Unité, amour souffrance
19/7/2020 Jn XVII, 1-13
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
« La vie éternelle c’est qu’ils Te connaissent » ; cette phrase c’est le Seigneur Jésus qui la prononce dans cette longue prière que nous venons d’entendre ; cette longue prière qu’Il adresse à son Père en rendant compte en quelque sorte de sa mission ; « La vie Eternelle c’est qu’ils Te connaissent » mais Il a dit : « Celui qui me connaît le Père », autrement dit – et il développe d’ailleurs cela dans sa prière – tout ce qu’Il a enseigné à ses apôtres était inspiré par l’Esprit-Saint et tout cela venait du Père ; le Fils, la Parole de Dieu incarnée, le Logos – comme L’appelle les Pères – est venu sur terre pour nous enseigner ; Il a enseigné d’abord ceux qui étaient proches, ses apôtres, ses disciples et tous ceux qui l’écoutaient ; Il a enseigné par sa Parole, Il a enseigné par ses gestes, par ses guérisons, par son amour. Et puis dans cette prière, à un moment il dit : « Que tous, tous, soient Un comme Toi le Père et Moi nous sommes Un » ; effectivement c’est un appel à l’Unité de tous les hommes de la terre, non pas une unité matérielle, sociologique mais une unité du coeur ; comme modèle de cette unité nous avons la Sainte Trinité, modèle parfait ; lorsque nous contemplons l’icône dite « de la Sainte Trinité » où nous voyons les trois anges qui apparurent en fait à Abraham et qui furent la préfiguration de la Sainte Trinité, nous voyons trois anges qui sont à la fois identiques, qui se ressemblent et qui se regardent l’un, l’autre, aucun regard n’est dans le vide, les regards sont tournés vers l’un et vers l’autre ; il y a comme une union circulaire entre les trois, une communion d’amour, une unité autrement dit car Dieu est Un, Il est notre modèle : trois Personnes et une seule Divinité. Lorsque le Seigneur Jésus dit : « Que tous soient un », c’est un souhait qu’Il formule parce qu'Il sait à l’avance que pour ses apôtres d’abord, puis pour leurs successeurs et pour tout le monde ensuite, cette unité sera difficile à vivre. Alors comment la vivre ? Puisque l’unité des trois Personnes, c’est l’amour, il nous faut vivre dans l’amour ; il faut chercher à la source l’amour c'est-à-dire vers Dieu d’abord, dans la prière, dans la supplication, dans les larmes quelque fois pour demander cet amour parce que nous ne pouvons pas donner ce que nous n’avons pas déjà reçu ; il faut que nous sachions nous recueillir, entrer dans notre coeur, être en communion avec Dieu et recevoir le bénéfice de cet amour autant que possible dans notre nature humaine et ayant reçu cet amour il nous faut le donner aux autres ; c’est peut-être être là que les choses se compliquent, l’amour n’est pas facile, l’amour est difficile, aimer c’est complexe ; le Seigneur nous l’a d’ailleurs dit : Il est facile d’aimer ses amis, ceux qui sont en harmonie avec nous mais Il va jusqu’à dire : « Il faut aimer nos ennemis », c'est-à-dire ceux qui sont en opposition avec nous ; ce ne sont pas forcément des gens très lointains, quelques fois ils sont tout près de nous, dans notre famille, dans notre communauté, dans notre paroisse, dans notre diocèse et il faut aimer, aimer jusqu’au bout comme le Christ l’a fait ; ne l’oubliez pas, nous sommes sauvés par l’amour sur la croix car Jésus a aimé ses ennemis jusqu’au bout ; Il a même demandé au Père qu’Il leur pardonne parce qu'ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient. Cette phrase, il faut la retenir parce qu'elle peut nous aider beaucoup : lorsque nous sommes en conflit avec tel ou tel, avec des personnes, avec des groupes ; il faut nous en souvenir et prier dans ce sens : « Pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». Certes nous souffrons de l’agissement négatif de certaines personnes envers nous qui nous rejettent, qui nous critiquent, qui nous méprisent quelque fois, qui médisent sur nous, qui diffament ; tout cela existe sur la terre bien évidemment mais il nous faut dire : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » et il faut prier pour eux ; la première chose à faire lorsqu'on a une difficulté relationnelle, donc dans une situation de non-amour, il faut cherche l’amour et prier pour obtenir l’amour ; cela ne se fait pas d’un coup de baguette magique, cela se fait par la ténacité, par le désir d’aimer, d’aimer jusqu’au bout et c’est difficile mais le Christ est là, Il nous a dit : « Je suis avec vous jusqu’à la fin des Temps, n’ayez pas peur ». Il est là donc si nous nous tournons vers Lui, si nous le supplions, si nous pleurons