penser qu’ils avaient le pouvoir d’exorciser ce garçon ? Ce n’est pas dit et comme le Seigneur leur fait la leçon on peut le supposer mais cette leçon elle s’adresse aussi à nous-mêmes : si nous voulons que le démon cesse de nous attaquer – et pendant cette période, il aime bien nous attaquer, plus on s’avance vers Pâques puis il nous attaque, nous décourage surtout, nous entraîne à désespérer ou avoir des attitudes qui ne sont pas des attitudes chrétiennes ; et pourtant nous sommes dans une période de jeûne et de prière plus intense ; alors la question est de savoir ce que nous faisons de ce temps qui nous est offert et de ce jeûne qui nous est offert, non seulement le jeûne alimentaire, toutes sortes de jeûne. Est-ce que dans notre prière nous essayons – je ne dis pas que nous réussissons parfaitement – mais est-ce que nous essayons d’être dans les mots que nous disons, les phrases que nous prononçons, sinon à quoi bon ? Nous rabâchons mais nous ne prions pas ; il faut que ce soit notre coeur et notre âme qui s’unissent à tout notre être pour que la prière soit une véritable prière, une prière d’action de grâce ou une prière de supplication. St Jean Climaque dont nous faisons mémoire aujourd'hui – ce n’est pas sa fête mais traditionnellement on le cite comme étant le premier pour ce dimanche après le Christ - St Jean Climaque nous a offert des écrits qui s’adressent plus spécifiquement aux moines mais que l’on peut lire aussi et interpréter même si l’on n’est pas moine ; c’est un écrit qui s’appelle « l’Echelle sainte » c’est pour cela que l’on appelle St Jean St Jean Climaque – le mot climacus voulant dire échelle - et il nous propose des degrés comme si nous devions monter sur des barreaux d’échelle au fur et à mesure ; je dois dire que quand on lit ce texte – nous le lisons actuellement tous les midis – quelque fois c’est un peu effrayant parce qu'on se dit : « Mais ce n’est pas possible, cela je n’y arriverai pas » et plus on lit plus on se dit : non je n’y arriverai pas mais bien sûr que l’on n’y arrivera pas si on n’a pas l’idée de demander le secours de Dieu, si on pense que c’est par nous-même que nous allons gravir les barreaux de l’échelle, alors là dès le premier échelon, cela casse, ce n’est pas la peine d’essayer d’aller plus loin si on ne met pas Dieu en activité dans notre profonde conviction d’ascèse ; alors oui, c’est difficile : tout ce que dit St Jean Climaque est très exigeant, très difficile ; lui-même s’est appliqué cette règle et il reconnaît lui-même à certains moments qu’il n’y arrive pas toujours ce qui veut dire que St Jean Climaque avait non seulement la notion de ce que l’on doit faire dans la vie spirituelle, dans la vie ascétique mais il avait aussi l’humilité de reconnaître que ce n’était pas toujours facile et quelque fois même pas possible.
Alors il faut peut-être ajouter à ce bel Evangile une autre leçon par la voix de St Jean Climaque : l’exigence ascétique ne peut être vécue que par l’humilité et la supplication vers le Seigneur.
Lorsque j’étais tout jeune novice, à 23 ans, j’étais dans l’erreur de penser que j’avais des ailes qui poussaient déjà derrière mon dos, je croyais que je m’élevais déjà vers les hauteurs parce que Dieu donnait des grâces – il donne toujours des grâces au débutant - mais très vitre mes ailes sont tombées et moi avec et j’étais désespéré : mon orgueil était atteint cela c’est sûr et je n’avais pas compris qu’il fallait aller puiser dans l’humilité alors c’est mon père spirituel qui me l’a expliqué : il a dû me l’expliquer de nombreuses fois et aujourd'hui je peux vous dire qu’à l’âge que j’ai j’ai l’impression que ce n’est pas encore tout à fait rentré mais j’en ai le désir et ce désir suscite la prière et si on va vers la prière on va vers Dieu et si on va vers Dieu alors ca va bouger ; peut-être qu’on ne verra rien du tout et qu’on aura même l’impression de régresser, tout simplement parce qu'on découvrira progressivement ce que le Seigneur nous montre en levant le voile qui couvre nos incapacités : Il n’enlève pas le voile d’un coup, nous en mourrions ; Il soulève le voile tout doucement pour que nous regardions ce qu’il y a en nous dans notre coeur et dans notre âme qui est à corriger mais qui est à corriger non pas par notre volonté seule, mais avec son aide, avec la foi, avec le jeûne et la prière.
Alors je pense que ce temps du carême qui est un temps fort de l’année – peut-être un des plus grands, des plus forts - même si nous constatons que nous n’arrivons pas à grand-chose, même si nous avons l’impression de régresser, ne soyons pas découragés parce que cela c’est l’attaque du démon le découragement : il veut nous dire que ce n’est pas la peine que nous fassions des efforts puisque nous n’arrivons à rien, laissez tout ; c’est une tentation classique ; mais non, ne nous laissons pas avoir par cette tentation mais tournons-nous vers le Seigneur avec humilité en reconnaissant « Oui, oui, c’est moi qui n’arrive pas à ceci, à cela : je ne sais pas obéir, je ne sais pas jeûner, je ne sais pas prier, etc., etc. mais c’est moi qui viens vers Toi qui as dit : venez vers Moi vous tous qui peinez ; Je suis venu pour les pécheurs, pas pour les justes » ; alors on peut aller vers le Seigneur, on peut s’approcher du Seigneur ; on peut comme l’hémorroïsse toucher un bout de son vêtement ; pour nous ce bout de vêtement c’est l’Eucharistie : nous recevons le Seigneur en nous, c’est encore plus grand que de toucher le vêtement : Il vient en nous dans un tabernacle qui n’est pas forcément doré, argenté, travaillé superbement car le tabernacle que nous sommes est souvent avec un peu de poussière, il y a du ménage à faire mais le Seigneur vient quand même parce qu'Il est parfaitement humble : Il l’a dit « Je suis doux et humble de coeur » et c’est dans cette humilité et cette douceur qu’Il ose venir en nous dans ce tabernacle humain que nous représentons qu’Il a choisi pour venir en nous, pour nous mettre debout dans sa lumière, pour nous aider à avancer et Il le fait avec douceur. Alors soyons dans la reconnaissance, soyons dans l’action de grâce, soyons aussi dans l’humilité et la demande humble de la grâce et soyons certains, par la foi, par la foi, que nous pouvons gagner sur le démon, plus exactement que le Christ a déjà gagné sur le démon.
Amen

