Mgr Elisée Dimanche des Ancêtres 2024
Dimanche des Ancêtres 15 décembre 2024
Monastère Saint Silouane
Deux dimanches avant la Nativité, l’Église, dans Sa sagesse fait à juste titre mémoire des "saints ancêtres", c’est-à-dire de tous les justes de l’Ancien Testament qui ont vécu bien avant la naissance du Christ.
À tous ces "ancêtres", Dieu s'est révélé, ce qui leur a donné de vivre dans l’espoir que viendrait le jour où Dieu serait plus proche, où Dieu « habiterait parmi les hommes », où « parlerait face à face avec eux », où Dieu "répandrait Son esprit sur toute chair"; les saints ancêtres espéraient que sinon eux, au moins leurs descendants pourraient voir ce jour et c’est dans ce sens qu’ils conservaient leur fidélité au Dieu vivant et agissant.
Et chacun d’entre eux est devenu l’exemple d’une vertu. Donnons quelques exemples :
Noé fut le seul juste dans sa génération ; et nous savons combien il est difficile d’être différent, de n’être pas comme les autres, d’être à contre-courant (...je vous parle en connaissance de cause ! ...) nous savons; nous en premier lieu, moines et moniales (puisque nous oeuvrons dans ce saint Monastère), nous savons comme il est compliqué de s’opposer à la terre entière de par la vocation que nous avons embrassée, suite à la rencontre fulgurante et décisive que nous avons eue avec le Christ et suite à l'appel pressant et irrésistible qu'Il nous a lancé.
Mais revenons à Noé, lui qui seul put défendre put ses valeurs, tout en étant entouré de pécheurs, afin de marcher dans la pureté et se présenter irréprochable devant Dieu.
Abraham quant à lui. manifesta l’image de la fidélité à la volonté de Dieu. En s’y conformant à la lettre: il laisse alors sa maison et ses proches, et s'achemine vers un pays dont il ne sait rien ; il mène alors une vie d’errance. Se soumettant à la volonté Divine, étant même prêt à sacrifier son fils Isaac qui, lui aussi fit preuve d’esprit de sacrifice en renonçant totalement à lui-même.
L’ancêtre Jacob, lui, vécut de longues années en pays étranger. Mais ni la richesse qu’il y a acquise, ni les multiples soucis d’une grande famille n’ont pu affaiblir en lui le souvenir de la patrie promise vers laquelle il tend en dépit de tous les dangers.
Le Prophète Elie brûlait d’un zèle ardent pour le vrai Dieu,
Job le grand souffrant, fut un exemple de patience : privé de tout, malade, couvert d’ulcères, il n’en a pas moins continué de bénir le Seigneur.
David, inspiré par l’Esprit de Dieu, a chanté les psaumes, que depuis trois mille ans déjà font et fondent la prière de l’Église.
Et ils sont encore nombreux, ces justes de l’Ancien Testament : ceux qui contemplent les mystères, les prophètes, les rois, les prêtres, les hommes et les femmes qui ont œuvré à la gloire de Dieu. De siècle en siècle, tous tendent leur regard vers le Messie qu’ils ont annoncé. Et, comme dit le Christ en s’adressant à Ses apôtres (et à travers eux, à chacun d'entre-nous), tous ont rêvé de voir ce que vous voyez et ils ne l’ont pas vu ; tous ont rêvé d’entendre ce que vous entendez et ils ne l’ont pas entendu.
Avec la venue du Christ, toute la plénitude de la révélation divine est contenue dans l’Evangile. Tout ce que le Seigneur voulait révéler aux hommes, Il l’a révélé. Tout ce que le Seigneur voulait dire aux hommes, Il l’a dit. Nous vivons donc dans des jours de grâce où la lumière de l’enseignement évangélique est révélée au monde. Surtout, soyons-en dignes et bien conscients et rendons-en grâces à Dieu, car telle est notre vocation commune dans l'Église, "pour la vie et le salut du monde".
Mais il y a une chose étonnante à préciser : nous le savons, les justes de l’Ancien Testament marchaient comme à tâtons, dans les ténèbres, ils ne voyaient que partiellement le mystère de la future révélation. Mais leurs pas étaient fermes, car ils conservaient une foi inébranlable en Dieu en faisant preuve de courage et de patience. Mais nous qui marchons dans la lumière, pour nous, tout porte le Nom du Christ, tout est inscrit et expliqué par les générations de saints Pères, et pourtant paradoxalement nous trébuchons constamment, nous dévions tantôt à gauche, tantôt à droite, nous sommes pusillanimes et à la moindre petite épreuve, nous perdons facilement notre foi et nous nous écroulons...
Soyons alors conscients et intimement persuadés que nous avons à notre portée tout ce que Dieu a bien voulu révéler à notre condition humaine ; mais qu’en faisons-nous ?... Malheureusement rien ou pas grand chose tant nous sommes centrés sur nous-mêmes et sur notre ego !!...
Les justes de l’Ancien Testament, eux, non seulement attendaient dans la tension et voyaient prophétiquement le Seigneur venir, mais leur vie elle-même devenait alors une véritable prophétie sur le Christ.
Noé fut le seul juste de sa génération et le Seigneur, incarné de Marie et ayant assumé la nature humaine, fut le seul parmi les hommes à n’avoir été en rien touché par le péché.
Abraham, en se soumettant à la volonté de Dieu, préfigure le Christ qui accomplissait en tout la volonté de Dieu le Père.
L’esprit de sacrifice d’Isaac quant à lui, anticipe le sacrifice du Sauveur sur la Croix.
Elie est désormais considéré par la tradition de l’Église comme « le second précurseur de la venue du Christ ».
Job endure de nombreuses souffrances et le Seigneur passe par la trahison, les humiliations, les tortures, les interrogatoires, les tourments et l’exécution.
Si, bien qu'avant le Christ, tous ces ancêtres ont partagé avec Lui Sa vie, d’autant plus nous sommes appelés; chacun d'entre-nous, à notre mesure, à laisser le Christ inspirer, imprégner et diriger notre vie.
Et là est le rôle de l’Eglise ; là est le rôle du Christ dans l’Eglise… si tant est que nous Lui laissions un peu de place et que nous Lui laissions la possibilité de nous guider.
Car être en Eglise, ce n’est pas dicter au Christ ce qu’Il a à faire, mais bien plutôt de nous mettre à Son écoute ; ce qui est tout le sens de ce carême de la Nativité que nous vivons ; à savoir faire de la place en notre cœur intérieur pour accueillir le Christ et Le laisser nous envahir ; laisser la lumière du Christ illuminer nos pensées, laisser l’esprit du Christ fortifier notre foi, laisser la parole du Christ diriger et orienter nos souhaits et toute notre vie.
Les Saints Ancêtres vivaient déjà pour le Christ, mais aujourd’hui une autre possibilité merveilleuse et magnifique nous est ouverte : vivre avec le Christ et en Christ, et faire nôtres ces paroles de l’apôtre Paul « ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi. »
Amen !