Que tous soient Un, connaître Dieu
15/10/23 Jn XVII, 1-13
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen
L’Evangile que nous venons d’entendre présente ce que le Christ a fait sur cette terre et Il en rend compte à son Père : Il prie son Père en Lui disant, en Lui expliquant qu’Il a accompli sa mission ; il y a beaucoup de choses dans ce texte théologique très fort, nous pourrions passer beaucoup de temps à l’analyser et à essayer d’en retirer tout ce qui est nécessaire pour chacun d’entre nous mais nous allons peut-être retenir deux ou trois points ;
la première phrase qui nous touche c’est que le Seigneur Jésus dit : la Vie éternelle c’est qu’ils Te connaissent ; la Vie éternelle, celle à laquelle nous sommes tous appelés par la miséricorde de notre Dieu ; la Vie éternelle c’est effectivement connaître le Père ; certes les hommes L’ont connu par l’intermédiaire du Fils : qui M’a vu a vu le Père, dit le Christ mais nous n’avons jamais vu Dieu le Père et d’ailleurs il est interdit de Le représenter sur les icônes ; mais la Vie éternelle c’est de Le connaître, non seulement de Le voir mais de Le connaître, or l’expression connaître dans le langage biblique dans l’Ancien Testament comme dans le nouveau, c’est entrer dans une relation d’amour profonde avec celui ou celle avec qui nous conversons, avec lesquels nous avançons ; là il s’agira d’avoir une communion d’amour avec le Père – ce qui n’exclut pas le Fils et l’Esprit-Saint ; cette communion d’amour, elle peut commencer dès ici-bas – le Royaume des Cieux est déjà parmi nous, a dit le Christ et vous avez remarqué sans doute au long des Liturgies auxquelles vous venez pour prier et communier que la Liturgie commence toujours par : Béni est le Royaume, ce n’est pas béni sera le Royaume, c’est béni est le Royaume, le Royaume est déjà parmi nous ; autrement dit nous pouvons déjà apprendre à connaître Dieu le Père, Celui qui nous a créés avec le Fils et par l’Esprit, Celui qui nous a permis d’être au départ, pour Adam et Eve, dans le paradis ; nous le savons bien ce paradis a été perdu pour nos premiers parents parce qu’ils ont désobéi, tout simplement ; ils ont désobéi et ils ont accentué leur faute en se cachant ; ils auraient pu venir vers le Seigneur Dieu et dire : nous avons péché, Vous nous aviez dit de ne pas manger de cet arbre et nous l’avons fait, aie pitié de nous ; le Seigneur est miséricorde Il aurait permis de continuer la vie sur terre peut-être avec une petite remarque pour les remettre sur les rails mais ils se sont cachés, quelle bêtise, ils se sont cachés et justement nous nous devons ne pas nous cacher devant Dieu pour Le connaître ; si on se cache on ne Le connait pas, on ne peut pas avoir une relation avec Lui or si nous Le connaissons, nous sommes déjà dans la Vie éternelle, dans le Royaume des Cieux ; ne nous cachons pas aux yeux de Dieu ; certes nous sommes tous, vous, moi, des pécheurs, bien évidemment, et nous le serons jusqu’à la fin de notre vie ; vous savez que St Sophrony disait : on ne vit pas en chrétien, on meurt en chrétien ; il n’y a pas de chrétien parfait, cela n’existe pas ; il y a une tension vers la perfection, vers la relation à Dieu, vers la connaissance de Dieu, vers l’amour de Dieu, une tension qui doit nous animer de façon permanente mais il y a des moments où nous tombons comme Adam et Eve, nous chutons mais il y a la miséricorde de Dieu qui est à notre disposition en permanence ; le Christ est là, à côté de chacun d’entre nous, Il attend et dès que nous tombons Il nous tend la main pour nous relever ; nous apprenons ainsi pas-à-pas, tout au long de notre vie, à connaître Dieu et si nous Le connaissons, nous sommes déjà dans la Vie éternelle, dans le paradis retrouvé.