Foi jeûne et évangile

25/8/2019 Mt XVII, 14-23

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Vous l’avez sans doute remarqué, le Christ face à cet homme et à cet enfant possédé a une réaction de colère : « Jusques à quand serais-je parmi vous, engeance incrédule ? » C’est à ses apôtres qu’Il s’adresse par ces mots. En effet les apôtres – nous le verrons plus tard – n’avaient pas su guérir ce malade, ils n’ont pas su chasser ce démon et le Seigneur insiste sur la nécessité d’avoir la foi puis il ajoutera : « Ce genre de démon ne se chasse et ne se vainc que par le jeûne et la prière ». Autrement dit cette péricope évangélique peut se résumer à trois mots la foi, le jeûne et la prière. Bien sûr nous entendons souvent dans les Evangiles qu’il est question de foi ; très souvent le Seigneur Jésus demande à ceux qui veulent être guéris : « Crois-tu ? » ; c’est la première question et ensuite souvent Il leur demande « Veux-tu ? » puisqu’Il nous veut libre mais d’abord « Crois-tu ? ». En effet ce que le Seigneur offre aux hommes en guérissant les uns et les autres, ce n’est pas un acte de magie, c’est la conséquence d’un acte de foi ; nous avons beaucoup d’exemples dans l’Evangile, en particulier celui du centurion qui s’approche du Seigneur : il n’était pas juif, il était Romain, il savait que le Seigneur était un thaumaturge et lorsqu'il lui demande de guérir celui qui est dans sa maison, le Seigneur lui demande : « Crois-tu ? ». Il aurait pu répondre « non » - il était Romain, en principe les Romains adoraient tout sauf Dieu ; mais il répond : « Oui Seigneur je crois mais augmente ma foi » ; c’est une belle réponse, c’est une réponse que nous devons retenir pour nous-même. Les apôtres n’ont pas eu suffisamment de foi pour chasser ce démon ; s’ils avaient véritablement prié et jeûné, disant au Seigneur : « Oui, nous croyons mais augmente notre foi » ; car demander au Seigneur d’augmenter notre foi c’est un acte de foi aussi : notre foi n’est jamais parfaite ; elle est en mouvement, elle en chemin, elle est en dynamisme ; nous devons solliciter le Seigneur à chaque fois que nécessaire pour que notre foi grandisse et que s’accomplisse la volonté de Dieu sur chacun d’entre nous. Est-ce que – c’est une simple question parmi beaucoup d’autres que l’on peut se poser – est-ce que lorsque nous faisons le signe de la croix sur nous, nous pensons que, par la croix, le Seigneur nous a sauvés ou bien faisons-nous les choses par habitude ? ; le Père Sophrony, de sainte mémoire nous disait toujours que le signe de la croix, nous ne pouvons pas le faire n’importe comment, pas rapidement comme cela, non, il disait : « Prenez votre temps et bénissez tout votre être par le signe de la croix qui est le signe du salut » ; mais à condition de croire dans ce que nous faisons, que notre cœur et notre intellect soient dirigés vers le Seigneur Jésus mort sur la croix et ressuscité pour nous. Les apôtres avaient déjà assisté à plusieurs miracles du Seigneur ; le Seigneur les enseignait tous les jours – nous en avons trace dans les Evangiles – mais Il leur a dit beaucoup plus de choses que ce qui est écrit dans les Evangiles. Et pourtant ce jour-là, ils n’ont pas su chasser le démon et le Seigneur leur fera le reproche : « Vous n’avez pas assez de foi, vous ne croyez pas ; vous écoutez ma Parole mais vous ne croyez pas ». Parce qu'on peut lire l’Evangile toute sa vie ; beaucoup de gens ont lu l’Evangile ; on dit que la Bible est le livre le plus lu dans le monde ; mais croit-on dans ce qu’on lit ? Si de si nombreuses personnes lisent la Bible alors le monde devrait être autrement ; c’est la preuve qu’on lit la Bible comme un texte sympathique, agréable, intéressant qui peut donner des repères pour la vie mais cela s’arrête là. Et nous d’ailleurs, qu'est-ce que nous faisons en lisant la Parole du Christ ? Il n’est pas facile de croire ; nous avons tous à certains moments des idées de doute mais ce qui doit réveiller notre foi c’est la Parole du Christ ; lorsque nous la lisons dans l’Evangile, elle doit réveiller notre coeur et notre foi, nous donner envie d’aller au-delà de ce que nous lisons, d’en vivre et pour ce faire nous avons comme une envie de prier et la prière va venir doucement, peut-être très simplement, peu importe ; le Seigneur ne comptabilise pas nos prières, ni leur longueur ; ce qui L’intéresse c’est la qualité de la prière qui jaillit du coeur de l’être ; c’est cela qui est important, peut-être était-cela que les apôtres n’avaient pas suffisamment compris ? Et puis Il leur parle du jeûne aussi qui est nécessaire à certains moments pour montrer que ce qui nous intéresse c’est d’être nourri de la Parole de Dieu plus que de la nourriture terrestre ; c’est encore un acte de foi. Alors voyez-vous au travers de cet Evangile que nous connaissons bien, bien sûr, et plus nous vieillissons et plus nous avons l’impression de l’avoir lu des centaines de fois mais si on le relit sans cesse, si l’Eglise nous propose cette relecture, c’est justement pour réveiller notre foi, pour la remettre dur les rails, comme l’on dit, pour que nous avancions dans l’abandon entre les mains du Christ quelle que soit la situation que nous vivons. Il y a des situations difficiles, des situations personnelles, des situations familiales, sociales et des situations ecclésiales évidemment, et alors, et alors où est le problème ? Est-ce que j’ai la foi ? Voilà le problème, voilà la question et voilà la réponse. Si nous commençons à cogiter intellectuellement sur nos interrogations, nous savons déjà le résultat : on n’ira pas loin mais si nous nous prosternons aux pieds du Christ, aux pieds de Dieu comme cet homme en croyant que le Christ, le Dieu peut tout : Il peut chasser les démons ; en ce moment les démons attaquent, attaquent les Eglises, notre Eglise ; n’oublions pas qu’il s’appelle le diable, diabolos, celui qui sépare, qui coupe, qui écarte, qui détruit mais si nous avons la foi, le démon est obligé de s’enfuir ; un seul signe de la croix suffit pour qu’il parte ; il faut que nous le croyons, il faut que nous en vivions ; et pour ce faire, sans aucun doute, comme le dit le Seigneur à ses apôtres, la prière et le jeûne seront utiles, plus que les cogitations intellectuelles, plus ou moins intelligentes. Alors que le Seigneur nous permette de voir notre foi grandir, à condition que nous le demandions.
Nous fêtons la translation des reliques de St Barthelemy, nous fêtons St Tite, nous fêtons les saints tous les jours. Prions les Saints et les Saintes. Pourquoi sont-ils Saints et Saintes ? Parce qu'ils étaient parfaits ? Non, aucun n’a été parfait lorsqu'ils avaient la foi : ils avaient la foi et ils priaient et ils pleuraient et ils s’agenouillaient devant le Seigneur et ils recommençaient jusqu’à la fin de leur vie. Alors que ces saints et ces saintes soient pour nous un réconfort, d’une part, un moyen d’intercession d’autre part, un modèle, des phares ; qu’ils nous illuminent et qu’ils nous donnent le goût de la sainteté, c'est-à-dire le goût de vivre notre foi.
Amen