devant lui en disant : « Je n’en peux plus de supporter cette opposition, cette agressivité, cette méchanceté, ce rejet à mon égard, aie pitié de moi » ; alors il sera temps par la pensée ou peut-être par la lecture de revoir le passage de Jésus à Gethsémani : Il souffre de douleurs insupportables au point de demander au Père d’écarter cette coupe, c'est-à-dire ce qu’il doit accomplir normalement, boire la coupe jusqu’au bout et mourir sur la croix ; Il demande au Père d’écarter cette possibilité tellement Il souffre mais Il ajoute immédiatement et c’est là la clé : « Non pas ma volonté mais ta volonté ». Autrement dit, lorsque nous souffrons, rapprochons-nous du Christ qui a été bafoué, qui a vécu sa Passion, sa mort odieuse et qui a tout accepté pour nous sauver et lorsque nous sommes confrontés à ces difficultés relationnelles et bien c’est peut-être une chance pour chacun d’entre nous de participer au salut du monde en nous approchant de Jésus à Gethsémani et puis sur la croix, « Non pas ma volonté, ma Ta volonté » ; ce qui ne nous empêche pas de dire « Viens à mon secours, aide-moi, je ne sais plus, je ne sais pas » ; il arrive des moments où on ne sait même plus où l’on en est tellement on souffre alors il faut se tourner vers le Christ pour que Lui prenne cette souffrance et la porte vers le Père de notre part parce que nous nous ne pourrons pas, nous souffrons trop mais le Christ pourra le faire à notre place, peut-être aussi les Saints à qui nous demanderons par humilité de supplier Dieu à notre place car nous nous sentons à la fois tourmentés et indignes.
« Que tous soient un », … que c’est difficile : des églises désunies depuis des centaines d’années, des églises qui croient au Christ, qui croient en Dieu mais qui ne sont pas encore suffisamment parvenues à aboutir dans leur désir d’unité. Certes il y a un chemin mis en place depuis des années, ce chemin est long ; verrons-nous l’accomplissement de ce désir d’unité, je n’en sais rien ? ; moi je suis très vieux probablement pas mais je n’ai pas le droit de désespérer ; peut-être vous la verrez, tant mieux. L’important, l’important ce n’est pas d’arriver à l’unité totale et parfaite qui, à mon avis, ne sera jamais parfaite, mais de la désirer ; quand nous apparaîtrons devant Dieu, c’est ce qu’Il nous demandera : « As-tu désiré aimer jusqu’au bout pour acquérir l’unité avec ton frère, l’as-tu désirée ? ». Il ne nous demandera pas si nous avons réussi mais désiré et nous pouvons la désirer si nous nous tournons vers le Christ qui Lui désire cette unité puisqu’Il la souhaite « Que tous soient un ». Alors faisons tout pour vivre dans l’unité et cela commence là sur le terrain où nous vivons immédiatement, nous les moines, les moniales de notre monastère, vous dans vos familles, dans vos paroisses, dans vos communautés, dans le monde ; c’est un vrai travail spirituel, une véritable ascèse ; je le répète souvent : la plus grande ascèse de la vie monastique c’est de vivre ensemble, dans l’unité, parce qu'il en a toujours un ou une qui est mal foutue, comme on dit, qui va pas bien, qui est en colère, qui est énervée, qui claque les portes, qui envoie promener quelqu'un ; il y a toujours un histoire comme cela ; c’est justement là que le Seigneur nous attend, Il nous donne rendez-vous à ce moment-là : « Qu'est-ce que tu fais de ton désir d’unité ? ». « Tu aimeras ton frère comme toi-même ». Qu'est-ce que je fais de ce commandement ? C’est une question que nous devons nous poser, pas de manière obsessionnelle mais régulièrement. « Est-ce tu aimes ton frère comme toi-même », sous-entendu comme toi-même tu es aimé parfaitement par Dieu ; alors on va répondre, en tout cas moi je répondrai : « J’essaye mais je ne réussis pas toujours mais pardonne-moi et donne-moi ta grâce » car c’est par la grâce de Dieu que l’on peut aimer ; ne croyons pas que l’on peut aimer par une simple décision personnelle, ce serait trop facile ; ce n’est pas la raison qui commande l’amour, c’est l’amour qui commande la raison, ce n’est pas la même chose ; et l’amour étant Dieu, c’est en Dieu qu’il faut aller chercher ce trésor d’amour, puiser dans ce trésor pour nous aussi aimer, apprendre à aimer ; alors le souhait du Christ se réalisera, en tout cas dans l’éternité, et nous serons heureux, profondément heureux, apaisés mais nous pouvons déjà l’être sur cette terre à chaque fois que l’occasion nous est donnée de nous réconcilier, de pardonner ; quelle joie intérieure nous recevons quand nous pardonnons avec le coeur ; c’est là le début de l’Eternité.
Amen