Le deuxième point qui est important, que nous connaissons tous pour en connaître les difficultés : que tous soient Un, dit le Seigneur Jésus ; que tous soient Un ; alors nous sommes en ce moment en face d’un désastre mondial, un désastre causé par le péché de l’homme quel qu’il soit, d’un côté ou de l’autre, c’est le même péché ; nous voyons qu’il y a des désunions violentes, dramatiques, mortelles ; qu'est-ce que fait l’homme ? Il oublie le commandement du Christ : aimez-vous les uns, les autres, que tous soient Un ; notre responsabilité de chrétien - puisque nous ne sommes pas directement impliqués dans toutes ces guerres qui scandent la vie du monde – est de prier, de verser des larmes, de supplier, de recommencer, de resupplier, c’est vital pour le monde, c’est notre responsabilité de chrétien, même si il y a des chrétiens qui font n’importe quoi et qui font la guerre ou qui la bénissent ; tout cela c’est désastreux, cela nous fait souffrir, même si nous ne sommes pas sur le terrain de la guerre, nous en avons les échos qui blessent nos cœurs, nos âmes, notre être profond ; car en fait nos frères, quels qu’ils soient, - et c’est Saint Silouane qui le dit : mon frère, c’est mon sang ; nous sommes liés, tous, tout le monde, tous les êtres de la terre, ontologiquement nous sommes liés, nous avons tous été créés par l’amour de Dieu donc nous avons une responsabilité pour tous nos frères qui font la guerre, qui s’entretuent et qui créent des malheurs dans toutes les familles et dans tous les pays ; que tous soient Un, voilà une parole qui nous remet sur la voie en ces jours terribles que nous vivons ; alors que faire ? Eh bien oui, prier, supplier, verser des larmes et ne pas nous arrêter ; il ne suffit pas de regarder la télévision ou de lire les journaux qui nous annoncent que telle guerre se déclenche, telle autre est en train de se développer, etc., etc. Ce n’est pas suffisant de savoir, il faut aller au-delà du savoir, il faut prier, prier, prier, nous devons arracher la grâce de la paix à Dieu car c’est Lui qui essaye d’ouvrir les cœurs mais l’homme est libre, il referme son coeur donc les prières doivent aider à ouvrir les cœurs pour que les hommes comprennent leurs erreurs dramatiques et qu’ils se remettent sur la vraie voie de l’amour. Quelle paix nous ressentons quand il nous arrive après une petite dispute, plus ou moins grave, avec quelqu'un qui nous est proche, quelle paix nous ressentons quand nous avons demandé « pardon et prie pour moi », alors la paix revient, immédiatement, non seulement dans celui qui a été agressé par nos paroles mais en nous ; nous changeons d’état, nous sortons de l’enfer et nous rentrons dans le paradis à chaque fois ; il ne faut pas se priver, il ne faut pas demander pardon comme cela « pardonne-moi … », ce n’est pas de la gymnastique la demande de pardon, c’est autre chose, c’est la gymnastique du coeur ; si nous avons cette capacité de demander pardon alors ce que le Christ nous invite à faire : « Que tous soient Un » se réalise. Prions le Seigneur Dieu de nous donner déjà à nous-mêmes cette capacité de pardonner, de ne pas entrer en guerre avec notre frère ou notre sœur et si nous le faisons un peu de pardonner ; si nous le faisons, nous agissons pour le monde entier ; nous avons un certain pouvoir entre guillemets – ne nous glorifions pas de ce pouvoir il nous est donné, c’est gratuit, c’est Dieu qui le donne, c’est Dieu qui agit au travers de nous, nous sommes des instruments, des instruments de paix ; il faut être des instruments de paix là où nous sommes : dans nos familles, dans nos monastères, dans nos paroisses, dans nos communautés, dans notre diocèse, dans l’Eglise quelles que soient les mauvaises actions que nous découvrons dans l’Eglise – l’Eglise ne sera jamais parfaite, il faut le savoir ; elle est parfaite d’une certaine manière parce qu' à sa tête c’est le Christ qui est le chef de l’Eglise ; ce n’est pas un hiérarque le chef de l’Eglise, c’est le Christ, donc par ce côté-là l’Eglise est parfaite, par le sang qui a été versé par le Christ notamment mais il y a nous, nous faisons partie du corps, la tête est parfaite, le corps – vous savez comme moi – il y a des moments où cela se balade, ce n’est pas tout à fait ce qui convient mais nous le savons au bout d’un moment, nous le comprenons parce que nous sommes tristes, le démon arrive encore pour nous imposer la tristesse, une tentation de plus ; chassons la tristesse par le pardon, l’amour, « Que tous soient Un » ; notre pardon n’est pas toujours accueilli, notre amour n’est pas toujours accueilli, nous devons encore prier pour que cet amour soit accueilli parce que ce n’est pas notre amour c’est l’amour de Dieu en nous que nous partageons.
Alors voyez-vous ce texte qui est très intense, vous pouvez le relire tranquillement, méditer sur chaque phrase, chaque phrase est un sommet de théologie et la théologie c’est une science qui nous amène à vivre, ce n’est pas quelque chose d’intellectuel la théologie, les dogmes ce n’est pas une chose intellectuelle, c’est pour nous aider à vivre ; une théologie qui ne permet pas de vivre, elle ne sert à rien, elle reste dans les livres, dans les paroles de certains professeurs qui connaissent tout mais qui ne savent rien ; la théologie c’est la vie ; la vie dogmatique c’est la vie avec des repères que nos Pères nous ont proposés au travers des conciles ; nous fêtons le septième concile œcuménique, les Pères à chaque fois qu’ils se sont réunis c’était pour régler une question, une vraie question : nature du Christ : deux natures, la Mère de Dieu : est-elle la Mère de Dieu, etc. Il y avaient des questions, ils se réunissaient, souvent à la demande de l’empereur mais pas toujours et ils discutaient – il y a eu des gros problèmes dans les conciles et il y avaient des hérésies, des erreurs d’interprétation : Arius a été condamné parce qu'il disait des bêtises, il était très intelligent, plus qu’intelligent et je me souviens que quelqu'un de célèbre Leonid Ouspenski, ce grand iconographe, disait : dans l’Eglise il ne faut pas être trop intelligent parce que cela devient la catastrophe, les trop intelligents sont les maîtres de l’hérésie et il avait raison ; alors vous voyez tout cela nous est offert aujourd'hui encore une fois pour notre méditation, pour notre vie, pour notre entrée déjà dans la Vie éternelle ; gardons ces paroles et vivons de cette parole. Que Dieu nous l’accorde.
Amen