Foi humilité

14/7/2019 Mt VIII, 5-13

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
La guérison que Jésus offre au serviteur de ce centurion nous permet de recevoir un enseignement qui doit nous aider à avancer dans notre vie spirituelle. D’une part, nous constatons que le Seigneur Jésus applique sa miséricorde à tous ceux qui le Lui demande, pas uniquement aux fils d’Israël qui lui étaient confiés, mais aussi à tous ceux qui ont besoin de sa miséricorde. Le centurion était un occupant, c’était un romain. Au demeurant il aura entendu parler de la capacité du Christ à aimer jusqu’à guérir ; il ose s’adresser à Lui ; il s’adresse à Lui avec une grande foi et c’est ce qui va susciter dans le coeur de Jésus le désir de guérir son serviteur et aussi parallèlement de donner une leçon à ceux qui l’entourent car Il dira : « Même en Israël Je n’ai pas trouvé une aussi grande foi ». Cet homme était un païen et pourtant il avait compris dans son coeur que Jésus était quelqu'un de particulier, de spécifique qui venait pour annoncer le salut, qui venait pour procurer le salut, qui venait pour guérir tous ceux qui avaient besoin de guérison, que ce soit guérison de l’âme ou du corps. Oui, Jésus est dans l’admiration de la foi du centurion ; il lui dit : « Je ne suis pas digne que tu entres dans ma maison mais si tu dis seulement une parole mon serviteur sera guéri ». Alors pour nous quelle est la leçon ? C’est une leçon d’humilité car souvent nous demandons au Seigneur quelque guérison morale, physique ou spirituelle mais nous le faisons avec peut-être trop de certitude personnelle et non pas de foi. Nous le faisons peut-être avec foi mais sans humilité car ce qui frappe dans l’attitude du centurion c’est son humilité : « Je ne suis pas digne ». C’est là la leçon pour nous ; nous pouvons demander au Seigneur Jésus tout ce que nous voulons ; Il l’a dit : « Demandez, frappez, je vous ouvrirai. Venez à Moi, vous tous qui peinez, je vous soulagerai ». Il a dit toutes ces choses mais il faut que nous venions vers le Seigneur pour demander certes une guérison de quelque sorte qu’elle soit mais il faut que nous la demandions avec humilité en reconnaissant que nous ne sommes pas dignes d’être guéris mais que nous croyons malgré tout que le Christ peut tout, même chez l’indigne. En définitive, si nous avons le courage de nous regarder bien en face, nous verrons que nous sommes tous indignes par rapport au Christ ; nous avons tous commis des péchés, des fautes, nous sommes tombés dans des faiblesses et il faut que nous ayons le courage de dire au Seigneur : « Oui, c’est bien moi qui viens vers Toi malgré mon indignité. Je veux bien me laisser regarder dans mon indignité mais aussi, entend ma parole et guéris-moi ». Dans un psaume nous entendons : « Un pauvre a crié et Dieu l’a exaucé ». Le pauvre c’est le centurion, le pauvre c’est moi, le pauvre c’est vous, le pauvre c’est l’humanité entière. Nous sommes pauvres parce que nous nous sommes appauvris nous-mêmes par nos fautes mais le Seigneur peut nous guérir si nous acceptons d’être regardés par Lui dans la vérité profonde de notre être, dans notre incapacité d’aimer, dans notre incapacité d’être humbles, dans notre incapacité à suivre ses commandements. Mais si nous le reconnaissons, si devant Lui nous disons : « Oui c’est bien moi, regardes-moi ; je n’ai pas peur que tu me regardes dans ma faiblesse parce que je sais que tu es miséricordieux, je sais que tu peux me guérir de toutes ces faiblesses, plus particulièrement de celle que je te demande aujourd'hui de guérir ». Alors oui, soyons dans une grande foi, comme celle du centurion mais accompagnons notre foi d’humilité profonde, soyons simples, soyons vrais, soyons transparents devant le Christ pour que Lui, reconnaissant cette transparence, cette vérité en nous, cette faiblesse qui nous accable, nous en guérisse et nous exauce par rapport à notre demande.
Amen

