Fête de Saint Sophrony - Homélie de Monseigneur Élisée
Mémoire de notre Saint Père Sophrony au Monastère Saint Silouane
Votre Excellence, chers Pères, Mères, frères et sœurs !
Il y a trois semaines, nous célébrions la Pentecôte, ; il y a deux semaines, nous avons fêté tous les saints ; il y a une semaine ; nous solennisions tous les saints locaux. Et voici qu’aujourd’hui, dans cette continuité, en ce dimanche suivant tous ceux précédemment énumérés ; l’occurrence liturgique nous donne de nous retrouver autour de notre Père en Christ ; Saint Sophrony. Et croyez-moi ; prêcher sur Saint Saint Sophrony n’est pas chose aisée…
Cependant ; qu’il nous suffise de nous replonger d’une part dans ses écrits et d’autre par dans ses enseignements oraux qui nous ont été transmis de par ses « Paroles à la communauté » .
Alors la question qui se pose à nous et la suivante… : que doit-on en retenir ?...
Et bien que c’est pas à pas que nous cheminons vers Dieu ; que c’est pas à pas que nous nous approchons de Lui, que, c’est petit à petit que nous Le rencontrons ou plutôt devrions-nous dire que c’est petit à petit qu’Il se révèle à nous.
Après une première lecture des écrits de Saint Sophrony, ceux-ci peuvent nous sembler ardus tant il est vrai que l’exigence qu’il nous enseigne peut se faire de plus en plus radicale au fur et à mesure de notre progression et si l’on perd de vue une fois de plus le but proposé est celui de notre vie, c’est à dire l’union à Dieu.
Si St Sophrony s’adresse en premier lieu à ceux qui ont embrassé l’état monastique, il s’adresse aussi tout naturellement à tout disciple du Christ, soucieux de sa vie spirituelle et surtout de la mener à bien, en vérité ….
On pourrait synthétiser la somme de ses enseignements par ses propres paroles ; à savoir que « toute notre ascèse se résume en ceci : que nous soyons libérés de l’emprise de la mort, et que nous soit de nouveau donnée la Vie de Dieu ».
Vaste programme n’est-ce pas ? Certes ; mais notre vie terrestre ne doit pas dévier de sa fonction initiale à savoir la lutte contre chaque manifestation du péché en nous ; afin de nous libérer des conséquences de la mort. Car à la place de cette mort doit venir en nous la vie ; cette vie qui a ses racines uniquement en Dieu ; lui-même à la fois source et but de toute vie, rappelons-le.
Car si nous voulons prétendre suivre le Christ il faut être prêts à entamer un combat ; c'est-à-dire ne pas essayer d’éviter la douleur ; mais au contraire ne pas craindre cette douleur par laquelle s’exprime en réalité notre désir de suivre le Christ et de nous unir à Lui ; d’accepter pleinement cette douleur qui bien souvent est la résultante de nos faiblesses, ces faiblesses qui peuvent secouer intérieurement tout notre être à la manière de l’épileptique dont il est été question dans l’évangile.
Pour remédier à cela et nous guider ; Saint Sophrony nous donne maints conseils et réponses ; comme une sorte de jeûne se déclinant à tous les niveaux, et qui ne peut que nous encourager à viser la nécessité de nous abstenir de tout ce qui n’est pas en accord avec l’esprit des Commandements ; donc de devenir libres ; profondément libres.
Tout ceci nécessite bien sûr un apprentissage ; et pour commencer ; nous ne devons pas craindre de reconnaître notre faiblesse, de l’accepter, d’apprendre à vivre avec et de savoir poser des actes d’humilité concrets ; de sorte que les germes orgueilleux de volonté propre qui sont ancrés en nous deviennent autant d’occasion de nous humilier et de prouver ainsi notre attachement à Dieu et notre désir de Lui.
En effet ; comme nous l’a enseigné, à maintes reprises en ce saint lieu Mgr Syméon: nous devons tendre à devenir toujours de plus en plus « des êtres de désir », non de désir en vue de satisfaction individuelle et qui serait contraire à la théologie de la « personne » ; mais des êtres d’un désir ardent du Seigneur afin d’être tout en Lui et ; dans une certaine mesure grâce à Son aide et à Sa coopération en nous et avec nous ; devenir en quelque sorte nos propres « créateurs ».
Bien évidemment cela ne se fera pas sans lutte et sans larmes ; mais nous le savons par notre expérience monastique : l’âme qui s’est mise dans l’humilité, lorsque nous reconnaissons dans la simplicité nos fautes et nos erreurs, lorsque nous les avons pleurées ; alors, nos âmes retrouvent leur équilibre dans l’Amour, et le sommet de l’Amour c’est la joie dont St Sophrony était coutumier !
Non une joie forcément exubérante et démonstrative ; mais une joie intérieure, spirituelle et priante, qui est la meilleure arme dont nous pouvons user dans notre quotidien ; cette joie qui nous permet d’affronter les épreuves, de déjouer les pièges qui nous sont tendus par le tentateur, cette joie qui… somme toute, devient obéissance, dans le sens où c’est cette joie que Dieu attend de nous.
Car…, oui ; voilà la vraie dynamique : obéir joyeusement comme des enfants, porter notre vie comme des âmes viriles qui connaissent leurs responsabilités et assument leur liberté.
Nous pouvons donc conclure ; à la suite de notre Saint Père Sophrony ; en disant qu’il n’y a qu’un seul remède : Aimer.
Aimer plus, aimer divinement, aimer en Dieu ; sans être étonnés de rencontrer la misère humaine (la nôtre ou celle de notre prochain) ; accepter que Dieu purifie ce qu’il y a de défaillant en nous.
Pour cela ne fermons jamais notre cœur et souvenons-nous qu’un cœur blessé est un cœur ouvert, et bien loin de chercher à étouffer notre cœur, élargissons le au dimension du monde, à « l’Adam total » ; élevons le de l’amour qui désire recevoir à l’amour qui désire donner. Car on aime jamais trop lorsque l’ordre de l’Amour est respecté ; c'est-à-dire Dieu d’abord, puis notre communauté, ou notre conjoint ; nos enfants, puis notre famille et notre prochain ; nous serons alors dans la vérité, car lorsque nous avons regardé longtemps cette Vérité, alors elle n’est plus cherchée mais possédée.
Que Saint Sophrony nous accorde par ses prières la grâce d’une quête inlassable de Dieu, avec cette violence d’amour qui a parfois la force de Le vaincre et de L’incliner vers l’homme ! Amen !