Foi dans les miracles

4/8/2019 Mt IX, 27-35

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Nous venons d’entendre le récit du miracle qu’accomplit le Seigneur auprès des deux aveugles et de celui qui était muet et possédé. Nous sommes habitués, dans la lecture de l‘Evangile à contempler les miracles du Christ, peut-être sommes-nous trop habitués au point que cela résonne un peu moins fortement dans nos cœurs et pourtant ces évènements sont d’une importance capitale. Déjà au moment où ils se sont produits ; pour ces deux aveugles et ce muet possédé la guérison qui est survenue par la grâce du Christ et sa miséricorde a été fondamentale, quelque chose qui a bouleversé leur vie ; on peut l’imaginer facilement : lorsqu'on est aveugle on est coupé d’une grande partie de la réalité de la vie, la relation à l’autre est difficile, la vie est compliquée ; c’est une infirmité terrible, aussi terrible que celle qui accablait celui qui était muet : la communication est coupée et le Seigneur Jésus dans sa miséricorde a donné la possibilité à ces trois hommes de retrouver une vie et une relation normales comme celles des autres. Ils seront bouleversés sans aucun doute par ce miracle au point que malgré l’interdiction, les deux aveugles vont témoigner de ce miracle. Alors on peut se demander pourquoi ils ont désobéi ; ce n’est pas vraiment une désobéissance : vous savez bien que lorsqu'on reçoit quelque chose d’extraordinaire, une nouvelle qui nous touche, qui nous bouleverse, qui change notre vie, on n’a qu’une envie c’est d’en parler aux autres, de le dire pour partager la foi, pour vivre dans cette joie profonde qui nous a été donnée et c’est ce qui s’est passé pour les deux aveugles et certainement aussi pour le muet. Les uns et l’autre ont retrouvé la joie de vivre mais il y avait derrière quelque chose d’encore plus important, c’est leur foi ; parce que ce que nous avons entendu de la part du Christ et de la part des aveugles en particulier est une clé pour notre vie à nous. Certes, nous ne sommes pas aveugles physiquement, nous ne sommes pas muets physiquement mais notre coeur et notre âme, à certains moments au moins, ne sont-ils pas aveuglés par le péché, par la faute, par l’égoïsme, par l’orgueil ou bien muet parce que ne sachant plus donner les bonnes paroles qui consolent, qui témoignent de notre amour. Alors pour nous c’est important aussi parce que nous nous apercevons, si nous sommes attentifs, à ce qui a été lu que le Christ entend d’abord les aveugles crier : « Fils de David, sauves-nous » ; ils ne peuvent pas crier ainsi s’ils n’ont pas la foi ; ils ont entendu parler du Christ, certes, comme thaumaturge mais cela ne suffit pas, ils ont la foi : ils savent que le Christ peut les guérir et ils sont tenaces dans leur foi parce que, si nous sommes attentifs, nous voyons que le Christ a cheminé pour aller dans sa maison et c’est seulement arrivé dans la maison qu’Il a questionné les aveugles qui L’ont suivi – on peut même dire qu’ils L’ont poursuivi. Et là Il leur a demandé : « Est-ce que vous croyez que c’est possible et leur réponse a été « Oui, Tu le peux » ; c’est l’expression de leur foi qui se manifeste à ce moment-là et c’est à cause de cette foi que le miracle s’accomplit. Le Seigneur aurait pu les guérir indépendamment de leurs cris. Il pouvait le faire et Il l’a certainement fait vis-à-vis de l’un ou l’autre mais là il y a une manifestation forte de la foi de ces trois hommes qui veulent être guéris et qui savent par la foi que c’est possible. Alors le miracle effectivement s’accomplit et chez lez aveugles et chez le possédé muet. La question pour nous est – puisque l’Evangile c’est la Bonne Nouvelle pour nous – que signifie cette Bonne Nouvelle ? C’est que si nous avons la foi nous pouvons obtenir de Dieu quelque chose qui nous dépasse que l’on appelle le miracle. Nous avons souvent besoin du secours de Dieu. Nous ne pourrions pas vivre sans le secours de Dieu mais il y a des moments plus douloureux, des épreuves dans lesquelles nous passons où véritablement nous ne savons plus comment nous en sortir. Mais est-ce qu’à ce moment-là nous avons le réfléxe
Amen

Dire oui Abandon

24/11/2019 Lc XXI, 12-19
A
u nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Dans le second Evangile que nous avons lu, à l’occasion de la fête des martyrs St Mercure et Sainte Catherine, nous avons entendu le Seigneur donner des conseils à ceux qui l’entouraient, particulièrement ses apôtres, et ces conseils peuvent se résumer en quelques mots : « Ne vous inquiétez pas de ce que vous aurez à dire, ne vous inquiétez pas et soyez fermes ». ; c’est évidemment un conseil dont Il explique tout le sens par rapport aux diverses persécutions et autres difficultés que pourront subir ceux qui L’entourent à ce moment-là. Mais cet Evangile s’adresse aussi à nous aujourd'hui et la question que nous devons nous poser c’est quel est le sens de cet Evangile pour moi aujourd'hui dans ma vie ? Qu'est-ce que cela veut dire ? Tout d’abord, retenons cette phrase : « Ne vous inquiétez pas de ce que vous aurez à dire pour votre défense ». Certes, peu d’entre nous, ont subi le martyre au sens strict du terme mais beaucoup sur cette terre subissent encore le martyre au nom du Christ ; le mot « martyr » en grec signifie « être témoin » mais être témoin de quoi, plus exactement de qui ? Etre témoin de Dieu, de l’amour de Dieu, de l’amour que Dieu nous porte et de l’amour que nous voulons porter à Dieu ; c’est cela être martyr : être un témoin de cet amour. Quant à ce que nous aurons à dire si nous subissons quelques affrontements, peut-être pas jusqu’au martyre du sang mais il y a toutes sortes de martyres : il y a les petits martyres quotidiens qui surgissent dans notre vie ordinaire, les souffrances que nous ressentons face à telle ou telle opposition, tel ou tel désaccord avec notre mode de pensées et puis il y a des martyres un peu plus conséquents. Je pense à un Saint que nous vénérons beaucoup : St Nectaire d’Egine ; il fut, à sa façon un martyr de l’Eglise, de son Eglise qui l’a rejeté par méchanceté, par médisance, qui l’a critiqué et il a été toute sa vie déplacé d’endroits en endroits où il essayait de vivre ce que le Seigneur lui enseignait, l’amour de Dieu, où il essayait de montrer aux autres l’importance de l’amour de Dieu et, à chaque fois, il était déplacé, rejeté, méprisé ; son serviteur lui disait : « mais défends-toi, écris au Patriarche d’Alexandrie » - qui était alors à l’origine indirectement de cette situation mais Saint Nectaire répondait : « Non, non, laisse faire Dieu » et il sous-entendait par là : « Laisse-moi dire ce que Dieu m’inspire ». Qu'est-ce que Dieu lui inspirait ? « Oui, oui j’accepte, j’accepte de souffrir même de mon Eglise ; j’accepte d’être confronté au mal, j’accepte cette souffrance et je la vis en l’offrant pour le salut du monde ». Il n’est bien sûr pas le seul des saints que nous pouvons citer mais il est un type de sainteté très particulier que nous connaissons bien et qui correspond bien aussi à cet Evangile que nous venons d’entendre. « Ne vous occupez pas de ce que vous aurez à dire ». Saint Nectaire ne répond rien sinon « Oui » à Dieu. C’est ce oui à Dieu qui est si difficile pour chacun d’entre nous, pour moi, comme pour vous ; à certains moments nous voulons bien dire oui à Dieu mais à condition que …, nous voulons toujours mettre des conditions ; dire oui à Dieu sans condition, c’est beaucoup plus difficile ; sans la grâce de Dieu, cela est impossible. Nous avons plusieurs exemples, déjà dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau aussi, de personnages qui ont dit oui à Dieu, un oui total, sans condition. Je parlerai d’abord d’Abraham à qui Dieu dit « Va où je te montrerai » ; Il ne lui dit pas : « Va là-bas », Il dit « Va où je te montrerai, c'est-à-dire dans le futur je te montrerai au fur et à mesure là où tu dois aller ; c’était un abandon total dans la part d’Abraham de dire oui au Seigneur et de conduire son peuple là où Dieu avait décidé. Le prophète Moïse est dans la même situation et puis Marie, la Mère de Dieu dira oui à l’Archange sans condition ; elle acceptera, oui, d’être témoin de l’amour de Dieu qu’elle connait et de cet amour qu’elle veut lui donner ; à sa manière elle sera une martyre car on la retrouve aux pieds de la croix là où son Fils est le martyr des martyrs et elle subit dans sa sensibilité de mère, de femme la souffrance de son Fils qui est indicible et elle accepte, elle reste debout aux pieds de la Croix pour montrer que son oui se poursuit. Pour nous, il n’est pas facile quelque fois de dire oui et pourtant c’est la seule voie qui soit la vraie voie : dire oui à Dieu. J’ai entendu de nombreuses fois de jeunes garçons ou des jeunes filles, adolescents, qui disaient : « Je pense que je devrais devenir moine ou moniale » et qui étaient prêts à dire oui et puis, progressivement, se laissaient gagner par les tentations du démon probablement et s’éloignaient de se oui pour vivre autre chose. Il y a des moments où nous sommes dans l’interrogation : « Qu'est-ce que je dois faire » ? Est-ce que je dois répondre oui à tel évènement et bien tant que la foi n’est pas atteinte, nous pouvons toujours dire oui. Si la foi est atteinte alors nous devons rester fidèles à Dieu, dire non à nos ennemis et oui à Dieu.
Ce récit que nous avons entendu n’est pas une histoire ancienne, c’est aussi une histoire d’aujourd'hui ; à chacun d’entre nous de trouver là où il se situe, dans son histoire personnelle comment être amené à dire oui alors que l’on a envie de dire non, non, je n’ai pas envie, je n’ai pas la force mais le problème n’est pas là : il n’est pas question d’avoir envie ou d’avoir de la force, il est question de dire oui à Dieu par rapport à une proposition divine qui passe par un être humain, par l’Eglise, par l’évêque, peu importe ; nous n’avons pas envie et alors ? Croyez-vous que le Christ avait envie de monter sur la croix ? Pourtant Il a dit oui au Père non sans avoir pleuré et son oui est un oui qui sauve l’humanité. Je n’ai pas la force de dire oui mais il ne s’agit pas de notre force, il s’agit de la force de Dieu, c’est Lui qui donne la force, par sa grâce par l’Esprit-Saint alors il faut le prier pour demander la force de pouvoir dire oui dans la situation ou nous nous trouvons. Et lorsque nous disons oui, une grande paix intérieure vient en nous ; au-delà de la souffrance, au travers de la souffrance il y a une paix qui est la paix de Dieu, qui est le signal de Dieu qui vient nous dire : « J’accueille ta réponse pleinement et je te donne la force de la vivre ».
Alors voyez-vous cet Evangile que nous lisons dans tous les cas où nous faisons mémoire des martyrs, il est important pour nous aussi ; peut-être ne serons-nous jamais des martyrs du sang mais des petits martyrs, oui, des petits témoins ; nous sommes appelés à être de petits témoins, quelque fois même des grands témoins comme St Nectaire, entre autres. N’ayons pas peur. Le Christ le dit : « N’ayez pas peur », « ne vous inquiétez pas de ce que vous aurez à dire » parce que la réponse, elle est simple, c’est oui ; il n’y a pas à s’inquiéter, c’est oui du moment que la foi n’est pas touchée et atteinte et c’est cela qui est extraordinaire : c’est que nous connaissons la réponse à l’avance et qu’il nous faut la force de Dieu, la grâce de Dieu pour pouvoir prononcer ce oui qui nous permettra d’avancer là où Dieu nous veut, pas là où nous voudrions être mais là où Dieu nous veut. Dieu est toujours là vous savez pour nous aider à répondre oui. Je pense que, il y a 50 ans, je n’aurai jamais pensé fonder un monastère et même j’aurais dû quand mon Père spirituel me l’a proposé dire non. Je peux vous dire, par expérience – ce n’est pas pour me vanter parce que cela n’a aucun intérêt puisque tout vient de Dieu et pas de moi - mais lorsque j’ai entendu cette proposition : « Tu pourrais peut-être fonder un monastère », à l’intérieur de moi j’ai senti que le oui commençait à naître et qu’une grande paix naissait également dans mon cœur, c’était Dieu qui répondait, c’était Dieu qui me donnait la réponse et pourtant le programme que m’a donné le St Père Sophrony n’était pas si facile : il m’avait dit que c’était impossible à faire mais de le faire, que cela ne se faisait que dans le sang et dans les larmes ; oui, il fallait dire oui ; tout seul je n’aurais pas pu dire oui et même la logique humaine m’aurait entraîné à dire non, c’est impossible : je ne peux pas, je ne suis pas un aventurier, je n’aime pas l’aventure et pourtant Dieu m’a permis, par sa grâce, par sa force, d’ouvrir la bouche pour dire oui. Pour chacun d’entre nous nous pourrions citer des exemples identiques qui que nous soyons et quelle que soit la situation où nous avons été amenés déjà à dire oui alors que nous aurions dû dire non. Alors n’ayons pas peur, n’ayons pas peur puisque le Seigneur nous le dit, n’ayons pas peur : il nous sera donné de donner la bonne réponse si vous la demandez au Père des cieux, c’est Lui qui va déclencher la bonne réponse. Que Dieu nous donne à chacun d’entre nous non seulement de dire oui une fois, deux fois dix fois, mille fois mais de maintenir notre oui : ne pas dire oui un jour et puis après dire non notre oui ; le oui doit durer jusqu’à la fin, jusqu’à la tombe, c’est cela, en définitive, être chrétien ; et pour citer encore le St Père Sophrony : il nous disait, on ne vit pas en chrétien, on meurt en chrétien parce que c’est à la fin de la vie que le oui s’accomplit dans sa plénitude, dans sa grandeur, dans son ampleur, sa valeur aux yeux de Dieu. « Oui j’accepte d’aller vers Toi et d’abandonner tout pour recevoir la plénitude de l’amour ; donc soyons confiants, soyons priant, n’ayons pas peur, et à chaque fois que le Seigneur nous propose de dire oui, guettons cette occasion, ne la laissons pas passer, une occasion de bonheur, de joie et de paix.

Amen

Désir du festin

15/12/2019 Lc XIV, 16-24
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Approchez, approchez …, c’est ce que vous entendrez tout à l’heure au moment où le prêtre sortira avec le Calice pour vous offrir le Corps et le Sang du Christ ; venez, approchez. C’est ce que la Parole nous enseigne aujourd'hui au travers de cette histoire, cette parabole que le Christ raconte à ceux qui L’entourent pour leur faire comprendre quelque chose d’important comme à chaque fois qu’Il parle par parabole ; approchez, venez. Il n’a pas sélectionné ceux qui devaient s’approcher ; Il a simplement dit à tous : « Venez » ; le premier problème qui surgit c’est que plusieurs d’entre ceux qui sont invités s’excusent car ils ont tous une raison pour ne pas s’approcher, pour ne pas entrer dans la maison du festin ; ils ont une raison qui humainement s’explique mais en fait cette raison est dictée par l’égoïsme : « J’ai d’abord quelque chose à faire, oui, je veux bien mais j’ai quelque chose à faire, moi », autrement dit ce n’est pas ton invitation qui m’intéresse, c’est moi dans ce que je dois faire : j’ai un champ, j’ai des bœufs, etc, etc … Et là nous pouvons peut-être nous reconnaître au moins à un certain moment ; lorsque c’est l’heure de l’invitation, l’heure de la Liturgie, l’heure de la prière, l’heure de la rencontre avec le Seigneur qui est un festin, j’ai quelque chose à faire ; cela nous arrive à tous. Souvent quand je rentre dans ma cellule, au moment de la prière, j’ai quelque chose à faire, c’est curieux mais c’est comme ca, alors qu'est-ce que je fais ? Est-ce que je réponds à l’invitation : « Viens, viens dans le partage que je t’offre dans la prière » ou bien vais-je partager avec moi-même ce qui m’intéresse ? C’est tout le dilemme que nous avons ; entre oui, Seigneur et oui, mais … j’ai quelque chose à faire. Alors dans le récit de la parabole le maître du festin est fâché ; il n’est pas fâché de manière coléreuse, il est fâché parce qu'Il est triste ; Il a invité avec générosité, avec amour ; Il a invité à partager cet amour et puis on lui dit : « Oui mais excuse-moi, je ne peux pas ». Notre Dieu Lui aussi est triste lorsque c’est le moment de la rencontre avec Lui dans le festin qu’Il nous propose et que nous avons des raisons pour Lui dire : non, je ne peux pas même si on ne dit pas un non catégorique, c’est plutôt un oui, mais …, ce qui revient au même. Alors le maître de maison demande à ses serviteurs d’aller chercher tous ceux qui n’ont pas été invités mais qui sont dans la région, autour de la maison, du palais et qui sont des estropiés, des boiteux, des malades ; Il dit « Faites les rentrer dans mon palais, dans ma salle de festin » ; les serviteurs vont les chercher ; qui sont ces gens ? C’est nous, nous aussi dans un deuxième volet ; c’est nous les boiteux qui voulons bien avancer mais lentement, lentement ; c’est nous les estropiés, on dirait aujourd'hui les handicapés mais nous sommes tous des handicapés parce que le péché nous rend handicapés, parce que le non-amour nous rend handicapés, nous rend faibles mais le Seigneur invite quand même ceux qui sont handicapés, boiteux, malades ; et il se trouve qu’il reste encore de la place et le Seigneur dit : « Amenez en d’autres ». Alors pour nous cela doit nous faire réfléchir : nous sommes à la fois dans la catégorie de ceux qui disent : « Oui mais, je ne peux pas » et à la fois dans la deuxième catégorie : les boiteux, les hésitants, les malades mais nous avons une place, le Seigneur nous l’offre ; nous pouvons assister au festin, nous pouvons partager le festin même si nous sommes malades, boiteux, estropiés, aveugles, lépreux, peu importe, à condition d’accepter. Tout est possible.
Le prêtre dira : « Avec foi et amour, approchez », alors il faut savoir ce qu’il y a dans notre coeur au moment où nous approchons. J’ai quelques fois entendu des personnes me dire : « Je n’ai pas osé aller communier parce que je me sens pécheur, indigne ». Bon, d’accord ; mais alors qui va s’approcher du calice ? Personne, absolument personne parce que moi comme vous nous sommes avec des péchés, avec des faiblesses, avec des chutes, nous sommes handicapés mais justement le Seigneur dit : « Venez, approchez », il suffit d’avoir la foi et l’amour et si nous nous approchons, si nous goûtons au festin quelque chose d’extraordinaire se passe, Dieu se donne à nous ; ce n’est pas un festin ordinaire dont il est question, c’est le partage de la divinité : nous sommes appelés à être divinisés, à partager la divinité du Christ ; non pas être comme Dieu, comme Adam aurait voulu l’être inspiré par satan mais partageant la divinité de Dieu. Comprenons-nous que nous sommes invités à l’essentiel de notre vie, au but de notre vie ? Pour cela il faut que nous ayons dans le coeur un désir profond malgré notre faiblesse, en reconnaissant notre faiblesse – et c’est tout le sens de la prière que nous disons avant la Communion ; oui, nous sommes le premier des pécheurs ; si nous le reconnaissons et si nous avons ce désir d’une Communion avec Dieu, si nous avons ce désir d’être en communion sur cette terre, à chaque fois que nécessaire mais aussi dans l’Eternité pour toujours, si nous avons ce désir alors tout devient extraordinaire ; ce n’est plus l’ordinaire du oui, mais …, c’est l’extraordinaire : « oui, je viens ».
Ensuite il est dit dans la dernière partie de la parabole qu’il reste encore des places ; pour qui sont ces places ? Pour l’humanité entière, pour ceux qui ne sont pas là directement présents, qui cherchent, comme St Paul dit, à tâtons, avec un voile peut-être devant les yeux et qui ont aussi un désir, un désir d’amour – cela c’est le désir général de toute l’humanité. Pour ceux-là il y a aussi de la place mais il faut que nous soyons responsables d’eux en acceptant nous-mêmes de prendre place au festin avec conscience, avec désir ; alors oui, non seulement nous nous gouterons au festin, au partage divin mais nos frères et nos sœurs du monde entier pourront un jour accéder à ce festin. Vous le comprenez, il faut qu’il y ait en nous un désir profond qui chasse toutes raisons de ne pas venir au festin. Je terminerai en citant cette phrase de St Syméon le Nouveau Théologien : « Viens, toi que j’ai désiré et que désire mon âme misérable »

Amen

Compassion du Christ

8/12/2019 Lc X, 25-37
A
u nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
Cette route qui descendait de Jérusalem à Jéricho, c’est notre route, notre route à chacun d’entre nous : c’est la route où, à certains moments, nous nous trouvons comme cet homme, blessé, attaqué, presque mort, souffrant ; et le Bon Samaritain, celui qui passe près de lui et qui est le seul à s’arrêter près de lui, c’est Jésus, Lui-même, Jésus le Christ qui va devenir, qui devient l’image de la compassion du Père ; oui, Jésus, comme ce Bon Samaritain qui verse de l’huile et du vin sur les plaies de cet homme et qui prend soin de lui à plusieurs reprises, Jésus est toujours là près de nous qui souffrons, qui sommes blessés d’une manière ou d’une autre, pour panser nos plaies en appliquant sur ces plaies la compassion du Père ; c’est quelque chose auquel nous ne pensons peut-être pas toujours et pourtant, et pourtant nos Pères nous disent que lorsque nous communions au Corps et au Sang du Christ nous recevons un médicament pour guérir nos plaies ; lorsque nous nous approchons du saint calice, avons-nous suffisamment conscience que nous allons être guéris ?  Lorsque tout le monde a communié, le prêtre ou l’évêque dit : « Ceci a touché vos lèvres, vos péchés sont pardonnés, vos iniquités sont effacées », autrement dit, vos plaies sont guéries par la compassion du Christ ; alors bien sûr, il ne s’agit pas de se dire : « je suis digne, je ne suis pas digne de m’approcher du calice » ; qui est digne ? Moi ? Vous ? Personne ; il ne s’agit pas de dignité, il s’agit de se laisser guérir, de se laisser toucher par la compassion de Jésus ; quelle grâce magnifique qu’en tant que chrétiens nous recevons ; quelle grâce magnifique qui nous remet debout, quelle grâce magnifique qui nous redonne force et dynamisme pour poursuivre notre chemin sur cette longue route de Jérusalem à Jéricho. Ceci aussi entraîne une certaine responsabilité de la part de notre personne de chrétien parce qu'il y a aussi sur cette route de Jérusalem à Jéricho, à un certain moment, notre frère ou notre sœur qui est là, blessé, pour une raison ou pour une autre ; alors, allons-nous faire comme le prêtre, le lévite ? passer sans rien voir ou passer de l’autre côté de la route ou bien allons-nous faire comme la Bon Samaritain, à l’image de Jésus, nous approcher en aidant, en soulageant, en offrant nous aussi de la compassion de la manière que nous pouvons, par la prière, par l’amour qui jaillit du coeur, par le soulagement peut-être aussi, par un mot, un sourire, un geste, quelque chose qui peut-être peut nous paraître presque insignifiant : mais vous savez, dans nos vies, lorsque nous souffrons intérieurement à cause de nos fautes peut-être ou pour d’autres raisons, lorsque nous avons en face de nous un sourire, un geste d’apaisement, une compréhension, une compassion cela nous fait du bien. C’est ce que Jésus veut nous enseigner au travers de ce récit aujourd'hui ; Il nous enseigne, oui par la Parole – nous l’avons entendu – mais aussi par ce qu’Il a fait et qu’Il continue de faire tous les jours pour nous : appliquer le baume de la compassion du Père sur nos plaies et cela ne s’arrêtera qu’à la fin des temps. Nous avons donc à notre disposition l’amour infini du Christ, sa miséricorde, sa compassion ; nous ne devons pas avoir peur, la peur vient toujours du démon qui veut nous déstabiliser mais nous devons savoir que nous avons sans cesse l’Être le plus parfait de la compassion, l’icône du Père, le Christ Jésus ; cela doit nous consoler, nous conforter, nous relever ; certes à certains moments nous tombons dans des fautes plus ou moins graves, plus ou moins accablantes ; nous sommes tristes ; nous n’aurions pas voulu et nous avons quand même cédé à la tentation ou à notre mauvais penchant mais le Christ est là, pourquoi avoir peur ? Pourquoi se réfugier dans la culpabilité qui n’a aucun sens ?  La culpabilité c’est une espèce de sentiment psychosociologique qui n’a rien de chrétien ; non, nous devons avec humilité – ce qui n’est pas la même chose – dans la vérité de nous-même, nous laisser guérir par la compassion du Seigneur. Oui, c’est une grande grâce et une grande chance que nous avons mais cela entraîne, comme je vous l’ai souvent dit, une responsabilité : nous aussi nous devons devenir l’icône de la compassion du Christ qui est Lui-même icône de la compassion du Père ; nous devons prendre le relai à certains moments ; à nous de trouver les moyens les meilleurs, les plus adéquats, les plus en correspondance avec les besoins de notre frère qui attend sur le bord de la route. Alors nous pourrons remonter de Jéricho à Jérusalem à la Jérusalem céleste car nous aurons accompli ce que le Seigneur Lui-même fait à la perfection, nous aurons essayé nous-mêmes de L’imiter pour être membre du Christ, pour être chrétien.
Amen 5.41

Oui nous sommes dans le désert


Oui nous sommes dans le désert

Méditation pour nous accompagner dans ce temps d'épreuve



Depuis quelques semaines nous sommes dans une situation difficile. Le virus qui atteint nos pays déstabilise nos vies. Les mesures prophylactiques qui nous sont imposées sont lourdes et paralysent notre quotidien. Alors que nous commencions le carême avec dynamisme , espérant retrouver nos offices spécifiques avec joie , on nous demande de ne pas sortir de chez nous, de ne pas nous rendre dans nos églises qui elles-mêmes subissent des contraintes sévères et nous ne savons pas jusqu’à quand nous allons subir cette contrainte .
Face à cet état de faits nous nous sentons perdus, voir abandonnés par Dieu.
Et pourtant ! En tant que chrétiens il nous faut réagir et retrouver un dynamisme de foi .
Le temps du carême a souvent été considéré par nos Pères comme une période de désert. Dans le désert nous sommes confrontés à nous-mêmes, face à nous et, si nous le voulons, face à Dieu !
Peut-être pourrions-nous profiter de cette situation pour en retirer quelques bénéfices spirituels non négligeables …

Oui nous sommes dans le désert.
Si nous relisons la bible nous trouvons un premier exemple encourageant : Abraham.
« Quitte ton pays pour le pays que je t’indiquerai » et Abraham pars dans le désert sans savoir où il va se retrouver , plus tard Moïse conduira le peuple de Dieu dans des conditions fort semblables et ce sera la longue période de l’exode.
Durant tous ces moments Dieu n’a jamais abandonné son peuple, Il l’a guidé, encouragé, quelquefois corrigé mais jamais abandonné !
Ne nous laissons pas tenter par le découragement : « Dieu est avec nous, qui sera contre nous »… Tout le psaume 118 (117) témoigne de cette certitude : « Rendez grâce au. Seigneur car Il est bon car éternelle est sa miséricorde ».
Dieu nous garde, Dieu est notre gardien : « Je lève les yeux vers les monts, d’où viendra mon secours ! Le Secours me vient du Seigneur qui a fait le ciel et la terre… »

Oui nous sommes dans le désert.
C’est un moment propice pour se rapprocher de Dieu, pour se laisser regarder par Dieu dans l’état où nous sommes, peut-être pauvres, pécheurs, démunis, faibles…mais si nous avons le courage de nous abandonner entre les mains du Seigneur nous serons consolés, comme le fils prodigue qui dans sa misère, dans son propre désert, est accueilli par le Père qui l’entoure de ses bras plein d’amour !

Oui nous sommes dans le désert.
Et Jésus, lui-même a vécu cette expérience : comme nous il fut tenté par le démon qui lui suggérait des solutions de compensation, face à la faim, à la solitude (que nous connaissons peut-être aujourd’hui), face au pouvoir… Mais le Seigneur a confiance en son Père et rejette satan
.
Oui nous sommes dans le désert.
Et nous ne pouvons pas communier au corps et au sang du Christ comme nous le souhaitons. Cette situation est éprouvante. Mais les ermites des premiers siècles et ceux d’aujourd’hui ne recevaient et ne reçoive la communion que très rarement. Certes ce sont des cas exceptionnels mais nous sommes dans une situation exceptionnelle.
Par ailleurs dans certains lieux, notamment les monastères, les offices se poursuivent ainsi que les liturgies et nous autres ,moines, qui pouvons communier nous vous associons à cette communion afin que vous en ayez le bénéfice par la grâce de Dieu : c’est notre responsabilité ! Communier c’est être en communion avec tous !
Dans ce temps nous pouvons aussi ressentir la solitude : si celle-ci ne se transforme pas en isolement ne soyons pas inquiets : « on n’est jamais moins seul que lorsque l’on est seul ! » (Guillaume de Saint Thierry)

Oui nous sommes dans le désert.
Dans ce lieu où Dieu parlait au prophète Osée : « je vais la séduire, la conduire au désert et parler à son coeur «  cette phrase s’adresse peut-être aussi a notre âme en ces jours d’épreuve…
Car Oui nous sommes dans l’épreuve, nous sommes contraints d’obéir aux autorités de l’état : c’est humiliant pour nous qui aimons progresser dans la vie spirituelle avec nos propres forces et selon nos principes légitimes. Les afflictions nous humilient or nous dit Saint Jean de Valaam « dans les afflictions nous apprenons l’humilité et comprenons que, sans le secours de Dieu, nos efforts n’aboutissent pas(…) ce n’est qu’aux humbles que Dieu accorde sa grâce. Et sans évènements humiliants, il est impossible de devenir humble! »

Oui nous sommes dans le désert.
Mais il y a un lieu où nous ne sommes jamais seul : c’est notre coeur ! C’est là où la rencontre avec Dieu est toujours possible, c’est là où nous pouvons être en communion avec Dieu . C’est là qu’Il se tient et nous dit sans cesse : Je t’attends! Alors n’hésitons pas à nous rendre à ce rendez-vous : Il nous consolera de nos épreuves, Il nous donnera force et grâce pour « combattre le bon combat » Il ne nous laissera pas orphelins ! C’est le Christ qui nous l’a dit…

Oui nous sommes dans le désert
Mais que celui-ci devienne un lieu de Paix, de joie intérieure, un lieu de prières pour le monde entier qui souffre, soyons le « pauvre qui crie et que le Seigneur écoute » au nom de tous nos frères les hommes!
Gardons dans nos coeurs nos frères et soeurs qui souffrent de la situation créée par cette épidémie, ceux qui sont dans l’angoisse, la peine, la misère, la douleur, prions pour ceux qui nous soignent avec attention, qui cherche les meilleures solutions pour que nous soyons préservés de toute affliction. Notre prière doit attirer la miséricorde de Dieu laquelle sera un baume apaisant sur nos plaies douloureuses!
« L’Esprit divin nous enseigne, même dans le désert, à prier pour les hommes et pour le monde entier » St Silouane.

Oui nous sommes dans le désert mais le désert refleurira !


+Archimandrite Syméon
Higoumène du Monastère St Silouane

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